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Abbaye Notre-Dame-du-Vœu (Cherbourg) |
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NOUVEAU GUIDE DU VOYAGEUR A CHERBOURG. Parties 1 Cherbourg et ses environs Par Jean Fleury et Hippolyte Vallée 1839 Imprimerie Noblet Cherbourg
CHAPELLE DE NOTRE-DAME-DU-VOEU
La reine d'Angleterre, Mathilde, avait mécontenté les barons, qui, d'ailleurs las de la domination normande, l'avaient remplacée par un de leurs compatriotes, Etienne, comte de Boulogne. Vaincu dans un combat meurtrier, l'anglosaxon avait été contraint de céder, mais l'altière Mathilde, en remontant sur le trône, refusa de ratifier la charte accordée aux barons par son père. Chassée d'Angleterre, elle fut obligée de chercher du secours dans la Normandie, qui n'avait pas pris part à la révolte.
La reine fugitive se dirigeait vers le port de Cherbourg, que le comte d'Anjou avait repris à Etienne l'année précédente.
Tout-à-coup le ciel s'obscurcit, la mer grossit ses ondes, le vent siffle dans les cordages ; une tempête affreuse se déclare, des vagues menacent à chaque instant d'engloutir la frêle embarcation ; l'effroi est dans tous les coeurs : c'est à peine si l'on a la force d'adresser au ciel quelques insignifiantes prières. — « Si je revois la terre, s'écria Mathilde, je chanterai une hymne à la mère du Sauveur, je lui élèverai une chapelle, et je fondrai une abbaye à l'endroit où je débarquerai. » Elle n'avait pas fini cette prière, que la tempête s'apaisa tout-à-coup ; les vagues cessèrent de déferler sur les flancs du navire, et le calme succéda aux fureurs de l'orage. Bientôt la côte bizarrement accidentée de Cherbourg apparut aux regards étonnés. « Chante, reine, s'écria un marin dans son enthousiasme, chante, reine, voici la terre. » Mathilde chanta en effet, et depuis lors, l'anse où elle débarqua porte le nom de Chantereyne.
Elle ne tarda pas à tenir sa promesse, et en 1145, elle fit jeter les fondements d'une chapelle qui porta le nom de son Voeu.
Cette chapelle n'est pas celle qui existe aujourd'hui ; détruite probablement à la suite d'une invasion, ou abattue dans la crainte que la mer, qui s'avançait d'une manière effrayante, n'envahît la modeste construction, elle a été rebâtie depuis à l'endroit où elle se trouve aujourd'hui.
Il n'y a pas encore un siècle qu'on voyait les ruines de la première, dans un champ qui portait le nom de Clos de la Chapelle ; maintenant il est compris dans l'enceinte du Port-Militaire.
La chapelle du Voeu a appartenu à l'abbaye jusqu'à l'époque de la révolution. Dévastée alors, comme tous les établissements religieux, elle fut donnée, par un décret du 20 mars 1791, au ministère de la marine, qui la céda quelque temps après à l'artillerie de terre. On en fit une salle d'artifice. En 1817, Louis XVIII rendit une ordonnance qui la rétablit, et les habitants la restaurèrent complètement à leurs propres frais. L'administration de la marine donna pour sa part les débris du vaisseau l'Eylau, que l'on employa à la construction de la tribune.
Elle fut rouverte et rendue aux exercices de la religion le 15 décembre 1818.
Cette chapelle a 45 pieds de longueur sur 16 de largeur. Elle peut contenir environ 60 personnes. On y remarque deux petites statues en albâtre, venant de l'ancienne abbaye, l'une de sainte Mathilde, l'autre de saint Augustin, et quelques tableaux tels que :
Au-dessus de l'autel : Un Naufrage, Une Vierge et l'Enfant-Jésus
A gauche de l'autel : Le voeu de l'Impératrice Mathilde, par M. Henry fils
Dans la nef : Un Christ. Le Martyr de S.t-Symphorien.
Sur la droite de l'autel, dans un grand cadre, est l'inscription suivante :
« Ad perpetuam rei memoriam. La chapelle Notre-Dame-du-Voeu, dévastée pendant la révolution, rendue à la religion par ordonnance du roi le 3 décembre 1817, restaurée par les habitants, a été rouverte à la piété le 15 décembre 1818. L'impératrice Mathilde, devenue reine d'Angleterre, l'érigea antérieurement à l'abbaye de Cherbourg, l'an de J.-C. 1145, selon le voeu qu'elle fit dans une tempête qui la jeta sur la côte près d'ici, nommée Chantereyne depuis cet événement. Ora pro nobis sancta Dei genitrix. »
On voit encore au-dessous de ce cadre l'épitaphe de Léobin Le Fillastre, et du côté opposé, la pierre sépulcrale du même abbé.
« La chapelle de Notre-Dame-du-Voeu est placée sous l'administration de la fabrique et sous la surveillance du curé de Cherbourg. »
On y dit une messe tous les premiers dimanches du mois, et quelques autres pour les fondateurs, à différentes époques. |
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Plan de l'ancienne abbaye de Cherbourg et de ses dépendances, 1787. |
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