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Auteur : Jean-Paul Coudeyrette
Il existait, à travers le monde, une variété infinie de fêtes de la moisson ou de fêtes du blé.
Bien que le temps de la moisson fût pour le laboureur celui des grandes fatigues et des grandes inquiétudes, c'était aussi une époque de fêtes tant pour les maîtres que pour les ouvriers.
La première gerbe et surtout la dernière étaient fêtées par le son des cloches, un repas ou des danses rustiques.
Avec des épis de blé, on faisait des bouquets de moisson qui étaient suspendus dans les maisons afin d’y apporter la prospérité.
Les fêtes de la moisson, les fêtes d'action de grâces et les Rogations étaient l’héritage des temps où l'agriculture constituait le principal moyen de subsistance.
Aujourd'hui, en France, les vieilles coutumes ont quasiment disparues, et il n'existe plus, çà et là, que des fêtes des moissons qui ne sont, le plus souvent, que des expositions de matériels agricoles, et quelques fêtes des battages.
La gerbe de blé symbolise la fécondité de la terre et la fertilité de l'âme ouverte à la lumière.
L'épi de blé, symbole de la croissance et de la fructification, est universellement considéré comme la manifestation de la fécondité physique et spirituelle. L'abondance que représente l'épi est à l'image de ce que promettent les enseignements spirituels de toutes les religions : selon les Évangiles notamment, un grain qui meurt peut rapporter au centuple.
Emblème d'Osiris, de Déméter, de Cérès et de la Constellation de la Vierge, l'épi annonce que la mort terrestre s'inscrit dans la continuité des cycles de vie .
Une cérémonie des mystères d'Eleusis met en un parfait relief le symbolisme essentiel du blé.
Au cours de la commémoration de l'union de Déméter avec Zeus, un grain de blé est présenté, comme une hostie dans l'ostensoir, et contemplé en silence. C'est la scène de l'époptie, ou de la contemplation. A travers ce grain de blé, symbole de vie et de résurrection, les époptes honorent Déméter, la déesse de la fécondité et l'initiatrice aux mystères de la vie.
Indépendamment des mystères, les Grecs ont dès le commencement des fêtes appelées Démétries, comme ils ont un mois appelé Démétrios ; ce mois, le dixième de l'année grecque, est celui des moissons et correspond à peu près à notre mois de juillet.
Les fêtes romaines qui correspondent aux Démétries de la Grèce sont les Cerealia (fêtes de Cérès) dont les plus importantes sont célébrées avant la moisson, vers la mi-juillet, par les villageois vêtus de blanc, couronnés de feuilles de chêne, accompagnant leurs chants de danses mimiques. Les anciens regardent Cérès comme la déesse propice aux moissons ; ils la représentent par une belle blonde aux yeux bleus, couronnée d'épis et de pavots, tenant une faucille et ayant pour attributs un boisseau (modius) et un van.
Céréale sacrée, dont le grain meurt pour renaître, le blé a connu de multiples usages.
Chez les Grecs et les Romains, les prêtres répandent du blé ou de la farine sur la tête des victimes avant de les immoler.
Porte-bonheur, le blé est jeté, à Rome, sur la tête des mariés afin qu'ils aient une nombreuse descendance.
L'épi est un emblème d'Osiris, symbole de sa mort et de sa résurrection. Pour les anciens Égyptiens, le blé croît sur le corps d'Osiris.
Dès l'Ancien Empire, lors de la fête de la procession de Min, dieu de la végétation et la fertilité (divinité identifiée à Horus, fils d'Osiris), le roi coupe, avec une faucille de cuivre incrustée d'or, une touffe du blé qu'un prêtre lui a apportée.
Cette petite gerbe est déposée devant la divinité, tandis qu'un épi est remis au roi. La gerbe peut être également présentée à d'autres divinités, comme Harsomtous, dieu enfant du couple Horus-Hathor.
Le blé, comme beaucoup de plantes cultivées, et en particulier l'orge, le haricot et le maïs, apparaissent, dans les différentes civilisations, comme un présent des dieux, lié au don de la vie.
Déméter donne l'orge et envoie Triptolème répandre le blé dans le monde. Chez les Aztèques, Xochiquetzal, la déesse de la Fertilité et des Fleurs, à laquelle est associé le cacao, apporte le maïs.
L'Ancêtre Forgeron des Dogon dérobe au ciel toutes les plantes cultivées, pour les offrir aux hommes.
Quand les fermiers égyptiens moissonnent leur maïs, ils pleurent car ils craignent que la récolte ne fâche l'esprit vivant dans la plante.
Le dieu-solaire celte Lug ou Lugh (le Brillant), le grand Roi solaire, garant de l'abondance, de la fertilité des troupeaux et de la prospérité, qui assure l’éternité des cycles de mort et de renaissance, préside aux moissons et sa fête, Lughnasad ou Lugnasad (Assemblée de Lug), se situe le 1er août.
Au Moyen Age, en Grande Bretagne, cette fête, christianisée, devient le Lammas Day ; Lammas vient de laof-mass (la messe du pain). En effet, ce jour-là, des miches de pain, fabriquées avec la récolte des premiers grains, sont déposées comme offrandes sur les autels des églises.
La Pentecôte juive, est à l'origine, la fête de la Moisson, Hag Hakatsir, ou des Prémices, Hag Habikourim, jour de joie et d'action de grâces (Exode 23,16 ; Nombres 28,26 ; Lévitique 23,16) ; on y offre les prémices de ce que la terre a produit [Ex 34,22, où la fête est nommée fête des Semaines, Chavouoth, ou des Septaines, appellation qui la situe 7 semaines (7 fois 7 jours) après la Pâque et l'offrande de la première gerbe (Lv 23,15)].
Puis, sans doute dès le IIe siècle avant J.-C. (car, comme telle, elle apparaît généralisée au début de notre ère, d'après les écrits rabbiniques et les manuscrits de Qumran), la fête devient celle de "l'anniversaire de l'Alliance" conclue une cinquantaine de jours (Ex 19,1-16) après la sortie d'Égypte célébrée par la Pâque. |
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