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LA NORMANDIE ANCESTRALE Ethnologie, vie, coutumes, meubles, ustensiles, costumes, patois Stéphen Chauvet. Paris.1920 Membre de la Commission des Monuments historiquesEdition Boivin
Le patois, la langue merveilleuse de mon pays... Je suis plus patoisant que littéraire et encore plus normand que français.
Barbet d'Aurevilly
L'idiome normand n'est pas absolument un patois; c'est de la langue d'oïl, mélangée de français corrompu et quelques très rares mots, plus ou moins déformés, d'origine northmanne. Aux environs de Coutances; comme dans toute la Basse- Normandie, on traîne un peu lentement sur les phrases; on allonge les périodes et on cadence les mots. Les Normands prononcent : queminée, quien (chien), assembiaie (assemblée), viâs (veaux), bestiâs (bestiaux).
Le patois normand du bas Cotentin fourmille de mots imagés et pleins de pittoresque, qui lui confèrent une grâce naïve et une saveur toute particulière. En voici quelques échantillons : Haricoter (lésiner, marchander), /fé (fléau), amouillante (vache prête à vêler), gauler despoûmes (abattre des pommes), happer (attraper), se mûchir (se cacher), dévaler (descendre), préchi (parler), espérer (attendre), knaille (enfant), horzain (l'étranger à la Normandie), la falle (la poitrine), rapsodages (racontars, histoires), cachi (conduire, mener devant soi; exemple : cachi ein g' va (chasser, devant soi, un cheval). La cache (chasse, avenue), être emmâsuré (vivre en concubinage avec une femme), déculotter une personne (payer ses dettes), être enculotté (avoir des dettes), être déculotté (être séparé de biens). La Normandie, la chose est notoire, est la province qui a fourni à la France la plupart des écrivains célèbres dont elle s'enorgueillit.
Il n'entre pas clans le cadre de ce travail d'étudier l'œuvre de ces hommes illustres, anciens et modernes, qui ont fait œuvre de littérateurs français, non plus que de citer les prosateurs et les poètes normands qui ont décrit ou chanté, en langue française, la Normandie, les Normands et les usages normands, et qui ont fait œuvre de littérateurs normands. Je n'ébaucherai pas, non plus, une étude des prosateurs et poètes patoisants, anciens et contemporains et de leurs œuvres, parce que cette étude m'entraînerait soit à traiter de régions de la Normandie qui ne font pas l'objet de ce travail, soit à citer des œuvres en patois ancien, trop différent du patois actuel.
Comme je n'ai que le dessein de donner une idée de ce qu'est Factuel patois normand, spécialement dans le bas Cotentin, je me contenterai d'extraire des œuvres de certains littérateurs patoisants un conte et deux poèmes qui permettront d'apprécier la saveur du patois normand des environs de Coutances et aussi le rare talent des littérateurs patoisants qui en sont les auteurs. Après un conte de F. Enault, plein de bonhomie gaie et de malice normande, le lecteur pourra apprécier la naïve et charmante Déclaration du délicieux poète patoisant Ch. Leboulanger, et enfin la dramatique et puissante Vendue du grand poète Louis Beuve. |
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