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Montmartin-Sur-Mer, la poste. CPA collection LPM 1900 | ||||||||||
Ce voeu est transmis à l’Administration des Postes et Télégraphes qui répond par une lettre du Ministre en date du 5 décembre. L’Administration est toute disposée à procéder à une étude mais « en raison de l’importance du travail et aussi de l’élévation des sommes à engager, elle désire connaître les localités qu’il conviendrait de relier en premier lieu ». Dans cette lettre, le ministre évaluait le coût des liaisons entre les localités les plus importantes, exposait le mécanisme financier et précisait le montant des taxes et de l’abonnement. Le 26 janvier 1896, le Directeur Général informe le Préfet qu’un projet de circuit entre Caen et Paris est à l’étude et qu’il a demandé au Calvados s’il serait disposé à négocier pour que la Manche put utiliser ce circuit. Lors de la session d’avril 1896, le rapport du Préfet est mis au voix et adopté. L’affaire reste cependant en sommeil et ne revient à l’ordre du jour qu’à la session d’août 1897. Le projet d’ensemble pour le Calvados et la Manche s’élevait à 465 000 francs dont 200 000 francs environ pour ce dernier. Les chambres de commerce de Granville et de Cherbourg et les municipalités de Cherbourg, Valognes, Saint-Lô, Coutances, Granville, Avranches et Carentan sont consultées sur les subventions qu’elles seraient disposées à souscrire. En conclusion de son rapport, le Préfet demande « si le département doit contribuer à l’avance des 200 000 francs réclamés pour cette organisation et selon votre décision, l’Administration des P et T aurait à fixer la base de répartition entre les principales villes intéressées de la somme à fournir. Si le Conseil Général est décidé à voter un crédit, il y aurait lieu de recourir soit à l’emprunt soit à une imposition extraordinaire ». Au voeu du conseil d’arrondissement de Cherbourg pour qu’un circuit Caen Cherbourg soit établi succède le 16 août 1897 un voeu de quatorze conseillers généraux pour qu’un réseau téléphonique soit établi entre les principales localités du département. Lors de la séance du 19 août, le rapporteur de la Commission d’Administration Générale rappelle les différents voeux émis afin que le téléphone pénètre dans la Manche et expose le projet de l’Administration des P et T. Mais avant d’ouvrir le débat, le rapporteur pose très clairement le problème de la participation financière du département: « il sera bien difficile d’aboutir pendant tout le temps que le Conseil Général n’aura pas pris le parti d’intervenir par une participation définie du département ». La commission propose que les villes intéressées fournissent la totalité de la somme nécessaire et définit leur participation | ||||||||||
À titre personnel, le rapporteur Emmanuel Liais, conseiller général de Cherbourg, défend le projet, mais souhaite que le département s’engage à financer la moitié du projet, les villes ayant promis de supporter l’autre moitié. Il conclut ainsi son intervention: « Quant aux services rendus par le téléphone, ils seraient considérables » Fontaine, conseiller général de La Haye Pesnel, tout en reconnaissant l’importance des services que rendrait le téléphone, écarte l’idée de voir le département prendre à sa charge l’installation du réseau.
Pour Lemoigne, conseiller général de Beaumont « c’est le département qui doit prendre l’initiative dans cette affaire» et propose que « l’emprunt soit fait par le département et que les villes participantes soient chargées du paiement des intérêts ». A l’inverse, Chevalier, conseiller général de Coutances, demande pourquoi l’Etat ne supporte pas ce genre de dépense, ajoutant que seules Cherbourg et Granville ont un intérêt particulier à l’établissement du téléphone et rappelant que la Commission « a pensé qu’il n’était pas sage d’engager dès maintenant les finances du département ». |
Emmanuel Liais, Conseiller général de Cherbourg | |||||||||
Ce conseiller ajoutait que « dans les petites localités, on se préoccupe fort peu de l’établissement d’un réseau téléphonique» et concluait son intervention en critiquant la lenteur des communications: « pour communiquer avec Paris, il faudra demander la communication avec Saint-Lô qui la demandera à Caen, dans ces conditions, je crois qu’il serait presque aussi rapide de prendre le chemin de fer et d’aller à Paris »(3). Sévère critique à laquelle le Président Morel se rallie en préconisant l’ajournement du projet. Foisil, conseiller général d’Isigny-le-Buat soutient son abandon, ne voyant pas « quel peut être l’intérêt pour nos campagnes de contribuer à l’établissement d’un réseau téléphonique».
Lemoigne réplique qu’il n’est pas bon de mettre en opposition les villes et les campagnes et n’oppose qu’un argument : avoir dès aujourd’hui le téléphone dans le département.·Les conseillers généraux de Cherbourg et de Granville soutiennent cette démarche. Regnault, conseiller général de Périers, agrée l’arrivée·.du téléphone sous la condition que son établissement n’entraîne aucune dépense pour le département: « je crois que nous emploierions mieux notre argent en créant des bureaux de postes ou de télégraphes dans les communes qui en sont dépourvues ». En fin de débat, deux amendements sont mis aux voix. Le premier consistant à charger le département de contracter un emprunt de 200 000 francs dont les intérêts seraient à la charge des villes participantes, n’est pas adopté. Mais le second, visant à demander au Préfet de poursuivre l’affaire et à déléguer à la Commission Départementale les pouvoirs nécessaires pour signer les traités avec les villes sous la réserve que ces traités ne seraient valables que tout autant qu’ils seraient ratifiés par le Conseil Général, est adopté. Par le refus d’une majorité opposée à toute participation financière, la Manche n’aura pas de réseau téléphonique départemental en 1897. Le conservatisme a prévalu sur le désir de quelques-uns de voir cette innovation se propager dans le département de la Manche. | ||||||||||
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Agon-Coutainville, la poste. CPA collection LPM 1900 | ||||||||||