ORIGINE DES ARMES 1/2
   
         
 

Les origines des armes anciennes

A. DE GORSSE

et Janine CACCIAGUERRA. 1952

 

Dès les âges les plus reculés de l'Histoire, on relève que l'armement a toujours été d'une importance immense.

 

L'homme primitif se trouvait sans moyens naturels de défense, et il fut dans l'obligation d'imaginer des armes autant pour chasser que pour repousser les attaques des tribus voisines. C'est de la sorte qu'au cours des âges l'arme, d'abord inventée pour détruire des animaux, devint le plus puissant moyen de civilisation pour lutter contre les barbares et les agresseurs. En effet, les groupes les plus policés étaient forcément des minorités, car le nombre a toujours exclu la qualité. Et, si les hommes ont toujours haï la guerre, ils n'en ont pas moins plié leur esprit à la pénible discipline des fabrications d'armement, ne serait-ce que pour abréger la guerre et la rendre moins funeste à l'humanité, quitte à certains moments à la rendre plus meurtrière.

 
 
         
 

Les archéologues sont loin d'être d'accord sur la primauté d'une civilisation par rapport aux autres. Longtemps on l'accorda à l'Égypte, mais on se rendit compte que ses sables secs conservèrent tout simplement mieux les objets enfouis que les sols argileux et humides de la Mésopotamie. Depuis, on a découvert une Amérique précolombienne, et les dernières récentes fouilles de l'Indus ont fait rebondir la question. Il y a aussi l'Extrême-Orient, qui a effectué sa propre évolution en vase clos, en tournant le dos à l'Occident.

 

Les fouilles indiquent que, dès les temps préhistoriques, l'homme sut composer de simples massues avec des branches d'arbre grossièrement taillées. Mais, assez rapidement, il sut travailler des os d'animaux pour en constituer des pointes de flèche.

 

Certaines de ces pièces sont même très finement aiguisées, et l'on trouve également des manches d'armes, comme les « fameux bâtons de commandement », dont l'usage est difficilement expliqué et qui sont sculptés avec une infinie délicatesse.

 
 
         
 

Ce fut ensuite l'âge de la pierre taillée, puis de la pierre polie. L'âge du bronze et celui du fer leur succédèrent, le premier d'abord parce que plus facile à travailler.

 

Très peu d'armes de cette époque sont parvenues jusqu'aux époques actuelles, mais on a une source documentaire dans les vieilles monnaies, car elles reproduisent souvent des guerriers. Il en est également de même avec les bas-reliefs. Comme les monnaies ne paraissent en Grèce que trois siècles après le début du premier millénaire avant Jésus-Christ, on manque toutefois de moyens précis d'évaluation antérieurs.

 

En Archasie, et plus spécialement aux frontières d'Akkad et de Shumer, qui devaient donner l'Assyrie et la Chaldée, on possède des documents formels remontant à l'an 700 avant Jésus-Christ.

 

L'infanterie régulière y possède déjà le casque à jugulaire, orné parfois d'un cimier à crinière, le corselet constitué de lames de métal cousues sur peaux, et aussi de véritables cottes de maille d'acier. Le bouclier rond y est habituel.

 
 
         
 

Des cnémides, ou jambières-tamelières, protègent le devant de la jambe jusqu'au-dessous de la rotule. Les armes offensives étaient la lance, l'épée, la fronde et l'arc.

 

Le soldat auxiliaire se distingue à ce que son casque ne comporte pas de jugulaire ou de cimier et se trouve même souvent remplacé par un simple bandeau, que l'on retrouvera chez le soldat mérovingien.

 

Le bouclier rond est à hauteur d'appui, et le bouclier long atteint les deux tiers de la taille humaine. Il est alors arrondi dans le haut et carré dans le bas ; sa section est enveloppante, presque semi-circulaire, pour protéger de tous côtés.

 

Le cavalier mésopotamien montait sans éperons ni selle, et sa coiffure était composée d'un casque à jugulaire mais sans cimier, d'une forme para-conique que l'on retrouvera chez les Gaulois.

 

Il portait souvent un corselet de mailles, complété d'un épais tablier de cuir, et possédait toujours une lance et une épée s'il ignorait le bouclier.

 
 
 

 

     
 

L'archer, parfois à cheval, avait souvent un corselet, mais rarement un casque, la tête étant alors protégée par un bandeau. Ses bas de jambes recevaient des cnémides. L'archer à pied portait une longue tunique. S'il avait l'arc, qui était sa spécialité, il n'avait pas de lance.

 

Les Assyriens connurent le char de guerre dès le XIIIe siècle avant Jésus-Christ, ce qui contredit Virgile l'attribuant aux Grecs d'Erichthonius. Ils utilisèrent également la catapulte et la baliste, qui ne subirent que peu de changement jusqu'à leur utilisation par les Romains après les Grecs.

 

L'évolution à partir de ces époques lointaines fut très lente. Sous les Sassanides (226-552), le casque perse en bronze aura la forme que l'on retrouvera en Germanie au Xe siècle.

 

Après la quatrième dynastie, dite des Califes, soit en 652, et jusqu'à la douzième, ou dynastie des Mongols, l'armement de la Perse adopte les caractères musulmans. L'armement chaldéen et médique se confond avec celui des Assyriens, mais le soldat voit se substituer au casque pointu une coiffure en forme de toque.

 
 
 

 

     
   
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On possède peu de renseignements sûr l'armement de l'Inde, car, si ses habitants de haute époque représentaient sur leurs monuments des faits historiques, peu se rapportent à des exploits militaires. Il en est de même dans l'énorme masse des sculpteurs égyptiens, les Nilotiques ayant toujours été fort pacifiques, et surtout portés vers l'agriculture et les sciences. Cette exclusion est cependant moins marquée que dans l'Inde.

 

C'est de la sorte que l'on retrouve une sorte de bonnet ou de casque qui annonce exactement ce que donnera le couvre-chef des bouffons médiévaux. Dix siècles avant Jésus-Christ existe aussi la cotte en écailles de bronze. Le bouclier est extrêmement curieux, car, s'il présente couramment un bas carré et un haut arrondi, il comporte aussi une fenêtre pour voir à travers sans s'exposer aux blessures ; sa hauteur est fort importante, car elle égale presque la taille du soldat. L'épée ne semble pas connue, et on ne trouve que de gros coutelas à un seul tranchant, qui sont les ancêtres directs des « scramasaxe » mérovingiens. L'arc, le carquois et les flèches sont fréquents, mais pas la lance à lame de métal.

 

Beaucoup plus riches en documents militaires, tant dans les formes que dans l'exécution des détails, ce qu'ont laissé l'Étrurie, la Grèce et Rome. Des trois, les documents existent dans maints musées.

 

En Grèce, mille ans avant Jésus-Christ, c'est-à-dire environ à l'époque d'Homère, les armes étaient presque toutes en bronze. Le fer pourtant était connu, mais restait trop difficile à travailler en raison de sa dureté.

 

L'armure défensive comportait la cuirasse, le plastron et la dossière, coulés ou martelés d'une seule pièce, avec également le corselet d'écailles à imbrication. Elle était complétée par les cnémides, ou jambières, le casque et le grand bouclier rond et bombé.

 

L'armement offensif comportait l'épée d'estoc et de taille à lame droite, courte et large, à deux tranchants ; elle devait plus tard s'accroître en longueur ; elle se portait au côté droit, alors que le parazonium, dague courte et large, se suspendait au côté gauche.

 

Utilisée aussi en arme d'hast ou de hampe ou de jet, on trouve enfin la lance longue de 11 à 15 pieds, et le javelot ou longue flèche.

 

Les Grecs ignorèrent la cavalerie, mais, quatre cents ans avant Jésus-Christ, ils complétèrent leurs corps d'armée par des cavaliers auxiliaires et des frondeurs.

 

Les Étrusques subirent d'abord l'influence phénicienne, puis l'influence hellénique, qui fut beaucoup plus importante ; enfin un dernier stade fut uniquement romain.

 

Ce qui est notoire, c'est que de ces hautes époques on connaît maints détails d'armement des XIIIe et XVe siècles, tandis que l'on est moins bien documenté sur le milieu du premier millénaire antéchrétien. Tout ce dont on est certain, c'est que, vers 550 avant Jésus-Christ, les armes en totalité de bronze antérieurement n'étaient plus en ce métal que pour les pièces défensives ; les armes offensives de toutes sortes, de trait, d'hast, de taille, d'estoc ou de jet étaient en fer, et parfois en acier.

 

Trois sortes de militaires constituaient l'armée romaine : les vélites, ou fantassins, légèrement armés ; les hastaires, ou légionnaires, formant l'infanterie lourde de base, et enfin les cavaliers.

 

Les vélites étaient armés d'un javelot long de deux coudées, d'une épée et d'un petit bouclier rond et léger de trois pieds de large. Il devint le parma en s'affirmant en rond. Le casque avec jugulaire n'avait point de crinière, mais était souvent recouvert de peau de loup.

 

Le hastaire était protégé par un casque orné de trois plumes rouges ou noires, des jambières, un plastron en bronze et un grand bouclier de 4 pieds sur 2 1/2.

 
 
       
   
 
       
   
 
         
 

L'arme offensive comportait l'épée ibérique et deux javelots, dont le pilum.

 

Le cavalier romain adopta l'armement grec, et d'abord le bouclier hexagonal, ensuite la cuirasse en écailles de métal cousues sur peau, et même parfois de cotte de mailles.

 

Romains et Grecs connurent les machines de guerre, comme le char faucheur et les béliers, mais aussi la baliste, destinée à la projection de flèches géantes. Il y avait également deux sortes de catapultes, avec des trajectoires soit rasantes, soit plongeantes, et le tollénon destiné à transporter à la manière d'une balançoire des assaillants sur les murs de l'adversaire.