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Le marché en 1912, CPA collection LPM 1900 | ||||||||||
Avranchin monumental et historique Par Édouard Le Héricher 1865 LA commune de Brecey couvre les deux flancs de la belle vallée de la Sée. Elle est bornée à l'ouest par la rivière du Bieu ou du Baudet, au nord par le ruisseau des Parfondes, est par quelques cours d'eau dont l'un s'appelle la Fontaine h-la-Belle. La Sée la divise en deux parties de l'est à l'ouest, et sépare deux coteaux, l'un assez escarpé, l'autre plus étalé; on la passe sur le Pont-Roulland et le Pont-de-Pierre ou de Brecey, devant lequel eut lieu un engagement entre les troupes de Gassion et les Nu-Pieds en 1639. Le sud est une ligne idéale tracée parallèlement à la rivière sur le coteau de la ButteJulien. Le paysage de celte commune reçoit une physionomie particulière des sapins épars dans Ja campagne: son beau point de vue est du côté du Celland , sur la Butte-Julien.
Beaucoup de noms de cette commune ont un caractère ancien et rappellent quelque chose de l'histoire locale: la terre de l'Abbaye rappelle l'Abbaye de Savigny, à laquelle appartenait l'église ; le Manoir ou la Tourelle rappelle les anciens seigneurs de Brecey. Le souvenir du vieux bourg revit dans les noms du Champ-de-Ia-Foire , de la Ville, des Portes, des Pêcheries. Le Ham-Benoît rappelle les Saxons. Nulle commune ne montre plus que celle-ci les noms d'hommes dans les noms de ses fiefs et de ses hameaux. Brecey est généralement latinisé Breceium. D'après cette latinité, on pourrait croire que ce mot a la même signification que Bricqueville, c'est-à-dire l'habitation de Bric ou plutôt de Lebrec. Mais dans un manuscrit du commencement du xiv e siècle, te GestaPctri Regis, on trouve la forme de Burceium *, qui se retrouve encore dans la prononciation populaire de Beurcey. Sous cette forme se cache un nom propre normand qu'on rencontre dans le Domesday. Serlonde Burci y figure comme Sous-tenant dans le comté de Sommerset, et comme Tenant-enchef dans ce comté et dans celui de Dorset. Il est vrai qu'un titre plus ancien que ce manuscrit, le Rôle de l'Echiquier pour la fin du xirsiècle, écrit Breceium. Mais quel que soit le nom qu'on adopte, Breceium ou Burceium, on doit lui reconnaître pour origine un nom propre, et lui donner la signification d'habitation de Lebrec ou de Burci6. Si le Livre Vert, à uneépoque peu reculée, a écrit Braceium : « Philippa domina de Braceio, » c'est une variante qui ne peut prévaloir contre les formes précédentes.
D'antiques voies sillonnaient le territoire de Brecey, la voie romaine d'Avranches à Vire qui, en quelques endroits, a plus de huit mètres de profondeur, et sur laquelle, a Tirepied, on a trouvé des monnaies romaines, le chemin de Brecey à Villedieu qui rejoignait la voie Montoise près de cette localité, et le chemin Biardais qui allait vers l'antique bourg des Biards. Il y avait un gué à l'endroit du Pont-de-Pierre. | ||||||||||
La gare de Brécey CPA 1900 | ||||||||||
Le vieux bourg est le centre primitif de la population. C'est là sans doute que furent construites ces granges de Brecey « grangias de Burceyo » par un des plus grands abbés du Mont Saint-Michel, Pierre Le Roy,au commencement du XIVeme siècle. On y retrouve des noms qui attestent une certaine importance. Au XVIeme siècle Masseville écrivait:
« Brecey, bourg et marché du diocèse d'Avranches et de l'élection de Mortain. Il y a plus de 2400 âmes et un château magnifique »
En 1698, M. Foucault portait encore plus haut le chiffre de la population :
« Brecey, gros bourg sur la Sée, où il y a un marché tous les vendredis, qui contient 513 familles et 3200 âmes. Claude de Vassy en est le seigneur, et l'abbé de Savigny présente au bénéfice. »
Les foires sont des preuves de l'importance d'une localité, et les foires anciennes prouvent l'importance d'une localité au Moyen-Age: Brecey a un grand nombre de foires, dont cinq existent depuis un temps immémorial.
Auprès du vieux bourg était l'habitation primitive des seigneurs de Brecey, la forteresse des guerriers de la Conquête. On appelle aujourd'hui l'emplacement le Manoir; il était sur le bord du chemin Biardais, au flanc d'un petit coteau, dont le pied est baigné par la Sée, que l'on passait à gué, à une époque reculée, à l'endroit où s'est élevé le Pont-Roulland. Il y avait encore récemment une tourelle dont le nom s'applique encore au terrain. C'est là qu'il faut placer le château féodal de Brecey, le berceau des Brecey de la Conquête '. Leur château nous conduit à leur histoire.
Un seigneur de Brecey était à la Conquête. Il est appelé de Burci dans le Domesday, et de Brecey dans la liste de Dumoulin et dans celle de Masseville. M. Desroches dit que le seigneur de Brecey reçut des biens dans le Worcestershire.
Masseville cite encore le seigneur de Bressay, dans la liste des nobIes qui prirent part à la croisade du duc Robert.
Dans le Rôle de l'Echiquier pour l'année 1195 , on trouve la redevance d'un seigneur de Brecey, dans le voisinage de Richard Silvain de Saint-Pois et de Pierre du Celland: « Hamel de Breceio, r. cp. de Xx 1. 6 »
Dans un rôle de 1272, cité par Laroque', il y a un Robert de Breccy chevalier.
Un registre du Mont Saint-Michel renferme une charte de Nicolas de Brecey , à la date de 1294 :
« Casta Nich. de Breceyo pro excambio nemorum abbatis. »
An XIVeme siècle, Agnès de Brecey est inscrite comme bienfaitrice sur le Nécrologe du Mont Saint-Michel, où elle figure le 4 des nones d'avril.
Dans le même siècle, un clerc de Brecey devint le seizième abbé de Montmorel : Robert de Brecey fut inauguré en 1358. De son temps, en 1364, les troupes ennemies, navarraises et anglaises, envahirent le monastère de Montmorel et s'y retranchèrent. Bertrand Duguesclin les en chassa, et, persuadé que les moines ne s'étaient point opposés à cette prise de possession , il les condamna à 40 liv. d'amende, dont il les exempta cependant, quand il eut reconnu que les ennemis avaient pris le monastère par la force. | ||||||||||
La gare de Brécey CPA 1900 | ||||||||||
Sous ce même siècle encore, figure sur le Nécrologe du Mont Saint-Michel, le donateur du fief de Brecey, le prieur Jean Eon. Une bulle du pape Luce mentionne le don à l'église d'Avranches du Moulin-Robert à Brecey.
A la fin du XVeme siècle Montfaut contesta la noblesse de Jean de Maigny à Brecey : Roissi le trouva noble. En ce siècle, un seigneur de Brecey fut au nombre des chevaliers, défenseurs du Mont Saint-Michel.
Dans le XVeme siècle Brecey passa aux Vassy. A la fin de ce siècle, un d'eux embrassa le calvinisme, épousa Louise de Montgomery, sœur de Gabriel H, le constructeur du château de Ducey, et bâtit le château actuel de Brecey, auquel il adjoignit un prêche. C'est sans doute celui-là que Masseville désigne, lorsqu'il cite un de Brecey parmi les protestants de notre province. La famille des Vassy, alliée aux Montgomery, l'était aussi aux seigneurs d'Harcourt.
Gabriel-Henri de Vassy-Brecey combattit vaillamment à la bataille de Leuse , où il perdit la vie à la tête de sa brigade, en 1691. Il fit preuve de soixante-quatre quartiers de noblesse, lorsqu'il fut reçu chevalier de Saint-Lazare.
Le château de Brecey et les Vassy sont cités dans la Recherche de Chamillard.
Les armes de Brecey étaient d'hermine au lion de gueule rampant.
Le château de Brecey était aux Vassy à l'époque de la Révolution. A cette époque il fut nationalisé et vendu à un négociant de Granville, M. Campion.
Après la mention de l'ancien château-fort de Brecey, qui n'existe plus, et après l'histoire des seigneurs, se place naturellement la description du château de plaisance des Vassy qui existe encore.
Un Anglais observateur et quelquefois poète, M. le docteur Hairby, a assez bien peint le site du château et l'impression produite par la vue de ce monument, tel que le temps et l'homme l'ont fait.
« Le paysage d'alentour renferme des ondulations étendues, ressemblant à quelques parties de l'Angleterre pour la richesse pittoresque, une rivière que l'on dit abonder en truites et une longue et étroite avenue qui marquait l'approche de la résidence d'un noble, avant que la haine de l'aristocratie causât la ruine des nobles édifices qui survivent comme des souvenirs de la désolation des familles qui tinrent un haut rang sur la terre. Là où les pas des guerriers résonnaient, où le clairon appelait à la bataille ou à la chasse, l'ignoble coq de fumier reste le seul habitant, et chante comme pour railler l'orgueil et la grandeur de l'homme. »
Le château de Brecey est situé dans la vallée de la Sée sur un terrain plat: sa situation et sa fastueuse architecture révèlent des temps pacifiques et le luxe des grands seigneurs. Des chasses de châtaigniers2 ou de hêtres conduisent au château dont on aperçoit d'assez loin les girouettes inclinées, les cheminées rouges aux ceintures blanches et les deux pavillons à toit aigu. Un beau lichen dore les murailles. Ce qui frappe d'abord à sa vue, c'est la désolation de ses cours, le délabrement de l'édifice et la mutilation de ses parties. Une des ailes a été détruite, l'autre est mal raccordée, le vaste écusson a été gratté, les fenêtres sont vides ou déshonorées par des planches ou des bottes de foin. L'intérieur inspire encore plus vivement les tristes pensées, parce que les souillures modernes sont mêlées de beaux débris du passé, statues, poutres peintes, plafonds sculptés, trophées d'armes, peintures, consoles armoriées. Le style du château de Brecey est plus simple que celui de Ducey, dont il est le contemporain: c'est le style de la Renaissance altéré par le XVIIeme siècle. Il fut bâti vers 1620 par un de Vassy, seigneur de Brecey, qui avait épousé Louise Montgomery, la sœur de Gabriel, lequel bâtit celui de Ducey vers la même époque. | ||||||||||
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Bureau de poste, CPA collection LPM 1900 | ||||||||||
La disposition générale offre deux façades à fronton infléchi, par derrière, deux pavillons peu saillaus et, par devant, une aile en partie refaite et la naissance d'une autre aujourd'hui détruite. La construction est généralement plate et rectangulaire : Les seuls ornements qu'on puisse signaler sont les modillons des corniches, des linteaux sculptés, des prismes encadrés, des plates-bandes et des écussons. L'entrée principale est plus simple que celle du château de Ducey et n'a pas de perron. Les matériaux sont le granit qui forme les reliefs et une brique très-mince qui remplit les fonds et communique à tout l'édifice un air pittoresque et original. Comme à Ducey, les caves sont fort belles: ce sont des voûtes robustes aux arêtes fines et bien filées, sur des parois robustes. On y remarque une salle , peut-être une salle de bains, dont l'élégante cheminée est portée par deux sveltes colonnes doriques monolithiques. La partie la plus grandiose de l'édifice, quoiqu'elle soit dure à l'œil, est l'escalier central carré qui s'élance des caves jusqu'aux combles sur ses quatre piliers carrés, avec des volées alternativement simples et doubles, bordées d'italiennes, les simples portées sur des voûtes à quatre travées peintes en grisaille , et les doubles appuyées au mur. Au rez de chaussée sont les salles à manger. Une d'elles naguère encore était toute brillante de peintures éclatantes, de guirlandes pendantes en bois sculpté et de dorures délicates. Ce beau revêtement et ce plafond splendide ont été récemment vendus à une descendante des de Vassy. Au premier étage on distingue surtout la salle des Gardes avec ses beaux trophées antiques, ses poutres revêtues d'arabesques bleu et or, avec des M et des V croisés', ses lambris en grisaille, sa fastueuse cheminée à cariatides et à colonnes, ses statues, entre autres la Force et la Paix. Dans les combles, on peut admirer de belles charpentes. Le château de Breccy, comme celui de Ducey, fort remarquable en lui-même , est surtout précieux comme type dans les développements et les altérations de l'architecture. Il appartient à cette décadence de la Renaissance dont le Palais du Luxembourg est le modèle, et dont Jacques Debrosse est l'architecte. Sous la régence de Marie de Médicis s'introduisit en France le genre italien qui altéra la Renaissance, ce gracieux compromis entre deux grandes architectures. Le pilastre succéda à la colonne , l'ove à la fenêtre et à la rosace, la corniche aiguë au chapiteau, l'arc en berceau à la voûte semi circulaire ou ogivale , le relief en bossage remplaça les sculptures, la balustrade à l'italienne remplaça la broderie ouvragée. Une sécheresse régulière succédait à une richesse folle et exubérante, à cette époque, de 1600 à 1620, s'élevèrent le Luxembourg, la grande Salle des Pas-Perdus, le Val-de-Grace, le portail de Saint-Gervais : c'était l'époque des Delorme, des Lescot, des Ducerceau, des Debrosse, architectes habiles qui connaissaient la statique et Vignole, mais qui n'avaient pas l'imagination puissante et riche des artistes du passé.
L'église de Saint-Martin de Brecey est un antique oratoire dont les parties romanes se retrouvent encore, spécialement dans les substructions du chœur où l'on voit quelques pierres d'ancien appareil, et dans la partie supérieure des contreforts méridionaux de la nef, repris évidemment en sous-œuvre. Les fenestrelles lancéolées du chœur, ou conservées, ou replacées dans un allongement récent, sont peut-être aussi contemporaines des contreforts, c'est-à-dire de la Transition. Le reste appartient à la période ogivale. A cette période appartiennent les contreforts solides et saillants qui flanquent le portail et la nef du côté du nord , le portail avec sa fenêtre géminée, peu délicate, remarquable par ses degrés dans son évasement intérieur, et ses statuettes dorées de saint Roch et de la Vierge. La tour est plus jeune que le reste de l'église, elle se termine en toît à double égout et se raccorde avec l'intérieur par un arc ogival assez bien traité. L'intérieur d'ailleurs est pauvre en objets d'art et d'antiquité, si l'on excepte l« baptistère en forme de sablier, et un tabernacle flamboyant1 qui a disparu devant un lourd et fastueux autel grec. La nef de Brecey, qui peut bien contenir 400 personnes, est littéralement toute dallée en pierres tombales. Ce vaste livre de granit, bosselé d'inscriptions, de ciselures, de croix, de calices , d'épées et d'écussons, est le nécrologe où sont venus s'inscrire ,des personnages de toutes les conditions. M. Desroches nous apprend que quelques-unes de ces dalles sont placées sur les sépultures de la famille de Roger de Talvende, dont la postérité s'est éteinte dans ces derniers temps2. Dans le cimetière est le dé de l'ancienne croix : on y retrouve des armes, celles sans doute du donateur ; on y remarque entre autres deux aigles adossés. | ||||||||||
L'église de Brecey était un prieuré dépendant de l'abbaye de Savigny. Aussi trouve-t-on dans le Gallia Christiana, à l'article des Prioratus in Galliâ modo extincti : « Breceium in diœcesi Abrincensi.3 »
En 1628, d'après le Pouillê du Diocèse, l'église de Brecey rendait 300 liv.4 Elle paya 15 liv. dans l'impôt royal de 15225.
Le Pont-de-Pierre fut le théâtre d'un combat entre Gassion et les Nu-Pieds. Voici comment Richard Seguin le raconte: « Gassion fit ensuite marcher son armée sur Avranches, par Tallevende et par Gathemot. Les Va-Nu-Pieds s'étaient réunis et retranchés au Pont-de-Pierre, près du bourg de Brecey. Le maréchal les attaqua avec vigueur ; ils se défendirent pendant deux heures avec opiniâtreté, et lui tuèrent plusieurs officiers et vingt soldats. Le marquis de Courteaumer y perdit la vie; mais Gassion étant parvenu à les tourner , ils abandonnèrent leurs retranchements et s'enfuirent dans les bois. On les poursuivit chaudement, et trois cents furent taillés en pièces, deux cents faits prisonniers, et les autres se dispersèrent. Le maréchal, maître du Pout-de-Pierre, fit passer la rivière de Sée à sa troupe, et lui accorda un jour de repos. Le lendemain il la conduisit devant Avranches. Cette ville bâtie sur une hauteur, près de la mer, entre les rivières de Sée et de Sellune, était alors très-forte. »
A Brecey est né un homme qui mérite notre sympathie et pour sa valeur personnelle et son heureuse influence sur son pays qu'il représente dans sa principale spécialité, l'horticulture, sans cesser de le représenter dans ses nobles tendances de science, d'art et de littérature. C'est un de ces hommes d'intelligence et de cœur, qui sont compris de tous et deviennent populaires par cette modération d'idées et de sentiments qui est au fond la sagesse et la vertu. La variété de leurs facultés les rend appréciables à tous, le calme studieux de leur vie ajoute à l'autorité que donne une heureuse nature, la pureté des mœurs sanctifie l'amitié et l'admiration qu'inspiré leur intelligence. Ces existences n'ont rien qui émeuve puissamment les élans de l'amour ou de la haine: on les contemple avec calme et avec sûreté: on sait que rien de discordant ne détruira leur harmonie, tandis qu'on a peur quand on regarde la vie du grand homme. Celui-ci est une montagne qui a des torrents et des volcans: l'autre une colline arrondie et cultivée où tout est fait pour le plaisir des yeux. Il suffit de voir le portrait de Le Berriays pour deviner toute sa vie : cette figure bonne et placide est celle de l'homme de bien, de l'homme en paix avec lui-même, cet œil pénétrant et doux est la révélation d'une intelligence modérée, cette bouche fine annonce l'esprit, cet élément du siècle, elle rappelle celle de Voltaire sans l'amertume. Si cet homme offre un grand attrait pour le cœur, il en offre aussi pour l'esprit: ces deux raisons, jointes à son influence locale, nous permettront de nous arrêter avec quelque complaisance sur la biographie de celui que j'appellerai le plus grand moderne de l'Avranchin , si la grandeur consiste dans la moralité et dans l'étendue des facultés. Nous emprunterons beaucoup à la Notice d'un autre homme de bien, qui consacre sa vie et sa fortune à faire le bien par les sociétés savantes : nous avons nommé M. Lair. Il travailla sur les notes d'un élève aimé de Le Berriays. | ||||||||||
Nouvelle halle au menu grain | ||||||||||
Ecoles libres de filles et de garçons | ||||||||||
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Brecey en 1960, collection CPA LPM 1960 | ||||||||||
La Manche Numéro spécial, Supplément au numéro du 28 août 1926 de l'Illustration économique et financière Auteur - Publication : Paris 1926
Quand on circule dans le département de la Manche, d'Avranches à Cherbourg, l'on voit partout, autour des fermes, de splendides plantations de pommiers, aussi n'est-il pas surprenant que ce pays soit un des plus gros producteurs de pommes.
Par l'importance de ses récoltes, le département de la Manche vient en tête de la Normandie, et immédiatement après le département de l'Ille-et-Vilaine. Pour la récolte de 1924, la production de la Manche a été de 6.649.740 quintaux, sur une récolte totale de 47 millions, soit plus du huitième. Jusqu'en 1914, il n'y avait dans le département de la Manche que des bouilleurs de cru et quelques petites distilleries fabriquant de l'eau-de-vie de cidre de consommation. Par suite de la guerre et de la modification de la législation supprimant l'alcool d'industrie pour la consommation de bouche, le principal débouché de la pomme et du cidre allait devenir la fabrication des alcools rectifiés extra neutre à 96°, destinés à remplacer l'alcool d'industrie.
M. Henry Leblanc, en industriel avisé, commença, fin 1917, à construire à Brécey une importante cidrerie-distillerie. Son fils, M. Jacques Leblanc, aussitôt rentré de la guerre, au début de 1919, prit entièrement la direction de cette affaire, et, rapidement, malgré les nombreuses difficultés d'approvisionnement, fit terminer la construction et le montage de l'usine, qui commença à fonctionner en septembre 1919.
La distillerie de Brécey est construite sur un vaste terrain, à proximité de la gare, à laquelle elle est reliée par une voie de raccordement. Cette usine peut travailler journellement 180 à 200 tonnes de pommes, et, grâce à un matériel très perfectionné et bien agencé, assure cette grosse production avec un personnel réduit.
Cette distillerie dispose surtout d'une cuverie qui peut être citée comme modèle. Construite entièrement en ciment armé, elle comprend 24 cuves de fermentation de 600 hectos et 16 cuves de réserve de 1.100 hectos, soit une contenance totale de plus de 30.000 hectos. Non seulement cette usine travaille beaucoup de pommes pour les transformer en alcool rectifié à 96°, mais elle distille des quantités très importantes de cidre qu'elle achète aux cultivateurs. Pour assurer son ravitaillement en pommes et en cidre, cette distillerie possède 15 wagons particuliers, 4 wagons réservoirs et 5 camions automobiles.
A titre documentaire, il n'est pas inutile d'ajouter que cette distillerie est actuellement exploitée par la Société Anonyme des Distilleries Réunies, dont le siège est 34, rue de Liége, à Paris, et dont fait partie également la Cidrerie de Cormeilles, plus importante encore que l'usine de Brécey, et la Distillerie de la Madone, à Puteaux, réservée à la rectification des flegmes. | ||||||||||
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La distillerie de Brécey année 1960 | ||||||||||