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Photo de Momo50 2012 |
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Annuaire du département de la Manche, année 1867, Article de Mr Renault
Faits historiques.
— Hauteville-la-Guichard revendique l'honneur d'avoir été le berceau de la famille la plus historique du Cotentin. Dans le XIeme siècle, vivait à Hauteville un vieux guerrier normand qui avait servi sous Richard, duc de Normandie, comme capitaine de dix chevaliers, et qui, cependant, était sans fortune. Aussi, un auteur a-t-il dit qu'il était d'une humble condition, humilis conditionis, et qu'il appartenait à Tune de ces familles militaires que les Normands appelaient Vavasseurs. Ce qui a pu donner à penser que la famille Tancrède n'était pas opulente, c'est que plusieurs de ses membres allèrent chercher fortune dans les combats : Per dt-versa loca lucrum militariter quœrentes. Robert Guiscard, à son lit de mort, dit lui même :
« Issus de parents pauvres et obscurs, nous avons abandonné les stériles campagnes du Cotentin et nos pénates, dépourvus des objets les plus nécessaires. Partis pour Rome, ce n'a pas été sans de grandes frayeurs et de grandes difficultés que nous avons pu dépasser cette ville »
Quoi qu'il en soit, les Tancrède, ces héros, nés plus encore pour commander que pour combattre, et dont les exploits semblent appartenir au roman plus qu'à l'histoire, partirent pour l'Italie, s'emparèrent de Salerne, de Naples, fondèrent le royaume de Sicile, et parvinrent à régner sur une partie de la Grèce, et jusques sur les côtes d'Afrique, aux lieux où aujourd'hui, après plus de huit siècles, flotte le drapeau français, grâce à maints combats dans les quels nos armées, si dignement et si vaillamment commandées, se sont couvertes de gloire.
L'emplacement qu'occupait le vieux manoir qu'a dû posséder la famille Tancrède est au nord et à peu de distance de l'église. Je n'y ai remarqué aucunes traces de retranchements ou de fossés. Cependant, d'après la tradition, il était entouré d'eau. On devait y arriver par deux ponts-levis, l'un à l'est et l'autre à l'ouest, tous les deux flanqués de deux tourelles. Ce qui paraît confirmer cette opinion, c'est qu'on a trouvé les fondements d'une tourelle là où devait être l'un des ponts-levis servant d'entrée au château. Dans un autre endroit, on a découvert aussi les restes d'une grosse maçonnerie.
La maison d'école est construite sur une pièce de terre, nommée le Colombier, et une pièce voisine s'appelle le Parc.
Le château ou manoir de la famille Tancrède était connu dans le pays sous le nom de château de Cave. Si l'on en juge par les fondations des murs, dont, il y a quelques années, on voyait encore des restes, le château de Cave et ses dépendances étaient considérables. Sa façade principale était au midi, et il avait environ 45 mètres de longueur sur 30 de largeur.
On regrette de ne pas trouver d'autres souvenirs du manoir féodal d'où sortirent ces héros qui sont l'honneur du Cotentin, et qui ont jeté tant d'éclat sur le nom normand.
M. le curé d'Hauteville qui voulut bien me guider lors de mon excursion dans sa paroisse et rne procurer des renseignements avec une obligeance dont je lui suis reconnaissant, m'exprima le désir de voir élever à Hauteville un monument qui rappelât le nom des Tancrède. C'est une pensée patriotique à laquelle on ne peut qu'applaudir. Il ne s'agirait pas d'élever, à grands frais, un de ces monuments somptueux comme on en voit qui décorent les places publiques de nos grandes villes. Ne suffirait-il point de placer, sur le bord du chemih, à l'endroit même où était un des ponts-levis, une colonne d'une noble simplicité, destinée à venir en aide à la tradition : et celte colonne, ne pourrait-on point la prendre dans un bloc de ce beau granit qu'on trouve à quelques pas de l'emplacement où existait le château, et y graver cette inscription : Ici fut le berceau des Tancrède? Tout normand qui tient à la gloire de son pays, et qui garde la religion des souvenirs, s'empresserait d'apporter son offrande, et de contribuer à cette œuvre patriotique.
A peu de distance de l'église et de l'endroit où était le manoir des Tancrède, on remarque les ruines d'un bâtiment d'une très ancienne construction. Les contreforts qui butent les murs sont à un seul retrait, et leur parement est oblique à la muraille qu'ils soutiennent, afin sans doute de présenter plus de résistance. Les fenêtres, percées dans les murs, sont, les unes très-allongées, terminées par des arcs en plein cintre; et les autres fort ébrasées, offrent un cintre très-surbaissé. Suivant une ancienne tradition, ce bâtiment aurait dépendu du domaine et du château de Hauteville. Une salle du rez-de-chaussée servait de prison, et, dans une autre, les vassaux payaient les redevances féodales, et rendaient les aveux, dus au seigneur. Dans la salle au-dessus, on tenait la justice. Un gibet était planté à l'extrémité de l'une des avenues du château.
Hauteville-la-Guichard dépendait de la baronnie de Say, à Quettreville, dont Marigny avait été démembré. Dans le mois de mars 1431, Jean Barenton, écuyer, devenu seigneur de Hauteville-la-Guichard, rendit aveu au seigneur baron de Marigny, pour son fief de Hauteville, qui comprenait le patronage de l'église, un parc enclos de murs et de fossés, un manoir avec colombier, étang, pêcherie, etc .
Dans le cours du XVIIeme siècle, on comptait à Hauteville trois fiefs nobles.
Le fief de Hauteville appartenait à Charles II de Rohan, duc de Montbazon, comte de Montauban et prince de Guémené. Il se trouvait dans la famille de Rohan, parce que Louis I er de Rohan avait épousé Marie de Montauban, fille et unique héritière de Jean, sire de Montauban, décédé au mois de mai 1466, seigneur de Marigny, Remilly, Landal et Crépon, conseiller et chambellan du roi, maréchal de Bretagne, bailli du Cotentin, grand maître des eaux et forêts, et maréchal de France.
Jean de Montauban avait acheté, en 1461, les fiefs, terre et seigneurie de Hauteville-la-Guichard, et les avait réunis à sa baronnie de Marigny : Guyon d'Espinay, seigneur du Bois-du-Lys, les lui avait vendus pour 1800 écus d'or. En 1575, au mois de juin, le prince et la princesse de Guémené échangèrent cette terre et seigneurie contre celle de Rochefort, appartenant à Henri de Silly, chevalier, comte de la Rocheguyon : ils la rachetèrent plus tard, en 1582.
On voyait, avant la révolution de 1789, sur un des murs de l'église, près d'une fenêtre, Técùsson des Rohan-Guémené, marquis de Marigny, et seigneurs de Hauteville.
Le seigneur de Marigny possédait dans la paroisse de Hauteviile une futaie de 80 arpents, en partie close de murs, et un château que M. de Guer, marquis de Marigny et seigneur de Hauteville-la-Guichard, remplaça par une belle habitation moderne, qui fut vendue pendant la révolution, et détruite avant d'avoir été terminée. Le marquis de Guer a été, en 1789, le dernier seigneur de Hauteville.
Le fief Louvel appartenait au marquis de Dampierre, seigneur du Lorey.
Le fief Vanlous était à François Le Jolly, sieur de Villiers et de Vanlous, capitaine de dragons. Il était possédé, en 1645, par Arthur de Clamorgan, écuyer, sieur de Carmesnil, conseiller du roi, lieutenant-général civil et criminel au bailliage de Saint-Sauveur- Lendelin. Il parait que primitivement ce fief avait appartenu à la famille du Bouillon ; car, on trouve que Julien du Bouillon, seigneur de Gouey, du Bouillon et de Vanlous, et Melchior Bellin, écuyer, seigneur de la Rivière, de la paroisse de Hauteville-la-Guichard, sergenterie de Gascoing, prouvèrent, le premier que Jean du Bouillon, son bisaïeul, seigneur de Gouey et de Vanlous, et procureur du roi au bailliage du Cotentin, avait été anobli au mois de janvier 4581 ; et l'autre que la noblesse de sa famille remontait à 1610 . La famille du Bouillon portait d'argent à trois aigles de sable. Melchior Bellin épousa Charlotte Le Trésor, fille de Jacques Le Trésor, écuyer, sieur de l'Arthurye, à Montreuil, qui lui-même avait pour père Jean Le Trésor, écuyer, sieur de la Delairye.
Sur le domaine du Bouillon, il existait autrefois un château composé d'un corps principal et de deux pavillons, entouré d'eau et précédé d'un pont-levis entre deux tourelles. Il appartenait, en 1560, à Jean du Bouillon qui le transmit à son fils, Julien du Bouillon. |
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D'après un rôle de la taille, dressé en 1594, les habitants de Hauteville-la-Guichard furent imposés à 370 écus d'or.
La religion réformée parait avoir eu de nombreux partisans dans la paroisse de Hauteville; car, on voit qu'en l’année 1616 on acheta vingt-six perches de terre, afin d'établir un cimetière destiné à ceux qui professaient cette religion. Ces vingt-six perches coûtèrent six livres tournois.
Hauteville-la-Guichard a vu naitre, en 1551, Jean Heroard, qui acquit, comme médecin, une telle réputation qu'en l'année 4604 Henri IV le nomma premier médecin du dauphin, depuis Louis XIII, et le chargea d'écrire, jour par jour, tout ce qui concernait la santé, le tempérament et les inclinations du jeune prince. Lorsque le dauphin monta sur le trône, Heroard lui resta attaché, et continua son journal. Possesseur d'une grande fortune, il devint seigneur de Vaulgrigneuse. Il mourut à Paris, le 8 lévrier 4628, laissant plusieurs ouvrages, et entre autres le journal que lui avait demandé Henri IV, et et qu'il intitula Ludovicolrophie. |
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