MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  LA FOIRE A LA FORGE COQUELIN
         
   
     

Une foire

 
         
 

La foire à la Forge Coquelin

Texte de Marcel Vauprés, extrait de la Voix des Clochers n° 81 de 1968

 

Situé à l'une des extrémités de la commune, sur la route d'Avranches à Mortain, le village de la « Forge Coquelin » a connu au siècle dernier une grande activité agricole. C’ est là que se tenait une des foires champêtres de cette contrée, vers le 20 septembre, un peu avant que ne finisse l'été et que ne commence l'automne. La moisson est terminée, les corvées de battage battent leur plein, les pommiers sont en pleine production. Dans tous les villages, on parle de ce voyage à la foire « à la Forge », et les parents promettent cela comme récompense à leurs enfants : « Fais bien ton travail si tu veux aller à la foire à la Forge ».

 

Avec le village du « Fréchot », celui de la Forge est composé de nombreux feux. Le jour de la foire, des gens de Montgothier, du Grand-Celland et de la Chapelle-Urée, partent très tôt le matin vers ce lieu de la foire. On s'est bien endimanché, les hommes ont mis leur plus belle blouse et par tous les chemins, on se dirige vers la foire qui se tient des deux côtés de la route, sous les pommiers et dans les champs. En venant du bourg de Montgothier  on prend le plus souvent le petit chemin sur la droite après le carrefour de la « Croix de la Datinière ».

 

C'est le jour où l'on va essayer de vendre le petit poulain, une des vaches de l'étable ou bien une « cagée » de petits cochons ainsi que des moutons de l'année. C'est déjà un beau remue-ménage dans tous les alentours ; on s'appelle, on s'invite à « boire un coup ». Les marchands, avec leur grande blouse et leur chapeau, sont là nombreux pour offrir leurs prix et les tractations vont durer une partie de la matinée.

 

Ce n'est pourtant pas la seule activité de cette foire, car dans un champ au bout d'un chemin creux, un cirque est venu planter sa tente et ses manèges. C'est la joie de tous les enfants des communes environnantes. On peut faire une partie de manège « à pas cher ». «  Je me souviens, dit un contemporain, avoir vu un gars de cirque tourner sur le ventre, perché au bout d'un mât. » On a donné un tout petit peu d'argent aux enfants pour acheter un « garot » ou une « torquette » à l'étalage du Père Boudet, cet excellent garotier de la Pesnière. On vendait alors le garot de 1 à 4 sous (50 francs anciens). Il ne fallait pourtant pas dépenser beaucoup, on n'était pas riche !  « Je te donne vingt sous, mais surtout, ne les dépense pas ! » disait une maman à sa petite fille ; « c'était la fête pour tout le monde ; nous  étions récompensés de la longue marche qu'il fallait effectuer pour arriver non loin des «  Hauts Vents », sur ce haut-lieu de Montgothier ».

 

Après avoir vendu leur bête, ou bien pour «  finir » le marché, les hommes s'attablaient sous un pommier, non loin d'un tonneau de cidre et l'on buvait cette boisson normande, à  « grandes moques ». C’était pratiquement la seule boisson vendue sur le champ de foire. De temps en temps, les hommes quittaient la table posée sur des tréteaux pour aller faire une  partie de « ballière » où l'on s'amusait à lancer la balle. C'était, bien entendu, le jeu des  enfants et des jeunes également.

 

Le temps passait ainsi, et il fallait songer au retour. Par petits groupes, les amis et voisins du village repartaient, chaussés de leurs beaux sabots résonnant sur les cailloux des chemins. Tout le monde était heureux et prenait le temps de l'être, et souvent, on chantait pour que la route paraisse moins longue, des chants qui avaient déjà égayé les veillées d'hiver. Les parents parlaient des affaires réalisées et de la foire de l'année suivante, ou bien aussi, de la récente  « Assemblée » qui s'était déroulée dans le bourg de Montgothier.

 

Les dernières années de cette foire, il n’y avait plus que trois tentes avec, près de chacune d'elles, un tonneau de cidre sur la voiture. On se souvient encore de la tente de François Rochefort, du  Grand-Celland. Il y avait également le café de la Mère Chenu, les loteries habituelles, le tir à la cible, les marchands de bonbons et de bibelots. Cette foire a duré jusqu'au début du XXe siècle. Ce serait en 1913, aussitôt avant la « Grande Guerre », qu’aurait disparu cette foire champêtre. Elle s’est estompée avec le développement de la ligne de chemin de fer, par le Pont-d'Oir, vers Domfront et vers les villes voisines. Il devenait alors plus facile de se rendre aux plus grandes foires d'Avranches et de Saint-Hilaire. Le soir, au coin du feu, pendant les longues veillées d'hiver, on parlait longtemps de la « Fère à la Forge ».

 
         
 

L’hymne des Forgerons

 

      1er Couplet

 

C'est aujourd'hui la Saint-Éloi.

Suivons tous la vieille loi.

La forge, il faut balayer (bis),

Les outils, il faut ramasser.

 

     2e Couplet

 

Allons au bourg promptement,

Monsieur le curé nous attend.

La Messe il faut écouter (bis)

Et celui qui va la chanter.

 

     3e Couplet

 

Nous voilà tous revenus.

Que cinquante coups soient bus.

Et de notre pain bénit (bis)

Nous en porterons au logis.

 

     4e Couplet

 

Nous allons fleurir le marteau

Et lui donner du vin sans eau.

Que nul ne fasse de bruit (bis)

Car nous allons dîner ici.

 

     5e Couplet

 

A la santé du marteleur,

Sans oublier son chauffeur,

Ainsi que le brave affineur (bis)

Qui travaillent tous avec coeur.

 

     6e Couplet

 

Les filles de notre canton

Aiment bien les Forgerons,

Elles n'ont pas peur du marteau (bis)

Quand dessus...............