MORTAIN
  CC 28.04 DU MORTANAIS
   
  LA CHRISMALE 
         
 

Le chrismale de Mortain

Sa vie et son mystère

Léon Blouet

Annales de Normandie 1955

Coutances, éditions Nolra-Dame 1954.


M. le Chanoine Blouet consacre sa retraite prématurée dans la solitude de Bion à des travaux d'histoire et de spiritualité. Ses écrits révèlent une connaissance approfondie du passé de Mortain, dont il était jusqu'en 1948 le curé-archiprêtre.

 
 
         
 

Depuis déjà fort longtemps il s'intéressait au chrismale de Mortain et le petit volume de 62 pages qu'il vient de publier est le fruit de longues et patientes recherches. Le chrismale de Mortain est un petit coffret de hêtre recouvert de cuivre ouvragé et décoré sur l'une des faces d'un Christ Pantocrator encadré par les archanges Michel et Gabriel. Sur la face postérieure court sur trois lignes une inscription en caractères runiques. Connu depuis longtemps, le chrismale n'est devenu l'objet d'études vraiment scientifiques qu'en 1923 lorsque Maurice Cahen a réussi à traduire son inscription : « Que Dieu aide Eada, il ht ce Krismaal ». Cahen communiqua ses observations au savant norvégien Magnus Olsen, spécialiste des runes, et de leur collaboration sortit en 1930 un ouvrage capital L'Inscription runique du chrismale de Mortain. paru chez Champion. Ce livre, malheureusement introuvable, semble prouver d'une manière définitive Tusagc du coffret (réserve eucharistique portative), son origine (Norltiumbrie), son âge approximatif (lin vu'1 s.) et sa présence à Mortain où il a dû être rapporté d'Angleterre par le comte Robert de Mortain, demi-frère de Guillaume le Conquérant. Le Chanoine Blouet ne prétend pas renouveler le fonds linguistique et historique de la question ; il offre à ses lecteurs un résumé intelligent et instructif des déductions de Cahen et d'Olsen. Mais, non content de ce travail de vulgarisation, il s'efforce de replacer le chrismale dans son climat artistique et surtout (l'en faire ressortir la haute signification théologique. Ce n'est pas un simple porte-réserve eucharistique, c'est une « icône » avec toute la richesse que donnent à ce mot les Orientaux. De nombreuses photographies permettent lit comparaison avec des œuvres irlandaises, anglo-saxonnes, françaises et byzantines, similaires soit par l'époque, soit par la technique, soit par Tjconologie. On pourrait trouver, à premier abord, que l'auteur déborde du cadre de son sujet. En réalité, il réussit par ses digressions voulues à mieux nous faire sentir l'intérêt réel de cet objet unique en nous faisant revivre l'atmosphère dans laquelle il a été réalisé. Aussi peut-on décerner à la plaquette de M. le Chanoine Blouet le qualificatif élogieux de « didactique ».

 

 J. POUGHEOL.

 
     
 
 
         
   

Le chrismatorium ou chrismale de Mortain

 

               La sacristie de l’église possède un coffret de 135 millimètres de longueur sur 50 de largeur et 120 de hauteur. Il provient de l’ancienne collégiale de Saint Evroult. Sa boîte, en bois de hêtre, est revêtue à l’extérieur d’appliques de cuivre légèrement doré, le couvercle forme la toiture. Ce petit meuble, destiné à être suspendu au cou, au moins dans le principe, servir de Chrismatorium ou de récipient sacré dans lequel des prêtres itinérants transportaient des hosties. Il a été converti après coup en reliquaire. La plaque de face divisée en trois représente, au centre un christ de style byzantin, à droite l’ange Michaël SCSMIH, Sanctus Michaël, à gauche l’ange Gabriel SCSGAB, Santus Gabriel. D’après les travaux de M. Maurice Cahen, professeur à l’université de Strasbourg en 1923. il le croit unique en France et peut-être dans le monde, il devait servir à porter des hosties dans les tournées d’évangélisation des apôtres anglo-saxons et irlandais. Il fut sans doute apporté en France par un soldat normand, après la conquête de l’Angleterre, en 1066.