LE MESNIL-GARNIER
  CC 34.07 DU BOCAGE COUTANCAIS
   
  FAITS HISTORIQUES
         
   
         
 

Revue monumentale et historique de l’arrondissement de Coutances

Source : Renault, « Annuaire du département de la Manche »

1854 et additifs de 1861

 

— Hospice et Prieuré.

 

— En l'année 1619, Thomas Morant, seigneur et baron du Mesnil-Garnier, fonda dans la paroisse un couvent de dominicains et un hospice pour les aliénés. L'hospice existe encore aujourd'hui. Les bâtiments n'offrent rien d'intéressant.

 

Quelques années après leur établissement, le prieur et les religieux du Mesnil-Garnier élevèrent la prétention de bâtir un moulin. Le seigneur s'y opposa, soutenant que les religieux, qui possédaient le moulin banal, ne pouvaient en bâtir un autre sous le même toit. Cette prétention des religieux donna lieu à un procès que le parlement de Normandie termina en faisant défense aux religieux de bâtir leur moulin.

 

On les voit, en 1657, obtenir une concession de bois pour leur chauffage jusqu'à concurrence d'une somme de soixante livres.

 

Dans les XII°, XIII° et XIV° siècles, les Thieuville ou Thiéville, seigneurs du Mesnil-Garnier et du Mesnil-Hue, faisaient le service au château de Gavray, et devaient, au cas de guerre, en garder la principale porte : Radulfus de Thevill tenet feodum unius militis apud Mesnillum Garnier ad quod pertinet le Mesnil-Hue et débet servicium ad majorem portam de Gavreio tempore guerre.

 

Cette famille des Thieuville a donné deux évêques : l'un, Raoul de Thieuville, au diocèse d'Avranches; l'autre, Guillaume de Thieuville, à celui de Coutances ; un abbé à l'abbaye de Lessay, et deux abbesses a l'abbaye royale de Sainte-Trinité à Caen. Guillaume était fils du seigneur du Mesnil-Garnier, et neveu de Raoul.

 

L'évêque de Coutances devint lui-même seigneur du Mesnil-Garnier, et un aveu qu'il donna en 1327 fournit quelques détails curieux sur le fief du Mesnil-Garnier.

 

« Guillaume de Thieuville, dit cet aveu, par la permission » divine évêque de Coutances tient à cause de son patronage et patrimoinerie le fieu du Mesnil-Garnier et les appartenances nuement du roy pour un fieu de chevalier entier desquelles appartenances la paroisse de Thieville est qui sort en la vicomté de Falaise et tout le surplus en la vicomté de Coutances et à cause du dit fieu il a certains usages en la forêt de Gavray cest a savoir un quesne par chacun an tel comme il lui plait a choisir à son ordre et son amenagier es mettes du bois qui est appelé Berences pour son manoir du Mesnil-Garnier par la tenue du seigneur de la Vallée verdier de la dite forêt et le pasturage a ses bestes et aux bestes de ses hommes es dit bois de Berences et tous ses porcs quittes en la dite forêt quand le panage soffre et les porcs de ses hommes chacun pour my-droit sont les dits hommes quittes de coutume es foires du roy pour leur usage et ès marchés de Gavray. Item les ancessours (prédécesseurs) du dit seigneur du Mesnil-Garnier prirent du roy nostre sire une ferme perpétuelle qui est appelée le fieu au Mancel dedans les mettes du dit fieu pour la quelle prise il rent chacun an 20 liv. à deux échéances et pour tout le dit fieu il doit servir 10 jours à la mestre porte du chatel de Gavray en tems de guerre et vaut ou peut valloir au dit seigneur demolument dudit fieu de tout comme il en sied en la vicomté de Coutances 400 liv. de rente bon an mal an ou environ et appartient au dit fieu le patronage de l'église du Mesnil-Garnier qui vaut au dixième 90 liv. Item le patronage du Mesnil Hue qui vaut 40 liv. au dixième. »

 

Dans le commencement du XV° siècle, le domaine et la seigneurie du Mesnil-Garnier passèrent dans une autre famille par le mariage de Catherine de Thieuville, dame du Mesnil-Garnier, avec Olivier de Mauny. baron de Thorigny.

 

Marguerite, leur fille, épousa Jean Goyon de Matignon, qui devint ainsi seigneur du Mesnil-Garnier. Leur fils, Allain Goyon, fut, en 1470, seigneur du Mesnil-Garnier, sire de Villers, d'Anisy et de Thiéville. Il fut aussi chambellan du roi, son grand bailli à Caen, et conservateur-général de l'Université de cette ville.

 

La seigneurie du Mesnil-Garnier appartint longtemps à la famille de Matignon; mais, dans les premières années du XVII° siècle, elle fut vendue à Thomas Morant, conseiller du roi en ses conseils et maître des requêtes ordinaires en son hôtel. Ce nouveau seigneur, en l'année 1607, la fit ériger en baronnie avec incorporation des terres de Champrépus, du Mancel et de la Bellonnière.

 

Cette baronnie fut elle-même, en 1659, érigée en marquisat en faveur des descendants de Thomas Morant, et les fiefs d'Eterville et des Brulards y furent réunis. Le roi confirma cette érection en 1715.

 

Le marquisat du Mesnil-Garnier passa des Morant aux Poilvillain, comtes de Cresnay, qui, ensuite, transmirent leur seigneurie à la famille génoise de Cambiaso.

 

La terre du Mesnil-Garnier est devenue la propriété du général Bonnemains, et appartient aujourd'hui à sa famille.

 

Lorsque des troubles eurent lieu en Basse-Normandie à l'occasion de l'établissement de la gabelle, les redoutables Va-nu-pieds inquiétèrent vivement le seigneur du Mesnil-Garnier, qu'ils traitaient de monopolier et de gabeleur. Ainsi, dans le Journal du chancelier Séguier, qui fut envoyé en Normandie pour faire punir les coupables, on lit : « Jobmettois à dire que le sieur du Mesnil-Garnier a passé dans les calomnies, aussy bien que les autres, pour un des principaux arcs-boutants de la Gabelle. On dict que cette charité luy a esté prestée par quelques uns d'Avranches, pour un mesconlentement qu'ilz disent avoir reçeu de luy. Quoi qu'il en soit, il est vray qu'il fut contrainct de munir sa maison d'hommes et d'armes, y ayant tenu garnison de plus de quatre vingt hommes, durant tous ces desordres, qui luy eussent esté funestes s'il n'avoit aussy généreusement résisté a ses ennemis qu'ilz le vouloient attaquer injustement. »