SAINT DENIS LE VETU CC 49.9 du canton de Cerisy La Salle |
NOTICE HISTORIQUE SUR SAINT DENIS LE VETU 40/40 |
| Une paroisse Normande Par l' Abbé E. Quinette Paru en 1889
- 5° L'époque contemporaine 7/7 depuis 1803 jusqu'à nos jours. (1889 lpm) |
III - Construction du Presbytère actuel sous la cure de M. Louis Huvé (depuis 1879) |
A M. l'abbé Gougeon succéda M. l'abbé Louis Huvé. Né à Saint-Brice-sous-Avranches, en 1837, M. Huvé commença ses études sous la conduite de son vénérable oncle, d'abord professeur au collége d'Avranches, puis précepteur des enfants de M. le marquis de Montécot, et curé de Poilley et de Folligny.
M. Huvé appartient à une famille remarquable par son esprit de religion et par son attachement aux bonnes traditions du passé. Un de ses grands-oncles fut curé de la Godefroy, et au moment de la Révolution, ce digne curé aima mieux s'exiler en Angleterre que de prêter serment à la constitution civile du clergé. Le père de M. Huvé a été, pendant de longues années, maire de Saint-Brice.
M. Louis Huvé acheva ses études au Petit-Séminaire de Mortain, entra en 1861 au Grand-Séminaire de Coutances et fut ordonné prêtre en 1865. Il fut d'abord nommé vicaire à Cambernon, puis à N.-D. de Saint-Lo, où il passa près de dix ans. De là, il fut appelé, le 16 juillet 1879, à la cure de Saint-Denis-le-Vêtu. Il fut installé par M. l'abbé Langlois, alors archiprêtre de Saint-Lo, qui n'était pas seulement son curé, mais encore son intime confident ; du reste, le curé et le vicaire étaient deux amis d'enfance qui surent s'apprécier l'un l'autre et se rendre de mutuels services [91].
A la même époque, M. l'abbé Gustave Bouchard, récemment ordonné prêtre, originaire de Saint-Lo, venait remplacer M. l'abbé Boizard.
A son arrivée à Saint-Denis-le-Vêtu, M. l'abbé Huvé trouva les choses en bon état au point de vue spirituel. Mais sous le rapport matériel, il y avait bien à faire ; il succédait à un vieillard qui, dans ses dernières années, avait, malgré son zèle, négligé certaines choses. Les ornements et les linges nécessaires au culte commençaient à devenir rares. Les premiers soins du curé furent de pourvoir l'église de ces objets ; il acheta beaucoup de choses pour la décoration des autels. Il fit nettoyer et reblanchir les murs inté-rieurs de l'église et de la sacristie. Mais l'oeuvre matérielle jusqu'à présent la plus importante de sa cure [92], c'est celle de la construction du presbytère. Le presby-tère qu'il occupa à son arrivée était une ancienne maison insuffisante et tombant en ruines ; il fallait à tout prix la remplacer. Ce n'était pas une petite affaire ; toutefois, M. le curé l'entreprit, et, grâce au concours intelligent et dévoué de M. Lehodey, maire de la commune depuis 1863, il la mena à bonne fin. On commença les travaux au mois de novembre 1880, et à la fin de juillet 1883, M. le curé entra en possession de sa nouvelle demeure ; 24,000 francs furent dépensés pour cette construction ; la commune, sans le secours de la fabrique, fournit les fonds. Mais si la fabrique ne donna rien pour le presbytère lui-même, en revanche, elle prit l'engagement de faire construire à ses frais les dépendances de la nouvelle habitation.
M. Huvé continue de maintenir sur un bon pied les oeuvres qu'avait établies son vénéré prédécesseur. Il a déjà donné deux missions : la première a été prêchée, en 1881, par le R. P. Lenvoisé, prêtre de l'Oratoire, actuellement directeur du Petit-Séminaire de Saint-Lo, et par M. l'abbé Estard, professeur au même Séminaire.
Cette mission a duré environ quinze jours. Pendant ce temps, les deux missionnaires s'employèrent avec un zèle admirable au salut des âmes. Dieu bénit leur ministère ; presque toutes les femmes et la plupart des hommes répondirent avec empressement à l'appel de Dieu.
Cinq ans plus tard, au mois de septembre 1886, une seconde mission fut donnée, à l'occasion du Jubilé, par les RR. PP. Charles et Edouard, religieux Récollets, de Caen, et produisit des fruits abondants de salut. Par leur parole éloquente et par les saintes industries de leur zèle, ces deux hommes de Dieu remuèrent la population et l'amenèrent en très grande partie au Tribunal de la réconciliation et à la Table sainte.
Le dimanche de la clôture, M. l'abbé Legoux, vicaire-général, l'intime ami de M. le curé de St-Denis, relevait par sa présence l'éclat de la solennité.
M. l'abbé Bouchard ayant été nommé, au mois de juillet 1882, vicaire à St-Pierre-de-Coutances [93], fut remplacé par M. l'abbé Rabec : ce jeune prêtre demeura jusqu'en 1885 à St-Denis-le-Vêtu ; il fut nommé vicaire à Saint-Saturnin d'Avranches, où il est actuellement. Au mois de juillet 1885, il fut remplacé par M. l'abbé Quinette [94], né au Guislain en 1861, et ordonné prêtre le 29 juin 1885.
Sous la cure de M. Huvé, en 1884, est décédée, à Saint-Denis-le-Vêtu, une femme remarquable par sa charité et son zèle pour les bonnes oeuvres : c'est Mme Ve Lehodey, née Jeanne-Mélanie de la Brugère, originaire de Granville, demeurant au manoir de Laulne. Elle dépensait chaque année plus de la moitié de ses revenus pour le soulagement des pauvres, la décoration des autels, le soutien des vocations ecclésiastiques et diverses bonnes oeuvres. Elle a fait, en 1863, une fondation à la fabrique de St-Denis-le-Vêtu ; elle consistait en une rente de 60 francs, à charge de célébrer des services religieux. Son fils, ancien juge d'instruction à Rouen, est venu s'établir à St-Denis-le-Vêtu, au manoir de Laulne. |
NOTES | [91] M. l'abbé Langlois était né à Avranches. [92] Nous disons jusqu'à présent : car il y a des travaux importants à exécuter à l'église, et cette histoire est faite en grande partie au profit de cette oeuvre. [93] Il est actuellement curé de la Barre-de-Sémilly (Saint-Lo). [94] Ses parents demeurent à Saint-Lo depuis 1866. [95] Histoire de l'Eglise catholique en France, par M. l'abbé Iager, t. xvi, p. 360-367 |
| ||||||||||||||||
CONCLUSION | ||||||||||||||||
Voilà les principaux faits que nous avons cru pouvoir signaler. Qu'en pouvons-nous conclure ?
Les évènements qui ont eu lieu avant la Révolution ne sont pas les moins intéressants, vu l'ignorance ordinaire que l'on a des faits paroissiaux avant cette époque.
Nous avons été, à ce sujet, franc et impartial. Notre récit, avec les quelques remarques que nous avons déjà faites, tend à montrer que l'ancien régime était fondé sur le respect envers l'autorité, et qu'il ne pouvait subsister, sauf diverses modifications, que par le maintien du respect. Mais celui-ci ayant diminué peu à peu, surtout depuis la fin du dix-septième siècle, la Révolution de 1789 est venue, pour ainsi dire, donner une sanction solennelle à ce déchaînement du peuple contre l'autorité. Cette diminution du respect envers le pouvoir religieux et civil avait des causes profondes et éloignées. Avouons qu'une des causes principales était la licence, la corruption, le luxe, le séjour prolongé à la Cour de beaucoup de seigneurs influents : les châteaux et les abbayes, par exemple, avaient en grande partie été désertés par leurs représentants naturels et directs, et ainsi les populations, excitées d'ailleurs par les railleries et les conceptions révolutionnaires des philosophes incrédules, tels que Voltaire et Rousseau, s'étaient détachées peu à peu de leurs autorités séculaires. Il y avait donc, nous sommes loin de le nier, des abus à détruire pour ramener les masses au respect des autorités naturelles fondées sur la tradition. Mais, en 1789, la Révolution, au lieu de chercher à faire revivre ce respect si nécessaire pour le bon ordre dans la société, ne fit qu'accélérer le mouvement d'indiscipline et de révolte contre l'autorité religieuse et civile, et le peuple, renversant tout pouvoir, prit lui-même violemment, par l'intermédiaire de ses représentants, les rênes de l'autorité ! Ce peuple n'aurait-il pas dû se contenter d'exprimer à l'autorité ses doléances, sans se précipiter sur elle et la fouler aux pieds ? Il est d'ailleurs certain que la double autorité religieuse et civile désirait elle-même des réformes ; mais elle ne voulait pas qu'elles fussent aussi violentes et aussi contraires à tout ordre religieux et social.
Pour opérer ces réformes, il aurait fallu les circonscrire dans les saines limites de l'ordre chrétien. Or, la plupart des députés des Etats-Généraux étaient imbus d'une erreur très funeste à la France, celle du Gallicanisme. Par cette erreur, l'autorité, en France, empiétait sur le pouvoir suprême du Pape, au point de vue de la discipline ecclésiastique, tout en demeurant attachée à la foi catholique et à la morale chrétienne. Cette erreur explique la sécularisation des biens ecclésiastiques décrétée par l'Assemblée constituante, sans aucun consentement du Souverain Pontife, et la constitution civile du clergé établie par cette même Assemblée ; cette erreur amènera plus tard l'addition des articles organiques au Concordat. Malheureusement, la royauté et beaucoup de membres du clergé, mais surtout le Parlement de Paris, avaient soutenu et maintenaient cette erreur accréditée par les légistes ; ces autorités, ne respectant pas assez l'autorité du Saint-Siége, furent punies par où elles avaient péché : elles ne surent pas faire respecter leur propre pouvoir.
Ah ! si le respect dû au pouvoir du Siége apostolique avait dominé l'Assemblée des Etats-Généraux en 1789, le Pape aurait alors sauvegardé la religion en France ; nous pouvons même croire qu'il aurait pu, par son prestige, éviter la Révolution ; elle a été dirigée principalement contre l'Eglise de France et elle a, par contre-coup, atteint l'Eglise universelle.
Aux Etats-Généraux de 1614, ce fut le respect de l'autorité suprême du Saint-Siége qui empêcha en France la révolution et le schisme d'éclater : le Tiers-Etat, composé de membres gallicans, voulait que l'Eglise de France n'admît point les décrets du Concile de Trente et proclamait qu'il n'y avait puissance en terre, quelle qu'elle fût, spirituelle ou temporelle, qui eût droit sur le royaume.
Mais le cardinal du Perron, par son éloquence persuasive, fit respecter par le roi, le clergé et la noblesse, la suprême autorité du Saint-Siége, et la France resta catholique [95].
L'autorité du Pape, voilà véritablement le salut des nations, comme elle est celui des individus ; c'est à ce pouvoir suprême qu'il faut toujours revenir comme au centre de l'ordre chrétien.
La Déclaration de 1682 a préparé les voies à la Révolution de 1789, en diminuant le respect envers l'autorité.
Le Concile du Vatican, en 1869, a rétabli ce respect sur une base inébranlable et a défini que le Pape possède dans l'Eglise une autorité suprême et infaillible. Cet acte solennel de respect a été, il faut l'espérer, le prélude d'une contre-révolution en France et en Europe !
| ||||||||||||||||
Eglise et presbytére de Saint Denis le Vêtu CPA collection LPM 1900 |