Pondichéry entre dans l'histoire de France lorsque la Compagnie française des Indes orientales achète en 1673 un petit village côtier au sultan de Bijapur. Pondichéry devient ainsi la tête de pont des intérêts commerciaux de la France en Inde. Il faut cependant attendre 1685 pour que François Martin, nommé « directeur de la côte de Coromandel », mette Pondichéry sur la voie de la prospérité. Plan de Pondichéry dressé par Nicolas de Fer, datant de 1705 et publié par la Compagnie des Indes. La ville est presque créée de toute pièce par les Français qui y font des aménagements considérables Le site est médiocre pour la navigation, car la côte est basse, sableuse, avec des lagunes et une barre de vagues brisantes. Les navires doivent stationner au large en utilisant des embarcation locales, les chelingues, pour le transbordement des marchandises, mais la zone est favorable pour le commerce car la proche embouchure d'une rivière permet de pénétrer aisément à l'intérieur du pays et les tisserands sont nombreux dans la région. Les frictions avec les Hollandais, implantés dans la région depuis bien plus longtemps que les Français, et la mort de Martin en 1706, ralentissent le développement de la ville. Il faut attendre la fin des guerres de Louis XIV et l'arrivée de Pierre Lenoir en 1726 pour que les affaires reprennent. La ville est ensuite dirigée par Benoist Dumas en 1735 et plus tard par Joseph François Dupleix en 1742. C'est sous le mandat de ce dernier, et grâce à lui, que Pondichéry connaît son apogée. Grâce à ses victoires militaires contre les Britanniques, il étend le territoire autour de la ville et dans le sud de l'Inde, et a beaucoup d'influence dans les affaires des princes et souverains de la région. La ville, qui se situe dans la tradition portugaise, combine port, factorerie et fort, et distingue entre la "ville blanche", bien dessinée, et la "ville noire". En bordure de mer, sur la dune la plus élevée, est édifié le fort, et de part et d'autre la "ville blanche". Les Français sont attachés à l'urbanisme. Un officier note en 1730 : "Cette ville a beaucoup gagné, jadis les gens du pays construisaient leurs maisons en bois ou en terre; M. (le gouverneur) Lenoir imposa de ne bâtir qu'en brique et de ne couvrir qu'en tuiles, et on construisit des maisons magnifiques et en quantité." La ville est rapidement réputée pour sa beauté, les bâtiments publics participant pour beaucoup à sa renommée. L'hôtel de la compagnie est un monument majestueux, rappelant les plus nobles édifices de la métropole, avec des toits en terrasse et des ailes en retour. Il en est de même de l'hôtel de la monnaie et des églises, en particulier celle des Jésuites. L'autre grande préoccupation des directeurs de la compagnie est la défense du comptoir. Ils obtiennent assez rapidement le droit d'entretenir des troupes sur le sol indien. Elles sont peu nombreuses, quelques centaines d'hommes, mais grossies de plusieurs milliers d'Indiens encadrées et armées à l'européenne, les Cipayes. De 1702 à 1704, ils font détruire l'ancien fort, puis en font construire un nouveau, réalisé sous la direction d'un ingénieur militaire et dont le plan est copié sur celui de Courtrai, aménagé quelques années plus tôt par Vauban. C'est un ouvrage défensif considérable, considéré par les militaires indiens comme la meilleure citadelle européenne dans le pays. De plus, de 1724 à 1747, toute la ville est entourée d'une enceinte fortifiée, précédée de bastions garnis d'une forte artillerie. En 1748, pendant la Guerre de Succession d'Autriche Pondichéry, défendue avec brio par Dupleix résiste avec succès à un long siège anglais, terrestre et naval. On ne connait pas avec précision l'importance de la population vivant à l'intérieur de l'enceinte. L'abbé Guyon, bien informé semble-t-il par le gouverneur Dumas écrit en 1740 : "Suivant le dénombrement qui en a été fait dans les dernières années, on a compté dans Pondichéry 120 000 habitants, Chrétiens, Mahométants (Musulmans) ou Gentils (Hindous)." Les Européens sont fondamentalement minoritaires dans la ville, puisqu'ils ne seraient pas plus de 700 vers 1730. Le territoire dominé par les Français autour de la ville est formé au milieu du XVIIIème siècle de quatorze enclaves mal reliées entres elles car acquises au hasard des circonstances, mais totalisant une superficie de 29 000 hectares.
Pondichéry vers 1750, au temps de sa splendeur. Vue des magasins de la Compagnie des Indes, de l'amirauté et de la maison du gouverneur. (Lorient, Musée des Indes)
Quelques autres établissements sont sous la dépendance directe de Pondichéry. Karikal, au sud, à l'embouchure de la rivière Cavery, à une quinzaine d'heures de navigation est un gros bourg comptant environ 5 000 habitants au milieu du XVIIIème siècle. Sa situation présente un double avantage : il permet le ravitaillement de Pondichéry en riz et autres produits alimentaires grâce à sa position au cœur d'une région fertile et il abrite des tisserands réalisant les toiles bleues propres pour le commerce de la côte d'Afrique. Les loges situées au nord de Pondichéry, à Mazulipatam et Yanaon sont de simples entrepôts pour l'achat des cotonnades. Pondichéry est aussi en relation beaucoup plus au nord (2 000 km) avec l'établissement français de Chandernagor. Ce petit comptoir (940 hectares) est très actif pour le commerce car il est situé sur un bras du delta du Gange, c'est à dire une grande voie navigable vers la très riche région du Bengale. Dupleix note en 1731 dans un Mémoire adressé aux directeurs de la Compagnie : "Ce serait entrer dans un trop long détail que de traiter des différentes espèces de marchandises que produit ce pays. Il suffit de dire qu'elles y sont en abondance et propres à tous les différents commerces, qu'elles produisent en Europe un profit considérable." La prospérité de Pondichéry s'appuie aussi dans l'océan indien sur l'île-de-France et sa base de Port-Louis qui sert de relais aux vaisseaux de la Compagnie des Indes pour le voyage aller et retour vers Lorient. Au fil du temps les directeurs de la Compagnie ont réussi à se faire concéder par l'empereur mogol des droits considérables. Outre l'entretien d'une armée locale, ils peuvent percevoir tous les impôts déjà existants, de quelques nature qu'ils soient, c'est à dire les taxes foncières, douanières et autres contributions indirectes; ils peuvent aussi en créer de nouveaux; il ont le droit d'exercer la politique et la justice, de battre monnaie, d'affermer les terres domaniales et ils ne sont soumis au contrôle d'aucun représentant du Mogol. On peut considérer qu'en 1750, Pondichéry qui vit sous l'autorité d'une compagnie active et sous le pavillon du roi de France, est une ville étrangère sur la côte indienne, face à l'autorité de plus en plus faible du pouvoir mogol. Tisserand indien. Le commerce des "contonnades" vers l'Europe est un pilier essentiel de la prospérité de de Pondichéryau XVIIIème siècle.
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