BRICQUEBEC
  CC 40.02 COEUR DU COTENTIN
   
  LE CHATEAU


     
 

Gravure du château de Bricquebec


Comme le révèle l'étymologie de son nom, les origines de Bricquebec (du scandinave bekkr, cours d'eau, précédé de brekka, la pente) se rattachent à l'épopée des envahisseurs vikings, très solidement implantés en Cotentin au début du X° siècle.

 

 
 

La tradition attribue la fondation du château au scandinave Anslech, proche du Duc de Normandie Guillaume Longue-Epée.

 

La constitution de cette grande baronnie s'inscrivait alors dans une politique ducale, visant à asseoir le contrôle de territoi-res acquis de fraîche date, par l'entremise de grands féodaux.

 

Le Cotentin, région semi-insulaire rattachée plus tardivement au duché que le reste de la Normandie (en 933) demeurera en effet longtemps jaloux de son indépendance.

 

Plan du château de Bricquebec

 

D'Anslech serait issue la longue lignée des Bertran, succession de loyaux chevaliers dont le nom est inscrit à chaque chapitre majeur de l'histoire du duché.

 

Robert Ier Bertran, dit "le tort" ("le boiteux"), figure au rang des barons qui, en 1066, accompagnent Guillaume le Conquérant à la conquête de l'Angleterre.

 

Son fils, Robert II, est réputé avoir participé en 1096 à la prise de Jérusalem lors de la première Croisade.

 

Peu après l'annexion de la Normandie par Philippe Auguste, en 1204, les Bertran rendaient hommage au roi pour une quinzaine de fiefs nobles relevant de leur baronnie de Bricquebec.

 

Robert VII Bertran, élevé à la dignité du maréchal de France, joua un rôle important durant la période troublée des débuts de la guerre de Cent ans. Ayant obtenu pour son fils la main d'une riche hértitière, il suscita la colère d'un second prétendant à ce mariage, Geoffroy d'Harcourt, sire de Saint-Sauveur-le-Vicomte, qui par vengeance s'engagea dans une guerre privée contre son rival.

 

Condamné pour ces agissements, Geoffroy d'Harcourt se réfugia bientôt à la cour d'Angleterre et y incita le roi Edouard III à prendre pied en Cotentin. Robert Bertran, que l'on surnomma "le Chevalier au Vert Lion", tenta en vain de résister à l'armée anglaise débarquée à Saint-Vaast-la-Hougue le 12 juillet 1346.

 
 

 

 
 

Peu après le décès du vieux maréchal, dont les deux fils moururent au champ de bataille, s'éteignait une dynastie vieille de quatre cents ans.

 

Par mariage, le château et la baronnie de Bricquebec passent alors à la famille Paisnel, qui possédait aussi le château de Hambye. Livré aux exactions de la soldatesque, soumis aux ravages de la peste et des famines, la presqu'île du Cotentin offre, dans la seconde moitié du XIV° siècle, le cadre à de multiples échauffourées opposant les troupes françaises, anglaises et navarraises.

 

Vestiges du château

 
       
 

Un temps soumis au roi de Navarre, Bricquebec revient rapidement dans le giron français et fournira au roi Charles V un précieux atout dans sa stratégie de reconquête.

 

Après une brève et fragile période de paix, la guerre reprend en 1418. Bricquebec est rapidement occupé par les troupes du roi Henry V d'Angleterre. Offert à William de la Pole, comte de Suffolk, puis revendu par ce dernier au capitaine Bertin Entwistle, le château reste sous domination anglaise jusqu'en 1450.

 

Lorsqu'en 1452 Louis d'Estouteville, le vaillant défenseur du Mont-Saint-Michel, revient prendre possession du château, s'annonce déjà la fin du Moyen âge.


Au début du siècle suivant, les barons de Bricquebec abandonneront en effet l'ancienne forteresse des Bertran pour s'établir dans leur nouvelle résidence, le Château de Galeries, édifié suivant les préceptes de la Renaissance italienne.


Donjon polygonal à onze côtés

 

 
         
   
  BRICQUEBEC
  CC 40.02 COEUR DU COTENTIN
   
  LE CHATEAU DES GALLERIES


     
 

Le château des Galleries, CPA collection LPM 1900

 
 
 
 

Le bloc du Cotentin

Par Julien Deshayes 2010

Dans une étude restée inédite, Alain Prévet a bien souligné le rôle déterminant des commanditaires dans la conception de ce château peu ordinaire. Jacqueline d’Estouteville, héritière de la baronnie de Bricquebec, avait épousé en 1509 son cousin germain Jean III, qui rassemblait ainsi entre ses mains les immenses possessions des deux branches de l’illustre famille normande. Jean d’Estouteville fut élevé à la cour de Moulin, le « premier chantier véritablement influencé par la Renaissance italienne », au temps des expéditions ultramontaines de Charles VIII. Employé aux affaires du roi, il effectua ensuite lui même plusieurs voyages en Italie. Revenu sur ses terres normandes, il continua cependant à fréquenter la cour, alors établie à Blois, où Pacello da Mercogliano s’afférait à la création des nouveaux jardins. A la mort de Jean III, en 1517, Jacqueline réside ponctuellement à Bricquebec, où sa présence est attestée en 1524, et où elle reçoit, en avril 1532, la visite du roi François 1er en voyage en Normandie.  Son épitaphe précise qu’elle décéda le 10 août 1550 « en la Galerie du jardin de son châsteau de Bricquebec ». Ce document constitue la plus ancienne source écrite relative à l’édifice.

 
 

 

 
 

Façade orientale, CPA collection LPM 1900

 
 

 

 
 

Adrienne d’Estouteville, fille unique et seule héritière de Jean III et de Jacqueline épouse en 1534 François de Bourbon, duc de Saint-Paul. Dame de compagnie de Catherine de Médicis, elle est aux premières places lors des cérémonies du Sacre et figure immédiatement après la reine lors de son entrée parisienne du 18 juin 1549. Durant les années suivantes, entre 1552 et 1560, les séjours effectués par Adrienne Estouteville à Bricquebec sont partiellement documentés par le « Journal des Mises et receptes » de Gilles Picot, sire de Gouberville. Au grès des visites de courtoisie qu’il effectue chez « Madame », en sa « galerye », Gilles de Gouberville mentionne ponctuellement la chambre de Madame, la salle, la « table du Conseil » et la « sale de Beauvays ».

 
         
 

A la mort d’Adrienne, en décembre 1560, l’héritage familial revient à Marie d’Estouteville, qui fera passer Bricquebec à son troisième époux, Léonor d’Orléans, duc de Longueville, puis, par sa fille Léonore, à la famille de Matignon.

 

Situé au centre du parc seigneurial avoisinant l’ancienne forteresse des sires de Bricque-bec, le château des Galleries fut d’emblée conçu dans la plus étroite relation avec son environnement paysager. Le corps de logis en rez-de-chaus-sée surélevé, étendu tout en longueur sur dix-huit travées, révèle à l’analyse une évolu-tion complexe, résul-tant d’au moins quatre phases de construction successives.

 

La partie sud de la façade orientale, nettement différenciée du reste de l’élévation, se compose d’une galerie d’arcades de huit travées, reposant sur de grêles colonnes engagées à chapiteaux composites.

 

 

Plan du bourg de Bricquebec en 1786,

détail du château des Galleries

 
         
 

 L’alternance des socles formant saillie sur la partie basse du mur indique peut-être une subdivision des arcades en deux baies jumelles, aujourd’hui effacée par l’insertion de fenêtres à meneaux. Selon une interprétation désormais admise, cette petite structure, parfaitement raffinée, constituait initialement un édicule de jardin, galerie ouverte servant de pavillon de plaisance lors de promenades ou de fêtes en plein air. Le style des chapiteaux à fûts circulaires, sur lesquels l’acanthe se mêle de grappes de fruits, de cornes d’abondance et de figures d’atlantes, s’inscrit assez nettement dans la filiation des œuvres produites par la première Renaissance caennaise, dans les années 1530, et notamment de l’hôtel d’Escoville. Par sa fonction, l’édifice participe également d’un engouement pour les petites constructions de plaisance italianisantes, destinées à l’agrément et à l’ornement des jardins, qui apparaît fortement marqué autour de la capitale régionale. Ces relations semblent confirmées par le matériau employé sur cette portion de bâtiment, un  calcaire tendre et ocré provenant de la région de Caen.


Lors d’une seconde phase de construction, le corps de portique initial fut fermé par des fenêtres à meneaux et  augmenté au nord de huit nouvelles travées délimitées par des pilastres à chapiteaux. Le style de ce décor sculpté, constitué d’un répertoire varié de corbeilles à protomes, grappes de fruits, putti et autres ornements, s’inscrit encore dans le contexte d’une Renaissance précoce, sans doute inspirée de modèles caennais. Une comparaison peut notamment être suggérée avec les sculptures de la chapelle du château de Fontaine-Henry, édifiée vers 1540 par l’atelier de Blaise le Prestre. En revanche, le détail des baies à meneaux chanfreinés à amortissements prismatiques qui agrémentent cette portion de la façade, et qui furent dans le même temps insérées sous les arcades de la galerie primitive, relève d’un vocabulaire plus ordinaire, commun avec de nombreux manoirs ou petits châteaux du Clos du Cotentin. Compte tenu des sources relatives au décès de Jacqueline d’Estouteville, le 10 août 1550 « en la Galerie du jardin de son châsteau de Bricquebec » et aux visites successives de Gilles de Gouberville à partir de 1552, on peut admettre sans trop de risque que l’extension fut antérieure à 1550. Ces aménagements visaient clairement à une affectation résidentielle de l’édifice. Ils correspondent vraisemblablement à la volonté de Jacqueline d’Estouteville de se constituer un nouveau séjour, à l’écart de la forteresse médiévale de ses prédécesseurs


La formule du corps de logis constitué d’un unique niveau de plain pied sera reproduit localement aux châteaux d’Amfreville, d'Etienville, de Sainte-Colombe ou bien encore au château de Tournebut, à Saint-Germain-de-Tournebut. Aux Galleries toutefois, ce rez-de-chaussée est en réalité surélevé sur un niveau de soubassement, dont l’existence est uniquement perceptible en façade ouest. Selon un processus relativement courant d’inversion de l’orientation de l’édifice, cette élévation postérieure fut en effet réaménagée au cours d’une troisième phase de construction, pour devenir la façade principale, face à la partie boisée de l’ancien parc seigneurial.

 
     
 

La façade ouest, CPA collection LPM 1900

 
     
 

L’analyse de cette phase III reste tout à fait sommaire. Les solutions décoratives qui sont employées sur l’élévation occidentale des Galleries initient le style sobre de « l’école cotentinaise », identifiable notamment par l’emploi de petits jours doubles et le recours constant au motif du fronton triangulaire couronnant les baies de la façade. Aux Galleries toutefois, la modénature arrondie des meneaux des grandes fenêtres diffère de la section strictement rectangulaire, employée systématiquement dans les édifices de la seconde Renaissance cotentinaise, et au nombre desquelles il convient principalement de citer les châteaux de Sotteville, Crosville-sur-Douves, Chiffrevast et la Cour de Saint-Martin-le-Hebert. Ce détail, aussi infime soit-il, traduit selon toute vraisemblance l’antériorité des Galleries et son caractère innovant et précurseur par rapport à ces diverses constructions. L’escalier en fer à cheval menant à un porche surélevé couvert d’un toit à l’impériale constitue le morceau de bravoure de cette élévation dont la nouveauté tient aussi au report des fonctions serviles dans l’étage de soubassement et, par opposition, à la définition d’un étage noble formé d’un déploiement d’espaces en enfilade. En raison de ces critères d’approche, et du silence de Gilles de Gouberville concernant d’éventuels travaux menés avant 1560, il convient sans doute d’attribuer ce programme à Marie de Bourbon, fille de Jacqueline d’Estouteville et de situer cette phase de la construction dans le dernier quart du XVIe siècle.

 
     
 

Escalier de la façade ouest, CPA collection LPM 1900

 
         
   
  BRICQUEBEC
  CC 40.02 COEUR DU COTENTIN
   
  CHATEAU SAINT-BLAISE


     
 

Ce petit château et son pavillon qui se cache au fond d'un parc bordé d'arbres exotiques a été construit vers 1780. Autrefois appelé château des Vallées, il fut longtemps la propriété de la famille Traynel de Saint-Blaise d'ou il tire son nom aujourd'hui. Le pavillon orné d'une horloge date de la seconde moitié du XIXème


Adjonction d'un pavillon et construction d'un haras en dépendance dans la seconde moitié du 19e siècle.

 

 

Château de Saint-Blaise à Bricquebec

 
         
 

Cheminée du 17e siècle provenant du château de Sotteville (Manche) en remploi dans une salle du rez-de-chaussée. Jardin d'hiver édifié dans la seconde moitié du 19e siècle.L'édifice de plan régulier en H, se compose d'un rez-de-chaussée, un étage carré et un étage de comble. Gros-oeuvre en moyen appareil et calcaire, élévations ordonnancées surmontées de toit à longs pans; pignon couvert et croupe recouverts d'ardoise.

 
 
 
 

Château de Saint-Blaise à Bricquebec, CPA collection LPM 1900

 
 

 

 
 

Château de Saint-Blaise à Bricquebec, CPA collection LPM 1900