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Stéphanie JAVEL Julien DESHAYES, 2004 closducotentin.over-blog.fr
Le 2 octobre 1739 Laurent Antoine Sivard, sieur des Noires Terres, achète pour la somme de 20 000 livres à Bernardin Morin, une propriété située à Valognes, nommée "la terre des Noiremares ou du Haut-Pirou".
Cette propriété comprenait une maison avec "cuisine, salle, cellier, écurie, pressoir", et chambres et greniers au dessus. L'acte de vente précise également que le "grand corps de logis", couvert d'ardoise, était précédé d'une cour avec porte cochère et environné d'un jardin, d'un verger et d'autres pièces de terre.
Cette propriété figure sur le plan Lerouge de 1767. Elle occupait assez précisément l'emplacement de l'actuel hôtel Sivard de Beaulieu. Vers 1765, Charles-Antoine Sivard, fils de Laurent-Antoine Sivard, augmente son héritage par l'achat d'une nouvelle propriété, nommée le manoir de Beaulieu, qui dépendait depuis 1479 au couvent des cordeliers de Valognes. Selon l'abbé Jean Canu, il aurait fait bâtir l'hôtel actuel vers 1782. | L'hôtel Sivard de Beaulieu sur le plan Lerouge de 1767
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Charles Antoine Sivard de Beaulieu, issu d’une famille de bourgeois établie à Valognes depuis le XVIIe siècle, fut localement l’une des figures majeures de la période révolutionnaire. Né en 1742, il fut avocat et assesseur au bailliage de Valognes, puis président du tribunal. En 1774, il acheta la charge anoblissante de secrétaire du roi et devint également lieutenant général du bailliage du Cotentin, puis maire de la ville en 1790. Suspecté d’intelligence avec les ennemis de la République, il fit partie de la fournée des 19 personnes du district conduites à Paris le 15 juillet 1794 pour y être jugées par le tribunal Révolutionnaire. On se souvient que, ayant cassé une roue en chemin, le convoi n’arriva à destination qu’au lendemain de la chute de Robespierre, sauvant in extremis la vie aux représentants la ville estimée la plus farouchement monarchiste de toute la Normandie. Non trop rancunier Sivard de Beaulieu accèdera par la suite au rang de baron d’Empire et fut élu député de la Manche en 1818. De 1830 à 1871, l'hôtel abrite des Carmélites anglaises, qui, pour les besoins de leur communauté, font construire une chapelle en 1837. Le 5 août 1871 l'hôtel est revendu pour 80 000 francs aux religieuses du Refuge de Caen, qui abritaient des jeunes filles et des enfants. Le nombre grandissant des "réfugiés" les conduit à construire des dortoirs, une lingerie et une infirmerie, mis en service en septembre 1872. Les classes, les réfectoires et les dortoirs, ainsi que la chapelle, ont été totalement ruinés lors des bombardements alliés de juin 1944. L'hôtel lui-même a été incendié, perdant ainsi une aile. La chapelle actuelle, de style Reconstruction, a été reconstruite en 1959 par MM. Isnard et Epaud, architectes.
L'actuelle façade sur rue était initialement la façade sur jardin, le tracé de la route de Bricquebec ayant été modifié depuis. Son élévation s'articule autour d'un avant-corps central traité en pierres de taille, et délimité par des chaînes en bossage. L'ensemble est surmonté d'un important fronton triangulaire orné d'une pierre armoriale laissée en attente. Un perron en fer à cheval permet l'accès à la porte d'entrée. Cette dernière est coiffée d'un linteau en plein-cintre orné d'une clef saillante. Toutes les fenêtres sont couvertes d'un simple linteau droit. Un bandeau horizontal souligne le premier étage. Des oeils-de-boeuf éclairent les combles. Plusieurs cartes postales anciennes montre l'ancien portail détruit en 1944, qui ouvrait jadis sur la rue Saint-François.
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