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CPA collection LPM 1900 | ||||||||||||
Avranchin monumental et historique, Volume 2 Par Edouard Le Hericher 1845
Est non procitl a Ihtya q.itam diximns PmgantlU vastinitmi quodiltun seu Landa quam dicuni Herouldi, %oll. la Lande Herould. (Robert Crkalis, du lie Gai Un)
LE plan de la Lande-d'Airou est une espèce d'ellipse tronquée , enfermée dans des limites généralement naturelles : la Donguette trace la ligne du nord, le ruisseau de l'Ecluse celle de l'ouest : des voies et de petits cours d'eau font la ligne du sud et de l'est. Sur sa grande surface, les villages sont assez clairsemés : on y remarque le PontGuibel, les Hogues, la Dorée et la Croix-de-la-Dorée, la Jaunaie, le Val-d'Airou, l'Aunaie.
Cette commune a donné son nom à une rivière, tributaire de la Sienne , la rivière d'Airou , dont Toustain de Billy a ainsi décrit le cours : « L'Airou a sa source au-dessus de l'étang de Montravers , se grossit des ruisseaux de la Corbière et de l'Herouet, continue son cours à la Lande-d'Airou , de qui elle a tiré son nom , reçoit plusieurs autres ruisseaux , entre autres la Hebarde , au-dessous du Pont-Saint-Crespin , passe par dessous Isabelle, et vient perdre son nom en la rivière de Sienne , proche le manoir de Ver '. »
Les traditions attribuent une certaine importance dans l'antiquité à cette localité qui n'est plus qu'nne simple commune. Elles ont été recueillies et formulées par un homme né dans cette localité, que nous avons souvent eu occasion de citer, François Desrues, auteur de la Description de la France: « Tout auprès de Ville-Dieu est la Lande d'Heroult ou d'Airou, qui n'est maintenant qu'une simple paroisse. Anciennement y avoit un bourg contenant environ demi-lieue de long, fort superbement basti sur le grand chemin tendant à Avranches, mais il est ruiné et ne reste plus que fort peu d'enseignemens. Il y avoit aussi un beau chasteau dont on apperçoit encore quelques vestiges; le champ voisin et proche d'iceluy s'appelle encore le Pré-du-Chastcau. » Merian dit les mêmes choses: « Juxta hune viewn nundinalem (Villedieu ) sita est basilica parrochialis led'Herould, sive d'Airou, ubi priscis temporibus extabat vicus ad dimidium milliare porrectus, tplendidi s œdificiis omatus qui ita est eversus ut prœter i«dicia rainarum nikil appariât2. »
L'étymologie du nom communal, dont la latinité générale est Landa Haroldi, LandaHarou, Landa Darou et de Arou, nous montre dans cette localité un fief normaud, désigné par le nom de son possesseur, Harold , dont l'abréviation est Harou et Rou, inscrit en tête de l'épopée normande du Roimn de Rou. A l'appui de cette très-probable hypothèse, nous trouvons une note de l'abbé La Franc , d'après laquelle cet Harold serait le duc Rollon lui-même. Il dit que Ilollou, après avoir distribué des terres à ses officiers, se réserva, dans le Cotentin, la Lande-d'Airou , les poils de Cherbourg, de Barfleur , de Portbail, Osmanville , Agon , le territoire de la Hague et le Val-de- Saiie '. Il ajoute en note que le châIcaa de la Lande avait, dit-ou , une demi -lieue d'étendue '. D'autres, mais sans preuve, ont fait dériver le nom de Herout, roi de Danemarck , qui y aurait séjourné. Cette forme de Harold se trouve encore dans Eroudeville , Heroutvilta -.
Quoiqu'il en soit, nous trouvons la Landc-d'Airou parmi les fiefs des ducs de Normandie : le comte de Mortain, le frère du Bâtard, vendit la Lande-d'Airou pour son armement, lors de l'expédition de la Conquête.
Il paraît que la catastrophe qui détruisit cette localité importante fut une trombe, dont un contemporain a décrit les ravages , en les entourant, selon l'esprit du temps, de circonstances merveilleuses : c'est l'historien Robert du Mont, le plus illustre abbé du Mont Saint-Michel :
« L'an 1157, avant l'Octave de Pâques, dans l'Avrancliin et dans la villa qui est appelée Lande-d'Airou in Abrincatino , in villa que vocatur Landa Aronis, — vers midi, s'éleva un grand tourbillon, s'élevant comme de terre, — quasi de terra emergens;—il enveloppa et emporta tout ce qui était à sa portée,— quctque proxima involvit et rapuit. — Enfin, une colonne rouge et bleue, placée sous le tourbillon qui montait, resta immobile, et on voyait et on entendait des flèches et des épées dans cette colonne, — videbamw et audiebantur sagittal et lanceœ in ipsa columna, — bien qu'on ne pût voir personne qui les agitât. Dans le tourbillon qui s'élevait audessus de la colonne, paraissaient diverses espèces d'oiseaux qui voltigeaient dans son cercle. Immédiatement après , ce phénomène fut suivi, dans ce même village, d'une grande mortalité, et au nombre des morts fut le seigneur du lieu. Non-seulement dans ce village, mais encore dans plusieurs lieux de la Normandie, la mortalité sévit dans cette année. »
La Lande-d'Airou est souvent citée dans les Rôles de l'Échiquier pour la fin de ce Xn* siècle. Les Rôles de M. Stapleton nomment pour 1180 : « Steph. de Saukevell. r. cp. de Will. de Landa de Arou xso » Ceux de M. d'Anisy citent pour la même année, le même •> Will. de Landa de Arou * » ou • W. de Landa. » Vers 1200, Geoffroi, de Landa Darou, fit un don à la Luzerne sur son moulin de la Lande5. Vers ce temps était fait le Livre Noir da diocèse, où fut consignée cette note sur cette paroisse: t Eccl. de Landa Darou patronus Dominus de Landa. Rector percipit totum et esf ibi terra elemosine magna et pulcra et valet iiij". x lib. 8 » Le 12° abbé de la Luzerne était originaire de cette paroisse, Raoul Le Clerc ou de la Lande: sous lui fut faite, en 1368, une charte par laquelle « Guffroi de Soule, seignour de la Lande Darou » donna du blé sur son « moulin de la Lande Darou7. » Dans le siècle suivant, la statistique religieuse de cette paroisse fut ainsi rédigée dans le Livre Blanc : « Guillermus de Landa scutifer est patronus ecc. de Landa Darou. Taxata est ad 90 /. tur. Rector solvit 8 sol. pro capa epsi. Elemosina continet h acras terre. Rector solvit quolibet amw hospitalariis hospitalis S. Johannis Jeiosolomitani pro parte elemosine 18 den. tur. Patronus tenetur solvere annuaiim ecc. 9 bussellos frum. ad mensuram de Villa Dei. »
Au XVeme siècle les Grimouville étaient seigneurs de la Lande: ils avaient fait bâtir, sur l'emplacement d'un « beau chasteau dont on aperçoit encore quelques vestiges » disait Desrues au xvr siècle, un château sur la porte duquel on voyait leurs armes: de gueules à trois étoiles d'or, 2 et 1. Nous lisons ailleurs que ce château primitif était antérieur aux Croisades. A la Conquête de la Normandie, Geoffroy de Grimouville fut conservé dans ses biens par le roi Henri v « et manda aux baillys de Costentin et au vicomte d'Avranches de laisser jouir. » Cette époque fut un temps de calamités de toute espèce: le pays fut surtout ravagé par les loups. Il paraît que les bois de la Lande- d'Airou étaient un de leurs principaux repaires. Toustain de Billy cite un compte relatif à la destruction de ces animaux: « Dans un compte de la S. Michel lhU9 nous trouvons que le comptable paye à Thomas Le Lot et Regnaut Moisson U8 s. pour leur salaire d'avoir pris ès bois de la Lande-d'Airou et tué trois loups et trois louves. Ils ont apposté les hures et les bourbelières au compte et recette de la vicomté. Ces hures ont été placées devant l'hôtel du roy notre sire. »
Au commencement du XVIeme siècle fut fondée l'église actuelle, isolée sur un coteau, assez loin du bourg, isolement que du reste on remarque dans le voisinage, à la Mouche, à Bourguenolles, et que nous avons signalé pour Dragey. Le bourg de la Lande avait un oratoire dit de saint Léonard -desBois. « Environ deux traicts d'arbalete du bourg est sur le grand chemin une petite chapelle des plus anciennes où il y avoit autrefois un monastère de religieux qu'on appeloit S. Léonard des Bois, à cause qu'il estoit situé en un bout du bois de la Lande-d'Herould. » Cette chapelle fut sans doute détruite dans ta catastrophe de 1157 : car la tradition la fait remouter au XIeme siècle. On en retrouve encore les fondemens, sur lesquels s'est élevée la chapelle Sainte-Anne, dont les campaniers tronqués ressemblent à deux cheminées, et qui sert de maison d'école : elle est indiquée sur la carte de Mariette faite en 1686. A la limite de la Lande et de Bourguenolles est une chapelle ruinée dite de Saint-Roch , ancien ermitage dont le dernier habitant était, peu de temps avant la Révolution, frère Machaut, prêtre, pour lequel il y a encore une fondation à l'église. On voit encore le puits de l'ermite : on vous raconte que la tête du saint y a été jetée, que depuis l'eau est merveilleusement blanche, et que l'auteur du sacrilége, est mort « sec comme un bois. »
Cette église de la Lande présente un caractère très-rare dans les édifices religieux, l'unité. Le gothique mourant, auquel la religion interdit encore l'association du classique renouvelé , marque , avec sobriété , de son empreinte cette jolie église solitaire, penchée sur un coteau entre le château et le presbytère. De nombreux détails y captivent le curieux et le rêveur; l'antiquaire y remarquera la pureté des lignes du portail, ses nombreux contreforts, qui creusent l'enfoncement des fenêtres, la pointe d'une ogive d'un transept, la base des piliers de la croisée , formant des siéges , la coquille de Henri H. Les élégantes croix rondes du cimetière viennent de l'église antérieure ou de la chapelle Saint-Léonard, dont la tradition vante la tour:
El la flèche romane aiguisant dans la nue Seshuii angles de pierre, en écailles sculptés.
Le château actuel a été bâti il y a environ cent ans : aux Grimouville succédèrent les de Bethune. Il est maintenant à M. de Peronnv. | ||||||||||||
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