LA REVUE ILLUSTREE

DU CALVADOS  1911-1914 

         
 

Petite chronique féminine de

CAVELLIER, Gabrielle

paru dans la revue du Calvados de 1911à 1914
  

 
 

 

 

 

 

1914

 

Bébé-Tyran

Celles qu'on a gâtées

La paille et les allumettes

Le Chapitre des Belles-Mères

Celles qu'on truque

Le Salon

Visites et Cartes de Nouvel An

 
     
     
   
  LA REVUE ILLUSTREE DU CALVADOS    1911-1914 
   

Visites et Cartes de Nouvel An -Janvier 1914
         
 

On a en ce moment une très fâcheuse propension à s'affranchir de la sujétion des visites et des cartes de nouvel an. Les car­tes prennent, axa yeux de beaucoup de personnes, un temps qu'elles jugent pou­voir être mieux employé à d'autres beso­gnes.

 

Et puis, elles nécessitent une mise à jour annuelle passablement laborieuse, si l'on se pique qu'elles touchent sans omis­sion le cercle des connaissances.

 

Enfin, elles risquent de se heurter au silence réservé d'amis adversaires du bristol : petit affront douloureux pour qui tient état exact de ses envois.

Quant aux visites, c'est bien une autre histoire. Nul ou presque, qui ne les déclare assommantes, excédantes, ne pouvant faire plaisir à qui les accomplit ni à qui les re­çoit.

Voyons, voyons... Je sais parfaitement que des souhaits écrits ou parlés entre personnes ne cultivant pas de relations, autant en emnorte le vent. Mais c'est que, justement, il dépend de chacun de les do­ter d'un sens en les revêtant d'une ma­nière.

 

SAGERS 1910 Paris la nuit

 
     
 

Ce qu'il faut considérer, c'est que le carte et la visite de la nouvelle année sont les moyens les plus civils et les moins encombrants que l'on ait trouvés d'entre­tenir des amitiés lointaines dont aucune raison ne vous fait désirer de resserrer les liens.

 

La famille est étroite, le monde des familiers difficile à recruter intelligemment.

 

Ils forment à eux deux une sorte d'armée active que, dans maintes occasions, on éprouve un soulagement à voir doubler d'une nombreuse armée territoriale, - vous savez, cette armée qui vous bombarde de félicitations quand vous êtes décoré, qui vient vous serrer la main à la sacristie le jour de vos noces, et qui suit votre cor­billard en parlant trop haut lorsque vos héritiers vous conduisent à la concession perpétuelle.

Eh bien, à moins que d'être un misan­thrope au coeur noué de rubans verts, il faut cultiver cette armée-là. La carte coû­te peu. Usez-en largement. La visite ennuie davantage. « Cordialisez »-la, si je peux employer ce néologisme. Faites-là sans façon, gentille, exempte de pose et surtout de rancune, si tant est que vous cultiviez cette ciguë dans votre jardin. Une visite bien faite est une sympathie conquise. Et ne di­tes pas que vous vous moquez des sympa­thies. Elles constituent un chaud vêtement à l'âme pour les heures à venir où l'on souf­fre et où l'on a froid.