BEAUCHAMPS
  CC 33.01 GRANVILLE TERRE ET MER
   
  HISTOIRE
         
 
 
     
 

Avranchin monumental et historique, Volume 2

Par Edouard Le Hericher 1845

 

Avenel et Paynet

Payver et Perdtl

Rivers et Itivell

Beauchamp et Beauapel.

   (Liste de Brotnplon).

 

Beauchamps forme une enclave dans l'arrondissement de Coutances qui l'embrasse de tous les côtés , excepté à l'est où un étranglement le rattache à son arrondissement, isthme idéal que sillonne le cours capricieux du bassin abrupte de l'Airou. C'est en général un plateau élevé, digne de son nom, qui s'abaisse vers cette rivière , et que coupe presque également de l'est à l'ouest la route de Caen à Granville. Les maisonnettes qui bordent cette route dans la traversée de Beauchamps ont une physionomie remarquable. Outre leur propreté , supérieure à celle de la plupart des maisons normandes, elles s'égaient au soleil avec leur façade brodée de dessins faits de coquillages ou tracés dans le badigeon. Cette route franchit à Beauchamps, sur un beau pont d'une arche, l'Airou, qui reçoit au-dessous la Hebarde. Parmi les nom» significatifs de cette commune on remarque la Forge-auxBalais, la Croix-Chatel', le Hameau-aux-Biches, les HautsVents , la Porte-du-Rez.

 

L'église ne répond pas à la beauté du site ni à la grace du village. Elle est cachée à mi-côte dans le pli d'un vallon, et n'offre qu'un seul objet d'art et d'antiquité. Elle a deux transepts. Sa tour, à faîte triangulaire, s'élève lourde et timide h la face occidentale, mais sans y former portail. L'entrée principale est le porche du midi. Le morceau intéressant est le baptistère et spécialement sa base. Elle est d'un travail grossier, mais d'une physionomie romane , et probablement l'unique reste de l'église qui existait en ce lieu vers l'époque de la Conquête.

 
         
 

C'est un dé en calcaire de Caen , avec des colonnettes engagées aux angles, sans base ni chapiteau. Sur les faces sont insculptées des figures grossières, surmontées de fleurs et de pommes de pin. La cuvette, évidemment ultérieure, est en granit, et porte des entailles, imitation maladroite des reliefs du piédestal. Le reste de l'église est moderne et sans caractère.

 

Au XIVeme siècle, cette église était ainsi notée dans le Livre Noir: « Ecclesia de Bello Campo. Patromis heres de Murdraqueria. Rector percipit omnia cum vj acris terre elemosine et valet xxx lib »

 

Au XVeme siècle, elle était ainsi notée sur le Livre Blanc : « Taxas tricesime: xxiij. s. iiij. d. Taxus decime xxxv Ib. Bellus Campus4. »

 

En 1648, elle avait pour patron le seigneur du lieu, et rendait 600 liv.' Elle est sous l'invocation de saint Crespin et saint Crespinien.

 

Mais la gloire de Beauchamps, c'est l'illustre famille de ce nom, que rappellent les vestiges de son château.

 
 
         
 

Une magnifique position naturelle, un cap qui se projette vers l'Airou en ondulations étagées, baigné d'un côté par la nature et des deux autres par la main de l'homme , en face des croupes que couronnent l'église et le château de Dragueville, fut l'emplacement de la forteresse et le berceau d'une famille de la Conquête , celle qui a été la souche des comtes de Warwick et de Worcester. Il ne reste rien de la forteresse des premiers Beauchamp. Les vestiges actuels présentent une maçonnerie schisteuse sans beaucoup d'épaisseur ni de cohérence. Le plan général est celui du promontoire. C'est un arc dont la corde, ou l'isthme, représente la partie accessible. La courbe de l'arc est un musoir très-escarpé , baigné par des eaux naturelles ou artificiellement amenées. Mais ce plan, assez ordinaire, offre ici une particularité remarquable : le sol de cet arc s'échelonne en trois étages de redoutes, qui ne pouvaient être emportées que par quatre assauts. La forme et la force du terrain autorisent à penser que le donjon était à l'extrémité du musoir. Entre cette enceinte extrême et celle qui la précède , il y a un ouvrage à angles, espèce de bastion, dont la forme et la maçonnerie annoncent le xvne siècle, date qu'on lit dans les constructions fermières qui existent sur l'isthme et forment la quatrième ligne de défense. La chapelle, qui existait dans l'intérieur , fut transportée en-dehors de l'enceinte, du côté du sud, quand on fit ces constructions. Elle n'existe plus.

 
     
 
 
     
 

Outre le château, il y a le Manoir à l'ouest de l'église.

 

Le premier nom historique des seigneurs de cette paroisse est Hugues de Beauchamp, qui commandait à la Conquête les troupes du Val de Sienne. Toutes les listes citent son nom2: il figure dans le Domesday, sous la forme de Hugo de Belcamp, comme Tenant en chef dans trois comtés et comme Soustenant dans huit endroits du Hertfordshire.

 

Le fils et le successeur de Hugues épousa Rohais, fille d'Aubrey , de Ver, commune voisine de Beauchamps. La famille des Beauchamp se partagea en deux grandes branches, la branche anglaise, divisée en une dizaine de baronnages, parmi lesquels ceux de Warwick, de Worcester et de Bedford5, et la branche normande, moins illustre, mais très-distinguée.

 

Raoul de Beauchamp était à la croisade du duc Robert.

 

Sous le règne de Henri Ier, Robert de Beauchamp était vicomte d'Arques".

 

Sous le règne de Henri I, 1172, Hugues de Beauchamp devait au roi le service d'un chevalier pour le comté de Mortain : « Hugo de Bello Campo. mil. regi de comitatu Moretonii7. »

 

En 1173, ce même Hugues était châtelain de Verneuil Il figure pour la fin de ce siècle dans les Rôles de l'Echiquier: « Homines Hug. de Bello Campo xiI l. defeodo I mil. »

 

Son héritier devait 7 livres du fief d'un chevalier.

 

En 1203 , Richard de Beauchamp était connétable de la Tour de Rouen.

 

Le roi Jean, vers 1215, fit marché pour la terre de AVatkin (Walter) de Beauchamp4.

 

En 1287, Jean Marie de Beauchamp vendit : « Nobili domino Radulfo de Bello Campo militi unum quart, frumenti ad mensnram de Haya Paganelli... adfcodum de la Favrerie»

 

En 1300 : « Radulfus de Bello Campo dedit abbatie de Lucerna ad opus capelle S. J. Baptiste quam fecit juxta sacristariam, in qua elegit suam sepulturam, sex bossellos frumenti6»

 

Dans le XIVemle siècle, Clémence du Guesclin , la plus jeune des sœurs du connétable, épousa en premières noces Raoul, seigneur de Beauchamp, avec qui elle vivait encore en 1364; en 1371, elle était remariée à Fraslin de Husson, seigneur de Ducey, de Champcervon, etc. Raoul portait d'azur à quatre jumelles d'or, au lion passant de même en chef.

 

En 1419, le roi Henri v donna le château de Raoul de Beauchamp à un seigneur anglais qui portait ce nom:« Le 13 dudit, respit dun mois a Jean de Beauchamp de Poywillcr du chastel de Beauchamp qui fut a Raoul de Beauchamp chevalier. Vers ce temps un Beauchamp, comte de "Warwick, était lieutenant du duc de Bedford, dit régent de France, comme on le voit dans le Registre de Thorigny: « Ricardus de Beauchamp cornes Warvicensis locum tenens dicti regentis tempore Henrici vi pro campo. » Les Anglais ne furent pas paisibles possesseurs de ces conquêtes.

 

Vers 1437, Beauchamp, fut le théâtre de plusieurs engagements. Il y eut au village de la Provotière et dans le Champ-des-dix-huit-Vergées un combat où les Fiançais furent mis en déroute. Il ne paraît pas que le château fût alors très- important : il est à peine nommé parmi ceux que les Français reprirent, sans coup férir, en 1449 et 50

 

Ambroise de Bereauville, seigneur de Beauchamp, à la fin du XVeme et au commencement du XVIeme siècle, possédait les seigneuries de Beauchamp et de Mesnil-Rogues, qui depuis ce temps furent réunies. Une branche des Pierrepout les posséda ensuite, puis elles passèrent par des mariages dans les familles de There, d'Osmond et de Briges. M. de Briges vendit vers 1820 les restes de la terre et du château de Beauchamp.

 

En 1765, Beauchamp, de l'élection de Coutances, de la sergenterie du Sabot, comptait 115 feux.