COUTANCES
  CC 36.04 BOCAGE COUTANCAIS
   
  COUTANCES EN 1926   -1/2
         
 

 Coutances Nouvel Hôtel de ville construit en 1916, CPA collection LPM 1900

 
     
 

La Manche  Numéro spécial

Supplément au numéro du 28 août 1926

Publication : Paris 1926

Em. VIVIER. Professeur au Lycée.

 

     Le voyageur qui s'approche de Coutances est inévitablement séduit par l'élégante silhouette de ses églises se profilant dans l'azur léger du ciel normand, au-dessus du vert profond des bocages ; mais il méconnaîtrait Coutances s'il y voyait seulement avec La Bruyère une petite ville peinte sur le penchant d'une colline. Louis Beuve a dit que « Coutances était mieux qu'un décor d'éventail, mieux qu'un poème ; Coutances, c'est une épopée », et M. Herriot a ajouté : « Coutances, c'est le Parthénon chrétien. »

 

     S'il est difficile, dans une courte notice, d'esquisser l'épopée coutançaise dont le rayonnement a dépassé les limites de la cité, on peut toutefois en citer les principaux héros dont les noms sont gravés sur les plaques des rues ; conquérants comme les Tancrède de Hauteville, homme d'Etat comme le prince Lebrun de Saint-Sauveur-Lendelin, marins comme les amiraux Tourville et Lhermitte, savants comme le philosophe Saint-Evremond, l'astronome Legentil de la Galaisière, l'historien Siméon Luce, l'écrivain Remy de Gourmont, ou hommes d'église comme Geoffroy de Montbray, Hugues de Morville et Daniel de Contrières.

 

     Coutances commença, dès l'époque celtique, d'être la capitale des Unelles ; comme de grandes routes venaient y converger, Rome y établit une préfecture militaire, dont elle changea le nom de Cosedia en celui de Constantia, et les premiers évangélisateurs de la contrée y fixèrent le centre de leur diocèse. Pendant l'époque médiévale, ni les ducs normands ni les rois de France ne lui attribuèrent une grande importance militaire. De ses remparts, tardivement construits et très tôt démolis, il ne reste que le contour apparent dans le tracé de certaines rues.

 

     En revanche, les évêques en firent un grand centre religieux ; au sommet de la colline se dressa la cathédrale, qui est actuellement l'une des plus belles de France ; près des deux portes de la ville furent bâties les églises paroissiales de Saint-Pierre et de Saint-Nicolas ; enfin, au pied ou sur les pentes de la colline, s'établirent un Hôtel-Dieu, un monastère de Dominicains et plus tard, un couvent de Cordeliers, un Séminaire d'Eudistes et un monastère de Bénédictins

 

     A l'époque moderne, Coutances devint un important centre judiciaire. Pour le service de la haute juridiction du siège présidial et des juridictions secondaires de la Vicomté, de l'Amirauté, de l'Election et des Traites, une foule d'officiers de justice, d'avocats, de procureurs, d'huissiers et de sergents firent construire les maisons dont plusieurs ont gardé leur vaste porche, leur élégante cour intérieure ou leur haut toit mansardé. Comme ces chanoines et robins étaient gens de savoir et de fortune, ils contribuèrent au développement du Collège, un des plus florissants de Normandie, et ils favorisèrent l'activité économique d'une cité où l'on comptait une vingtaine de puissantes corporations de différents métiers : maçons, parcheminiers, filandiers, ferronniers, etc.

 
     
 

Coutances  Le palais de justice en 1926, CPA collection LPM 1900 

 
     
 

     Profondément atteinte dans ses prérogatives judiciaires et religieuses par la Révolution, Coutances fut un instant chef-lieu du département. Aujourd'hui elle n'a rang que de sous-préfecture, tout en conservant le siège des assises de la Manche.

 

     La ville moderne, pour ne pas déchoir, s'est adaptée aux conditions nouvelles ; fidèle à son passé (Semper et ubique fideles, dit son blason), elle n'a pas craint, avec une prudence et une sagesse bien normande, de se moderniser.

 

     Coutances est actuellement une ville d'art. La fusion des évêchés d'Avranches et de Coutances a conservé à ses principaux monuments religieux leur splendeur. Dans la cathédrale, bien dégagée au dehors et aménagée à l'intérieur avec un goût parfait, le visiteur peut admirer l'élégance des flèches, la hardiesse du dôme, la légèreté de la colonnade jumelée du choeur et celle des claires-voies des chapelles latérales. Saint-Pierre étonne par son harmonieux mélange de gothique flamboyant et de renaissance. De vivre dans ce milieu, le Coutançais a naturellement l'amour des arts ; nombreux sont les groupements artistiques : ateliers d'imprimeurs et d'imagiers, sociétés musicales, instrumentales et chorales.

 

     Coutances est aussi une ville intellectuelle : elle possède un lycée de garçons, un collège de jeunes filles, une école normale d'institutrices et un grand séminaire ; chacun de ces centres d'enseignement est établi dans de vastes bâtiments modernes aussi agréables que sains. Un musée, une riche bibliothèque, une Société de Conférences contribuent à aider au développement artistique et intellectuel. Comme la jeunesse moderne prétend ne pas négliger la culture physique, le tir, le tennis, le football, l'athlétisme sont pratiqués par diverses sociétés dont les succès dans les concours ont légitimé la réputation.

 
 

 

     
 

Coutances  Le marché, CPA collection LPM 1900

 
         
   
  COUTANCES
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  COUTANCES EN 1926   -2/2
         
 

Coutances, place de la Croute un jour de marché, CPA collection LPM 1900

 
     
 

     Coutances reste comme autrefois une ville de commerce. Ses marchés hebdomadaires, ses foires et ses concours ont une renommée qui grandit toujours. La culture maraîchère et florale, la vente des bêtes à cornes et des produits laitiers attire chaque lundi une foule d'acheteurs et de vendeurs. Une Société d'horticulture, une Société d'agriculture, une Union des commerçants s'ingénient à stimuler l'effort des producteurs et à satisfaire les désirs des consommateurs.

 

     La Foire-Exposition qui se tient chaque année à la Pentecôte obtient pendant trois jours un réel succès. Tandis que la fête foraine bat son plein, des stands : machines agricoles, automobiles, voitures à chevaux, constructions en ciment, objets d'art, etc., attirent de nombreux visiteurs. Le Concours laitier et beurrier, qui a lieu en même temps, retient, lui aussi, vivement l'attention. C'est que Coutances est un grand centre d'élevage de la race bovine normande Cotentine. Les animaux du pays sont très prisés tant par leur belle conformation que par leurs qualités laitières et leur grand rendement en viande. Les lauréats des grands concours sont très souvent originaires de l'arrondissement.

 

     Le Syndicat d'élevage et de contrôle laitier Coutançais, un des meilleurs de Normandie, a relevé aux concours de la Pentecôte les productions journalières de 34 kilos de lait et de 1 kilo 664 de beurre, ainsi que la production de 7.500 kilos de lait et 370 kilos de beurre en 300 jours. Ces chiffres, inconnus par ailleurs, montrent la qualité de la race, et en particulier des vaches du pays qu'on peut se procurer aux foires renommées de Coutances, avec leur pedigree et leurs feuilles de contrôle laitier.

 

     Coutances n'a pu maintenir cette vitalité que grâce à la collaboration de ses municipalités ; elle a eu l'heureuse fortune de choisir comme maires des hommes intelligents et dévoués : le docteur Le Conte, ancien médecin de la Marine, médecin chef de l'Hospice, chevalier de la Légion d'honneur, l'actif et laborieux maire actuel, continue la tradition de ses plus illustres prédécesseurs.

 
     
 

Coutances  Le jardin public, L’Obélisque, CPA collection LPM 1900

 
     
 

     Ces municipalités ont ceinturé la ville de boulevards ombragés, dessiné des squares, transformé le jardin d'un généreux bienfaiteur : M. Quesnel de La Morinière, en un vaste et magnifique jardin public, remarquable tant par le coloris de ses fleurs, la beauté et la rareté de ses arbres que par son labyrinthe, ses bassins et le pittoresque de son site ; elles ont ouvert de nouvelles rues ou élargi les anciennes ; les places ont été dégagées et ornées, soit de monuments publics (Lycée, Hôtel de Ville, Palais de Justice, Sous-Préfecture), soit de statues : statues de Lebrun, de Tourville, buste de Remy de Gourmont, monuments aux Morts. Les établissements ont été dotés du chauffage central ; l'éclairage électrique, l'adduction plus abondante des eaux (dès le Moyen Age, Coutances possédait un grand aqueduc dont les ruines pittoresques se voient dans le vallon de Bulsard) sont en voie de réalisation.

 
     
 

Coutances  Un coin du jardin public, CPA collection LPM 1900 

 
   

     Située sur la ligne de Lison à Lamballe, Coutances communique avec Paris-Saint-Lazare par Lison, avec Paris-Invalides par Folligny. Ses voies ferrées rayonnent vers Saint-Lô, Cherbourg, Granville, Avranches et la côte (la jolie plage de Coutainville, dont le Syndicat d'initiative fait des merveilles, n'est qu'à dix kilomètres). Coutances est la ville la plus centrale et la plus accessible du département.


     Tous ceux que la curiosité ou leurs intérêts judiciaires, commerciaux, intellectuels ou religieux y conduisent sont sûrs d'y trouver le charme d'une ville d'art et l'agrément d'une ville très accueillante.

 
 

 

     
 

Coutances  Avenue de la gare, CPA collection LPM 1900