MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  Seigneurie. Anciennes familles. Principaux villages
         
   
     
 

 

MÉMOIRES DE LA SOCIETE D'ARCHITECTURE

 

LITTÉRATURE, SCIENCES & ARTS

 

DES ARRONDISSEMENTS

 

D'AVRANCHES & DE MORTAIN

 

Années 1892 — 1893

 

 

MONTGOTHIER

Seigneurie. Anciennes familles. Principaux villages

 

Montgothier commune du canton d’Isigny, faisait autrefois partie du doyenné de Cuves, et pour le civil dépendait de l'élection et vicomte de Mortain. De 1718 à 1749 cette paroisse dépendit de la vicomte de Saint-Hilaire : elle était comprise dans la sergenterie Corbelin. L'église est sous l'invocation de Notre-Dame.

 

On trouve le nom de cette paroisse diversement écrit, Mansgoteri, Mans Gautheriiy Mons Walterii, Montgotes, Mont Gauthier ; c'est toujours le mont de Gauthier, et le mont appelé de Gautier fut probablement d'abord le Bouée qui est une des collines les plus élevées de la paroisse. Mais à quelle époque vivait le seigneur Gautier qui lui donna son nom, rien ne l'apprend non plus. Il y a un village portant le nom de Moinerie, et cependant il ne parait pas que jamais aucune abbaye ait possédé des terres en Montgothier depuis le Xk^ siècle. Dans ce cas, la Moinerie pourrait rappeler le souvenir d'un ancien monastère existant avant l'invasion des hommes du Nord, et, par la même, rappekr le lieu ou fut bâtie l'église primitive.

 

Au XIIeme siècle, Montgothier faisait partie de la baronnie des Biards; et vers 1180, Guillaume Âvenel seigneur des Biards, du consentement de ses fils Rolland, Nicolas et Olivier, fit présent à l'abbaye de Savigny de loo sols de rente annuelle sur son bois taillis de Montgothier, dont 60 sols furent donnés par les mains de Guillaume d'Astin (de Vezins), et de Guillaume du Fléchet (de Saint-Aubin-de-Terregatte), chevaliers, qui furent les témoins de cette donation.

 

Au XIIIeme siècle, le fief de Montgothier appartenait à des seigneurs Grimant qui avaient des possessions à Saint-Sénier-sous-Avranches, La Boulouze, le Grand-Celland, Mesnilozenne. On voit paraître plusieurs seigneurs de ce nom aux assises d'Avranches. On y trouve en 12 16, Willaume et Roger Grimant, en 1218, Eudes et Roger Grimaut; en 1221  1225, Eudes et Robert Grimaut. Un titre du XIIIeme siècle porte que le Roi ayant présenté pour Téglise de Montgothier un prêtre nommé Thomas de Forges, Grimaut de Montgothier écuyer, fit opposition assurant que la présentation de cette église lui appartenait; et ce seigneur Grimaut fut reconnu patron présentateur.

 

Vers le milieu du xni* siècle, le fief de Montgothier passa dans une famille de Combray. On trouve vers 1250 Nicolas de Combray seigneur de Montgauthier chevalier, faisant une donation au prieuré du Plessis-Grimoult. Richard de Combray seigneur de Montgauthier vivait en 1296, Jean de Combray seigneur de Montgauthier écuyer, vivait en 13 18 ; ces de Combray étaient de la même famille que les de Combray seigneurs de Sacey. En 1469, Montfault trouva noble à Montgothier Jehan de Montgauthier; c'était un descendant des de Combray qui peu à peu avaient pris le nom de la paroisse où ils résidaient.

 

Vers 1 520, le seigneur de Montgothier était Yves de Billeheust, fils de Jean de Billeheust, né à Saint-Pair-le-Servain ; mais il ne laissa qu'un fils nommé Arthur qui mourut sans postérité. Alors la seigneurie passa dans la famille de Gouyn. On trouve en 1676 Charles de Gouyn seigneur de Montgothier, en 1729 et 1736 Jean de Gouyn seigneur de Montgothier. De la famille de Gouyn elle passa vers le milieu du siècle à M. d'Atys qui était seigneur de Montgothier en 1749, et de M. d'Atys dans la famille du Quesnoy. On trouve en 1771 et en 1783 Mme Françoise de Verdun, veuve de messire Jean-Angélique du Quesnoy chevalier de Saint-Louis, seigneur d'Apilly, dame de Montgothier.

 

Le château de Montgothier existe encore ; il est situé à une certaine distance de l'église, près de la rivière d'Oir, du côté de Marcilly.

 

Parmi les noms anciens dans la paroisse de Montgothier, on peut citer les suivants : Boudet, (jadis très nombreux), Piquois, PouUain, Le Guérinais, Hardy, Hamelin, Maillard, Le Meteyer, La Chapelain, Loyson, Lebocey, Barbé.

 

Les principaux villages sont : la Forge-Coquelin (en partie) la Châterie, la Gueudîère, la Datinière, la Bouvrie, les Portes, la Petitière, la Moinerie, la Guérinière, les Forges, la Goronnière, le Laisier, le Tertre, la Chabotière la Tonnellerie, la Pollerie, la Métairie, la Poulinière, le Château, etc. Il y a au Bouée d'assez beau granit^ mais l'accès des carrières est difficile.

 

Curés de Montgothier de 1611 à 1790.

Revenus et charges de la cure

 

François Abraham, curé de Montgothier, décéda en 1600. François Auvray, clerc du diocèse, fut nommé le 8 juillet 1611.

 

Nicolas Gaudin décéda en 1676.

 

René le Prieur, curé de la Gohannière, doyen rural de Tirepied, fut nommé le 16 novembre 1676. C'était un des prêtres les plus remarquables du diocèse par sa science et sa piété. Etant allé à Paris après son ordination, pour y compléter ses études théologiques, il avait assisté plusieurs fois aux prédications du Père Jean Eudes, et de concert avec Michel Anger, jeune prêtre de Vengeons, il avait pris le parti de revenir dans son diocèse pour travailler à y faire ce que le vénérable Eudes faisait à Paris. Deux pensées le dominèrent toujours, il avait i cœur l'Œuvre des Missions, et spécialement encore la réforme du Clergé par l’éducation de ceux qui aspiraient au sacerdoce. Dès 1666, étant curé de la Gohannière et doyen rural de Tire-pied» il s'associa avec M. Gombert» curé de Saint-Martin-des- Champs, pour fonder un séminaire à Avranches, avec l'agrémont de i'Evèque. Mais diver$ obstacles qui s'opposèrent assez longtemps à l'érection régulière et durable de ce séminaire, le déterminèrent à rester dans sa cure de la Gohannière, où avec l'assentiment de I'Evèque il réunit plusieurs jeunes gens pour les préparer à la réception des saints ordres, œuvre qu'il continua, lorsqu'il fut curé de Montgothier. Ce saint prêtre mourut vers 1695, laissant une mémoire très vénérée. On ne tarda pas à faire des pèlerinages à son tombeau pour obtenir la guérison de certaines maladies. Le culte qu'on lui rendait ainsi n'étant qu'un culte privé, n'avait rien de contraire aux règles de l'Eglise, cependant des curés trop zélés peut-être essayèrent de l'empêcher, dispersèrent même les personnes qui venaient prier auprès de ce tombeau. Les pèlerinages n'en devinrent que plus fréquents, mais au lieu de se faire en jour, ils commencèrent à se faire la nuit. Par suite, il s'est introduit dans ces pèlerinages qui se £9nt encore quelques fois^ des pratiques assez superstitieuses.

 

Pierre Vaullegeard, prêtre de Sourdeval, frère de M. Julien VauUegeard curé de Champcey doyen-rural de Genêts, fut nommé curé vers 1695, ^^ mourut en 1729.

 

Julien de TOsscndière, prêtre de Saint-Cyr-du-Bailleul, vicaire de Sainte-Marie^u-Bois, fut nommé le 12 mai 1729 et décéda en 1736.

 

Julien CoUibeaux, prêtre de Bareoton, bachelier en théologie de la faculté de Paris, curé de Beauvoir depuis 1754, fut nommé le 12 mars 1736. Le 10 juin 1749, Mgr Durand de Missy donna la confirmation ' à Montgothier et fit la visite de l'église. Il y avait trois calices d'argent ; les ornements étaient convenables, \ts fondations bien acquittées, les titres et papiers bien en règle ; l'église était en bon état ainsi que les chapelles de saint Mathurin à droite et de saint Laurent à gauche ; tous les livres étaient encore rotnains. Le revenu du trésor était de 78 livres^ celui des fondations de 200 livres. Le sieur Jean Lelandais tenait l'école des garçons^ Thomasse Rendu celle des filles. M. d'Âtys était alors seigneur de Mootgpthier et ce fut lui qui reçut l'évèque dans son château. Julien CoUibeaux décéda en 1756.

 

Laurent-François Leprieur, prêtre des Biards, présenté par M. d'Atys, fut nommé le 13 octobre 1756. En 1764, il avait pour vicaire Michel Leprieur, et la maîtresse d'école était Claude Anfray. — Laurent Leprieur mourut en 1771.

 

Jean-Henri Duchemin, prêtre de N.-D.-des-Champs, présenté par Anne-Simonne-Françoise de Verdun, veuve de J.-B. -Angélique du Qjiesnoy, seigneur d'Âpilly, dame et patronne de Montgothier, fut nommé le 3 septembre 1771 et mourut en 1783.

 

Louis Guyon, pirêtre de N.-D.-des-Champs, ancien vicaire de Saint-Oven, titulaire de la chapelle de la Paumerie en cette paroisse, fut nommé le 30 mai 1783.

 

Le curé de Montgothier jouissait de toutes les dîmes de la paroisse et des aumônes qui étaient assez considérables, mais il était tenu à fournir le traitement d'un vicaire, à l'entretien et aux réparations du choeur de l'église. En 1648, le revenu du bénéfice était évalué à 400 livres; en 1774 à 14 ou 1500 livres. En 1787 et 1788, le curé paya chaque année 200 livres de décimes. Dans sa déclaration du 15 novembre 1790, M. Goyon évaluait son bénéfice à un revenu de 2. 500 livres. Le Directoire du district de Mortain réduisit son traitement à 1.295 Uvres et accorda en plus celui d'un vicaire. La population était alors de 588 habitants.

 

Montgothier de 1791 à 1800.

Conduite du clergé

Esprit de la population

 

Le curé était M. Louis Guyon. M. Jean Trochon de Saint-Oven remplissait les fonctions de vicaire et de maître d'école depuis 1771. M. Pierre-François Hardy, ordonné prêtre en 1789, était resté dans sa famille depuis lors et n'exerçait aucune fonction.,

 

Ces trois prêtres refusèrent le serment schismatique, restèrent dans la paroisse, aussi longtemps que cela fut possible, passèrent à Jersey en septembre 1792 et de là en Angleterre.

 

On dirait quelquefois que les noms influent sur la conduite de ceux qui les portent ; le curé que le suffrage des électeurs porta à la cure de Montgothier se nommait Pierre Patouil. Né à Saint-Georges-de-Rouelley, il avait été ordonné prêtre en 1779; et depuis lors, avait exercé divers ministères, aux Biards, à Saint-Laurent-de-Terregatte, à Buais, à Saint-Georges-de-Rouelley; depuis quelques années il était parti dans le diocèse du Mans. Il arriva à Montgothier en juillet 1791 ; et si l'on excepte une demi-douzaine de patriotes, personne ne fréquenta ses offices^ Comme il ne se montrait pas persécuteur, on le laissa tranquille dans l'exercice de ses fonctions, et il les exerça jusqu'en 1793 ; à cette époque, il annonça à ses rares auditeurs que le citoyen Pierre Patouil allait contracter mariage, ce qu'il fit en effet en présence du maire ; il resta cependant dans la paroisse jusqu'en 1795, et le i**" pluviôse an m il fut pris volant du blé dans une grange, par les propriétaires de cette grange Nicolas et Jean Lebocey et deux de leurs domestiques, Jean Barbé et Pierre Couëtil. Conduit devant le juge de paix de Pain-d'Aveine, il fut envoyé de là devant les juges du district de Moruin et condamné à plusieurs mois de prison. Mis en liberté.

 

Il se retira au Neufbourg et y resta jusqu'à Tan vit. Dans ce temps, il alla définitivement se fixer à Saint-Georges-de-Rouchey où il se fit tisserand pour gagner sa vie. Devenu libre en 1842 par la mort de sa concubine, il fit une rétractation publique dans l’église de Saint-Georges, et demanda pardon de tous les scandales qu'il avait donnés. U mourut Tannée suivante âgé de 88 ans, dans des sentiments chrétiens.

 

La conduite du curé intrus de Montgothier n'était pas de nature à concilier les habitants au schisme. Elle ne fit que confirmer dans la foi ceux qui d'abord s'étaient montrés chancelants. Dominés par la crainte de tout ce qu'ils voyaient et entendaient, les habitants ne furent ni républicains ni royalistes ; ils visaient à n'attirer sur eux l'attention ni des uns ni des autres. Les prêtres fidèles ne cherchèrent point asile parmi eux ; cependant ils ne furent point dépourvus de secours. Il y en avait plusieurs qui se cachaient dans les paroisses voisines, et qui vinrent à Montgothier aussi souvent que leur présence y fut nécessaire. Un jeune homme de la paroisse, Claude Le Chapelain, très fervent chrétien, allait les avertir quand il y avait des malades, et les conduisait par les chemins les plus sûrs ; il exposa souvent sa vie pour la cause de la religion et rendit d'incontestables services.

 

Cinq prêtres fidèles exercèrent le ministère dans la paroisse pendant les plus mauvais jours; ce furent MM. François Mondin de la Godefroy, René Prével des Biards, Henri Girois de Saint- Georges-de-Rouelley, Louis-Noël Chapel de Notre-Dame-de-Livoye et Louis- Jean Hardelé de Ducey. Ce fut ce dernier qui exerça le ministère le plus important. Caché à La Mancellière, tantôt au Champ-Hue, chez un tisserand, tantôt au Coudray près de Montgothier, il venait très souvent dans la paroisse, mais habituellement il n'y célébrait pas la messe, et les fidèles allaient y assister soit au Coudray, soit au Champ-Hue.

 

Au commencement de uf93, Téglise qui avait été déjà dépouillée par ordre du distriA fut fermée; on en enleva quelques statues, mais elle ne fut ni profanée ni dévastée ; un républicain de la paroisse qui dès 1791 avait acheté les aumônes de la cure, acheta aussi le presbytère vers 1794. Il n'y eut d'ailleurs aucun trouble notable, aucun grand désordre ; pendant presque toute la Révolution, la sœur Leboccy tint réguUèrement l'école dans une boulangerie à peu de distance de l'église.

 

Montgothier depuis 1800

 

M. Hardelé rouvrit l'église de Montgothier au mois d'avril tSoo. Son premier acte est du 25 août; mais quelques feuillets du registre ont disparu. Il desservit la paroisse à titre provisoire jusqu'au retour de M. Guyon. Son dernier acte est du 25 février 1802. Nommé alors curé de Saint-Jean-le-Thomas, il resta peu de temps dans cette paroisse et alla se retirer aux environs de Rennes, où il mourut au bout de quelques années. M. Guyon rentra vers le mois de février 1802, Comme il n'y avait plus de presbytère, il alla habiter l'ancien château situé à un kilomètre et demi de l'église et qui déjà tombait presque en ruines. H mourut le 3 avril 1806 et eut pour successeur M. César-Jean Davalis, né au Buat en 1767. M. Davalis, ordonné diacre le 20 mars 1790, avait émigré à Jersey au mois d'août 1792 ; mais dès le 26 novembre de la même année, il obtint du directoire du département la permission de rentrer en France, moyennant qu'il signerait la promesse de se présenter à toute réquisition. Etant donc rentré en France, il alla demeurer à Saint-Malo dans une maison de commerce; de là il se rendit à Paris vers 1797, et y reçut la prêtrise des mains de Mgr de Maillé de la Tour Landry, ancien évêque de Saint-Papoul, et aussitôt après revint au Buat. Mais il ne tarda pas à être arrêté et incarcéré au MontLibre. Remis en liberté vers 1799, il exerça le ministère dans différentes paroisses, tantôt ouvertement tantôt en se cachant, suivant que les circonstances l'exigeaient. Nommé curé de Montgothier en i8o£, il y travailla avec un grand zèle à réparer les ruines de la Révolution. C'est sous son administration que le presbytère actuel fut construit; mais il feut le dire, il a été augmenté et notablement modifié depuis. Une mort prématurée enleva M. Davalis à l'affection de ses paroissiens, le 23 avril 1812.

 

M. Trochon, ancien vicaire de Montgothier, avait été nommé curé de Saint-Oven, et il y était mort le lo juin 1806.

 

M. Hardy, resté en Angleterre, reparut une fois à Montgothier sous l'administration de M. Adelée et après y avoir passé quelques semaines s'en retourna en Angleterre, où il mourut longtemps après.

 

Aujourd'hui, le presbytère et les écoles de Montgothier sont dans un état convenable; mais il n'en est pas de même de l'église. On a le projet d'en bâtir une nouvelle, et il est bien à désirer que le projet soit mis à exécution.

 

L. C.

 
         
   
     
   
 

MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

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  HISTOIRE
         
   
     

Montgothier

 
 

MONTGOTHIER Isigny le Buat

Publié par Georges DODEMAN

g.dodeman@wanadoo.fr

 

Cette petite paroisse sur la lisière Sud de l’anticlinal d’Avranches prospéra sans doute lors des grands défrichements du XIe siècle, se trouvant proche d’un itinéraire antique (la fameuse voie de Brunehaut allant de Sées à Avranches) et d’un gué-péage où se trouvaient tout à la fois l’église et une fortification matérialisée par le manoir du XVIe siècle situé à l’Est de l’église, le château du Logis venant prendre la suite.

 

Comme toutes les paroisses de l’époque, sa situation fut très confuse parce qu’au plan religieux elle relevait du doyenné de Cuves alors que pour le civil elle dépendait de l’élection-vicomté de Mortain…et même un moment (1718-1749) de celle de Saint-Hilaire-du-Harcouët.

 

Sur le plan féodal, elle faisait, au XIIe siècle, partie de la puissante baronnie des Biards, au XIIIe siècle aux Grimault également seigneurs de la Boulouze, Saint-Senier, le Mesnil-Ozenne. Le fief passa ensuite jusqu’en 1469 aux de Combray (de la famille des sieurs de Sacey près Pontorson) date à laquelle la recherche de Montfault note un Jehan de Montgothier, en fait un de Combray qui avait fini par prendre le nom de la paroisse où ses ancêtres résidaient depuis plusieurs générations. En 1520, elle était aux de Billeheust, sans descendance, puis aux Abraham et aux Gouin (entre 1653 et 1663 sans doute par succession) qui réunirent le fief avec celui d’Athys (voir notre article sur le manoir du Logis), et enfin vers 1771 aux de Verdun par mariage.

 

Les archives paroissiales ont gardé trace des curés depuis François Abraham (décédé en  1611), François Auvray, Nicolas Gaudin (jusqu’en 1676) et à cette date, René Le Prieur qui, décédé en 1695, mourut en odeur de sainteté. Il fut un des fondateurs du séminaire d’Avranches et on venait même en pèlerinage sur sa tombe, même de nuit, car certains de ses successeurs trop zélés (ou jaloux !) dispersaient les fidèles qui venaient y faire leurs dévotions. Sa tombe est toujours visible dans le cimetière aux côtés d’autres tout aussi remarquables (voir article sur les tombes remarquables du cimetière). Ses successeurs furent : Pierre Vaullegeard (1691-1729), Julien de l’Ossendière (1729-1736), Julien Collibeaux de 1736 à 1756.

 

La visite de l’évêque Mgr Durand de Missy le 10 juin 1746 montre une église en bon état (elle est en pleine réfection), de même que les chapelles adjacentes (Saint-Laurent et Saint-Mathurin). Il y a déjà deux écoles, celle des garçons tenue par Jean Lelandais et celle des filles par Thomasse Rendu. Le seigneur est M. d’Athys qui vient de construire (autour de 1728) le nouveau château où il reçoit d’ailleurs le prélat.

 

En 1783, il y a 588 habitants et c’est une grande cure dont le revenu atteint 2500 livres car elle possède toutes les grosses dîmes et jouit de nombreuses aumônes et propriétés. Le curé Louis Guyon est assisté du vicaire Jean Trochon qui tient l’école depuis 1771. A la Révolution, l’un comme l’autre, de même que Pierre Hardy ordonné en 1789 qui attendait une affectation dans sa famille, refusent la constitution civile du clergé et s’exilent à Jersey en 1792.

 

En juillet 1791, arrive le curé « intrus » (c’est-à-dire nommé par la Convention) Pierre Patouil, originaire de Saint-Georges-de-Rouelley, en provenance du Mans, lequel convainc peu de fidèles car…il se marie en 1793…et se retrouve même condamné un peu plus tard pour vol ! Ce sont donc les prêtres réfractaires de la région, en particulier Louis Hardelé de Ducey, souvent caché à la Mancellière, qui administrent le culte. C’est d’ailleurs lui qui ouvrira l’église en 1800, celle-ci n’ayant été que peu dépouillée ni profanée ni dévastée. Nommé à Saint-Jean-le-Thomas en 1802, il cède la place à l’abbé Guyon revenu de son exil et qui doit habiter l’ancien château quasi en ruines (le presbytère ayant été vendu comme bien national). Décédé en 1806, c’est l’abbé César Davalis (décédé en 1812) qui fit construire le nouveau presbytère.

 

Pendant toute la Révolution, la sœur Lebocey tint toutefois l’école dans une vieille boulangerie près de l’église montrant que, malgré tout, la commune ne pâtit que peu des évènements de la tourmente révolutionnaire.

 

Montgothier au XIXe siècle et jusqu’à la Grande Guerre

 

Les archives municipales démarrant en 1812 nous montrent le maire Adrien Hamelin prêtant successivement serment à l’Empire, à la Seconde République, au Roi des Français, et même au Troisième Empire puisqu’il ne sera remplacé à la tête de la commune par Paul Dubois, maire et conseiller général, qu’en 1859. Un long bail donc où, comme tous les élus de l’époque, il lui faudra faire l’apprentissage d’un fonctionnement différent de celui de l’ancienne paroisse de l’Ancien Régime. Les conseils municipaux, restreints à l’époque, se doublent des dix « haut cotisés » ou encore propriétaires « adjoints » aux décisions locales car ce sont les principaux contribuables de la commune.

 

La première préoccupation du moment demeure les chemins ruraux : ceux du bourg, de la Guérinière, de la Forge-Coquelin ou ceux de plus grande importance comme Avranches-Saint-Hilaire par la Forge-Coquelin ; il faut de toute façon faire effectuer de grandes corvées comme, par exemple, 30 journées de voitures à trois chevaux pour la seule année 1817. Le budget de la commune est englouti dans ces dépenses essentielles (comme le montrent bien les comptes rendus des délibérations) au profit du développement de l’agriculture qui mobilise toute la province normande après les affres de la Révolution et de l’Empire, où toute l’activité économique a été stoppée pendant vingt ans.

 

A partir des années 1830, l’instruction devient prioritaire. En 1831, le nombre d’enfants à accueillir dépasse la cinquantaine dont 8 pauvres, à titre gratuit. Il n’y a pas encore de local spécifique car trop cher à construire. On loue donc ! Mais à partir de 1833, avec la création du comité local d’instruction primaire et le nombre d’enfants qui a augmenté (83) sans doute parce qu’il faut accueillir une partie de ceux de la Mancellière, on commence à penser à une construction ex nihilo, d’autant qu’en 1839, le nombre d’habitants (662) incline à penser aussi à l’instruction des jeunes filles. En 1840, sur un budget communal de 3.000 F environ, le fonctionnement des écoles filles et garçons ponctionne déjà 500 F, et en 1849, on planche sur le projet de construction d’une école spécifique qui  ne sera vraiment opérationnelle qu’en 1856 et coûtera 3 400 F.

 

A partir de 1859, la municipalité de Paul Dubois devra revenir sur les chemins (la Moinerie, notamment, reliant les routes Avranches-Isigny-Mortain), entreprendre l’enquête sur l’arrivée du chemin de fer dans la région (1863), lutter contre la pauvreté (18 indigents dont 8 mendiants « actifs » en 1862) et reprendre, en 1865, les relations qui commencent à se tendre avec la cure à propos du presbytère jugé « pitoyable et insuffisant » et pour lequel la Fabrique demande une aide de 2.000 F soit près de la moitié du budget de la commune !

 

Nous sommes à cette époque dans une tendance qui va amener vers la séparation de l’Eglise et de l’Etat au début du siècle suivant (1905-1906) mais qui démarre dans cette ambiguïté : les communes doivent entretenir désormais les bâtiments aux côtés de la « Fabrique » qui administre et gère les biens de l’Eglise mais avec ses fonds propres : rentes, legs, produits du casuel, des obits, des messes, toutes ressources plus ou moins frappées du soupçon d’un manque de sincérité vite avancé par les maires pris par d’autres soucis financiers (écoles, chemins comme on l’a évoqué précédemment).

 

La commune doit aussi prévoir l’entretien du vicaire, pas toujours présent comme à Montgothier où, dès 1839, on se plaint justement d’une carence qui obère la rentrée des messes et obits (frais de sépulture). Or, en 1874, il n’est toujours pas là ou seulement par intermittence, ce qui amène des frictions car la commune affecte la somme prévue à autre chose comme, par exemple, l’exécution des travaux urgents à l’école des filles, et ce, au grand dam de la cure.

 

Les municipalités suivantes de Romain Piquois (1869-1885), et surtout de René Piquois (1885-1888) seront emblématiques de cette époque qui verra le ton monter dans les relations entre la cure et la mairie à peu près dans toutes les communes. Il faut aussi comprendre les élus ; début 1880, la commune est en plein boom avec le passage à proximité de la ligne de chemin de fer ; en 1891, la construction de son école des filles est engagée (17.500 F, l’Etat ne donnant que la moitié, les frais de fonctionnement s’élevant à 2.150 F pour un budget communal de seulement 5.000 F dont 1.300 F de chemins) ; il faut tenir compte également de l’importance des quatre sites de carrières au Bouée à raccorder à la voirie et voilà que tout à coup, le curé demande des travaux urgents au presbytère, bâtiment quasiment neuf (6 ans d’âge) et dont la construction avait été effectuée sous sa direction : « le curé veut vexer la commune » signale le registre.

 

Sous Emile Lechat (1888-1904), la commune a dû fortement emprunter pour les écoles (construction de l’école des filles en 1891) et il faut même lancer une souscription spéciale pour ouvrir un chemin important qui va de la Chapelle-Urée à la gare du Pont d’Oir. On imagine donc comment le conseil accueille en 1891 la belle idée du curé Lecoq…de refaire à neuf son église ! Il y en a pour 48 000 F (le budget communal est à l’époque de 11 000 F), la fabrique peine à aligner 23 000 F, le curé promet de trouver des souscriptions…en nature ! On frôle la provocation, le conseil la joue fine, gagne du temps (quid des concessions perpétuelles du cimetière qu’il faudra éjecter on ne sait où par exemple !), fait état de ressources fabriciennes pas forcément « certaines », sinon sincères… Et quand cette dernière amène enfin ses comptes, il est facile pour les édiles de faire remarquer qu’il y a eu négligence sur l’entretien de certains bâtiments qu’elle occupe et donc une autre urgence à prévoir que de construire une belle église toute neuve à la place de l’ancienne. Le curé Lecoq lui-même se retrouve un peu coincé quand on lui démontre qu’il occupe indûment depuis 25 ans un bien communal qui lui avait été soi-disant donné par les anciennes municipalités ! On doit donc à toutes ces bisbilles qui nous font maintenant sourire, d’avoir conservé telle qu’elle était autrefois, la charmante petite église typique de Montgothier et surtout entourée de son cimetière et de ses tombes antiques dont nous parlons plus loin. Mais revers de la médaille, de cette époque (les municipalités citées plus haut ainsi que celles de Pierre Lemetayer de 1904 à 1917 avec comme adjoint Victor Maillard) datent les clivages entre "gens du haut" et "gens du bas", laïcs contre « calotins », avec comme point d’orgue les fameux « inventaires » et des ressentiments de factions municipales qui ont même duré jusque dans l’après-guerre.

 

L’entrée dans le XXe siècle

 

Les débuts du XXe siècle nous sont bien connus par le rapport de 1913 qu’effectuaient tous les instituteurs à l’Académie et qui fourmillent de détails importants, lesquels permettent de bien saisir la vie de la petite bourgade.

 

Sur ses 578 habitants, 514 sont agriculteurs et on se lamente de la quasi disparition désormais des 60 ouvriers taillant le granit sur les quatre sites du Bouée et qui sont tous partis offrir leurs bras sur Saint-Pois, Coulouvray et même jusqu’à Vire. Trente ans après cet âge d’or, ils ne sont plus que quatre auxquels il faut ajouter les 6 occupés à extraire de la pierre à chemins. Ce qui explique donc que les commerces soient, à la veille de la Grande Guerre, encore assez restreints : pas de boulanger (un dépôt de pain néanmoins), une épicerie-mercerie, deux aubergistes, un cordonnier-coiffeur, pas de boucher, la viande étant apportée seulement le samedi par l’étal ambulant d’un boucher venu de Reffuveille. C’est assurément un « luxe » dans une commune où, on l’a vu, l’agriculture est reine et a pas mal progressé : de 1870 à 1913, sur les 720 hectares de terre agricole, les terres incultes sont passées de 107 à 30 hectares. Il y a à peu près autant de propriétaires que de fermiers (46 contre 44) qui se modernisent bien les dix années précédentes où l’on note la présence de 12 charrues-brabant contre 2, ou encore 15 machines à battre contre 5. Les céréales se taillent, bien sûr, la part du lion (480 hectares), loin devant les 35 hectares de « plants » de pommiers qui fournissent quand même 9000 hl de pommes, livrées pour l’excédent comme toutes les communes voisines (voir Chalandrey par exemple) à la gare du Pont d’Oir. Bien sûr « à quelques exceptions près » comme le signale l’instituteur, « tout le monde distille » ce qui expliquera la participation du conseil municipal et de la population au grand mouvement de défense des bouilleurs de cru de 1935. Dans cette période (et jusqu’environ 1955), bien sûr le cheval est roi : il y en a 172 sur la commune ; 580 bovins, 175 porcs, 210 moutons, 2 000 poules, 200 oies, 180 canards, 200 lapins…ce qui explique comme on l’a vu, les apparitions seulement hebdomadaires du boucher de Reffuveille sur la place du village le samedi.

 

Curieusement, il n’y a plus que 5 journaliers (payés environ 400 F l’an), 3 chasseurs, mais une centaine de ruches sur le territoire de la commune, ce qui s’explique par leur rapport intéressant de 750 F par an à rapprocher de la location moyenne annuelle à l’hectare qui était de 75 F ou du prix du pain (0,38 F le kg). Par contre, malgré l’exemple de solidarité venu d’en haut on peine à s’organiser collectivement, banques et assurances ont du mal à s’implanter, les emprunts pour investir se faisant « à la petite semaine » auprès d’usuriers qui exploitent les paysans.

 

La fin du XXe siècle relancée par la fusion de 1973

 

Ce siècle, c'est bien connu pour tous les historiens, commence à la fin de la Grande Guerre qui, ici comme partout autour, moissonna une grande part des hommes dans la fleur de l'âge : 29 morts sur la stèle commémorative.

 

Montgothier, sous la municipalité de Victor Pinard (27/11/1917 au 7/04/1930) assisté de son adjoint Victor Maillard, n'avait plus que 381 habitants et semblait avoir laissé passer sa chance quand les 70 carriers du Bouée étaient partis sous d'autres cieux, la plupart vers les nouveaux filons rocheux plus facilement exploitables, de Saint-Pois, Gathemo et Coulouvray.

Seule la gare du Pont d'Oir paraissait être une carte à jouer importante, notamment pour l'écoulement des produits agricoles (pommes entre autres), quand le mouvement des bouilleurs de cru vint tétaniser le monde agricole. Le conseil en bloc avait donc démissionné comme des centaines d'autres élus du Mortainais. Le phénomène de la « goutte » n'avait certes pas ici l'ampleur de ce qu'on voyait aux limites du département, vers Barenton, mais il y avait un atelier public de distillation à la Houstière et 3 à 4 bouillottes privées issues des grosses fermes. La distillation y était réglementée.

 

Victor Maillard (maire du 30/06/1930 au 7/12/1941) avait succédé en 1930 à Louis Datin (maire du 7/04/1930 au 30/06/1930), La Seconde Guerre mondiale sous la municipalité de Paul Vauprés (7/12/1941 au 28/01/1945) surprit donc la petite commune dans ce climat économique et moral morose. Les Allemands s'installèrent, notamment les terribles « feldgendarmes » avec leur hausse-col de métal, dans les écoles, la mairie, le presbytère ; ils se dispersaient dans les fermes avoisinantes pour chercher, souvent manu militari, de la subsistance, œufs et goutte notamment.

 

ans un bombardement nocturne (8 au 9 août 1944) lié à la bataille de Mortain par un avion allemand isolé. Peut-être simplement un avion en difficulté ayant largué ses bombes à l'aveugle puisqu'il n'y avait aucun objectif militaire à cet endroit, proche néanmoins des combats du Pont d'Oir quelques jours plus tôt.

 

Par ailleurs, la commune eut encore à déplorer quatre victimes militaires, soit dans la campagne de France, soit dans les stalags : Ernest Jourdain, Émilien Lechat, Albert Trochon et Marcel Letourneur.

 

La Libération, on le comprend, fut donc la bienvenue, Paul Vauprés, révoqué un moment comme tous les maires qui avaient servi sous Vichy et remplacé quelques mois par François Lehéricey (28/01/1945 au 20/05/1945) reprenant sa place (du 20/05/1945 au 15/02/1946). Eugène Morin lui succédera du 15/02/1946 au 31/10/1947, pour lancer la commune dans l'après-guerre.

 

Les personnages emblématiques de l'époque furent le curé Henri  Le Grand nommé le 19/08/1945 (qui fêta ici son jubilé d’argent sacerdotal en 1961), Charles Calvary secrétaire de mairie, les instituteurs Vialas et Mme Valet qui, en 1949, accueillirent le sous-préfet lequel trouva l'école de garçons trop petite et en mauvais état.

 

Sous la municipalité d’Albert Lemétayer (31/10/1947 au 15/05/1953 avec comme adjoint Louis Alexandre) une nouvelle réflexion (voir notre chapitre écoles) s'entama donc sur le sujet brûlant des écoles… depuis près de 100 ans. Il y eut, en 1952, deux projets d'implantation sur des terrains concurrents : celui de Maurice Lemétayer sur lequel était implantée la maison habitée par Maurice Faure et qui avait la faveur du maire, ou celui de Lejemble, exploité par Jamont et proposé par Paul Vauprés.  La campagne des municipales de 1953 fut des plus animées, Louis Alexandre devant faire fonction de maire du 23/05 au 13/06 après 7 tours improductifs, puis s’effacer (tout en restant adjoint) quelques mois plus tard, devant Paul Vauprés (maire 13/06/1953 au 27/01/1968).

 

On changea alors l’affectation des terrains dans une ambiance tendue ! Ce n'est qu'en 1955-1956 que la situation se tassa avec, il est vrai, d'autres chats à fouetter, comme l'adduction d'eau et couronnant cette période d'apaisement, l'inauguration fin 1958 tout à la fois de la mairie, du groupe scolaire, des chemins du Grand-Vaudoir et de la Chabottière.

 

En 1963, une exceptionnelle tornade causa beaucoup de dégâts (notamment sur l'exploitation Léon au Domaine) et l'année suivante l'adhésion au Syndicat intercommunal à vocation multiples lança, comme partout ailleurs, le début d'une réflexion sur une association plus grande encore qui déboucha, on le verra ailleurs dans ce livre, sur l'association générale des communes à l'orée des seventies ici sous les municipalités de Louis Alexandre (27/01/1968 au 13/04/1971), puis de Pierre Julien (13/04/1971 au 31/03/1977).

 

Cette période (333 habitants en 1971) fut aussi celle d'un vaste bouleversement socio-économique. Les deux commerces (Dodeman et Derolez) fermèrent tour à tour après 1976, et Paul Vauprés fils, élu en 1977 (31/03/1977 au 24/03/1989), eut à gérer les débuts de la commune-canton (accord en 1972 finalisé le 1er janvier 1973), le remembrement (1982), la première fermeture de classe (1983) avec le départ de Mme Gastebois puis la fermeture définitive avec Mme Penven le 6/07/1985, entraînant la dissolution de l’Association des Parents d’Élèves, transformée l’année suivante en comité d’animation.

 

Les regards se tournèrent bien sûr dans toute cette période sur les réalisations aussi nombreuses que spectaculaires de la commune-canton sur deux décades prodigieuses (1973-1993) que nous développons par ailleurs.

 

Montgothier n'en continua pas moins de vaquer son petit bonhomme de chemin (accueil des cascadeurs Fermax en 1988-1989), et de mener sous la mandature Alain Derolez (du 24/03/1989 à 2008) quelques dossiers importants pour la commune, comme l'ouverture de la salle communale (1991) dans l’ancienne école, la création du plan d'eau (1991), les 4 logements H.L.M du Bourg (1995), le sentier pédestre du bourg au Bouée (1998), l’aménagement du bourg (2006). Quand démarrèrent en 1994, et pour une bonne décennie, les Féeriques au château du Logis, le nom de Montgothier se fit connaître bien au-delà des limites de la commune !

 

Jean-Paul Vauprés, élu en 2008, fait un point lucide de la situation actuelle de son petit bourg : « Nous sommes stables depuis 2005 sur une population de 250-260 habitants. Même chose pour l'agriculture avec une dizaine d'exploitations mais dont la concentration s'est accentuée, la moyenne étant actuellement de 90 hectares quand elle était d'une douzaine en 1970. Pour le logement, P.L.U et S.C.O.T ont limité les zones constructibles, c'est ok pour la réhabilitation d'anciens bâtiments, par contre il n’est plus possible de construire ailleurs qu'autour du bourg. Ce qui nous inquiète ? La réforme territoriale qui risque de nous rapprocher d'Avranches et surtout, le nouveau mode électoral qui va tout bouleverser : au lieu de notre vote communal initial, des listes bloquées de 23 avec la parité sur l'ensemble du canton. Quid des maires-délégués et de l'entité commune, cellule de base, après la famille, de notre société ? Quarante ans après la commune-canton, on risque de faire disparaître, et sans consultation de la population, l'évolution harmonieuse que nous étions parvenus à instaurer »

 
     
   
     
   
 

MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  LES CARRIERES DE GRANIT
         
   
     

Carriers

 
 

Les carrières de granit sur « le Bouée »

Texte de Marcel VAUPRÉS. (Relevé dans la Revue de l’Avranchin n° 251 de 1967)

 

Le « Mont Bouée » fait partie d'une chaîne centrale qui part de Mortain. Il s'écarte de la ligne droite du faîte, pour s'avancer comme un cap au milieu des schistes micacés. En passant, on peut signaler que ce mont était surmonté d'un dolmen, ou table de pierre, qui servait d'autel aux druides. M. l'abbé Desroches pense que le nom de « Bouée » donné à cette colline viendrait du fait que les prêtres druidiques immolaient des bœufs sur cette petite « montagne ».

 

Il est certain que des carrières existaient au « Bouée » et qu'il fut un temps où ces carrières étaient très prospères. Les carriers habitaient surtout les villages de « La Houstière », du « Tertre », de la « Poullinière », de la « Chabottière », de la « Perrelle ».

 

Vers le début du XXe siècle, il y avait environ 70 ouvriers à travailler aux carrières ; ils avaient à peu près tous des « surnoms ». Les carrières disparurent peu de temps après la guerre de 1914-1918. Ceux qui connaissent le « pays » comprendront bien les causes de cette disparition : la dureté du travail d'abord et aussi la difficulté de l'extraction. Le granit était dur à travailler. La croix du cimetière de Montgothier, qui date de 1854, faisait partie d'un même bloc avec celle du Mesnil-Ozenne. Le bloc fut fendu en deux ; avec un « burin », les ouvriers faisaient un trait d'une profondeur de 10 à 15 centimètres dans tout le sens de la longueur puis, avec des « calots » de bois qu'ils enfonçaient dans cette rainure, la pierre se fendait.

 

Il y avait deux forges aux carrières pour tremper les outils et les « battre ». Quand les blocs étaient taillés, il fallait les charger sur les voitures. Une grande roue avait été installée à cet effet. La pierre était reliée à la roue par des « chapelets de fer ». Deux hommes montaient dans la roue et la faisaient tourner. La pierre montait et venait se placer sur la voiture qui avait été « acculée » pour permettre au bloc de prendre sa place.

 

Mais le départ des hommes pour la guerre a désorganisé le travail des carrières ; plusieurs ne sont pas revenus, d'autres ont trouvé le travail difficile sur ce haut-lieu de Montgothier. Aussi, petit à petit, les chefs de chantier ont quitté le « Bouée » pour aller vers Gathemo et Montjoie, emmenant avec eux une partie de leurs ouvriers. C'est le même filon de granit que l'on trouve à Gathemo.

 

Le départ des carriers a fait baisser le chiffre de la population de Montgothier et des villages entiers ont disparu. En 1856, nous notons une population de 667 habitants, puis, en 1901, elle ne sera plus que de 512, pour tomber à 381 en 1921. Un village comme celui de la « Houstière », qui comprenait au moins douze feux, est complètement vide aujourd'hui. La « Chabottière »,  « Le Tertre » et la « Poulinière » ont perdu chacun de quatre à cinq feux. Des petites maisons d'argile sont tombées en ruines et il ne reste souvent que des pans de murs couverts de lierre et de mousse, derniers vestiges d'un passé laborieux.

 

Les années ont recouvert le granit du « Bouée » et maintenant, il ne reste que peu de traces de ces fameuses carrières. Pourtant, les anciens se souviennent et ils reparlent encore de ce passé avec admiration et reconnaissance.

 
     
   
 

MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  EGLISE NOTRE-DAME
         
 

L’église Notre-Dame

et la vie religieuse

Publié par Georges DODEMAN

g.dodeman@wanadoo.fr

 

L’ancienne église était sûrement contemporaine de la création de la paroisse, autour de l’An Mil, proche tout à la fois du gué sur l’Oir et du château. Elle profita très certainement du pastorat très fécond du curé René Le Prieur, admirateur de saint Jean Eudes dont on voit l’emblème (le cœur enflammé) au-dessus de l’autel Saint-Laurent. Le chœur est du XVIe siècle ; elle a gardé son clocher typique, un cadran solaire mais le portail montre la date de 1744 et une inscription dans la charpente de 1751, contemporaine donc du logis neuf. Le maître autel est du XVIIe siècle, ainsi que les stalles et les bancs très semblables à ceux qui ont pu être sauvés de l’effondrement de la cathédrale Belle Andrine d’Avranches et que l’on peut encore observer à Ponts et à Saint-Quentin-sur-le-Homme.

 

Tout ce mobilier est de l’époque du curé Le Prieur dont la tombe est dans le cimetière. Par contre, on sait par les archives municipales comment est venue échouer là une superbe toile du XVIIe siècle, représentant  saint Jean l’Evangéliste.

   
         
 

C’est en 1896, suite à une demande du curé Noël venant du ministère des beaux-arts, qu’elle vint remplacer une ancienne toile de retable dont elle reprenait les mêmes dimensions, soit 2,15 m sur 1,35 m. La toile fut installée en 1897, au grand dam d’ailleurs du curé Noël, qui aurait préféré à « Saint Jean écrivant son livre »… une Assomption, vu qu’il s’agissait d’en remplacer une, et que la fête patronale était justement le 15 août ! Ce tableau fut prêté en 1958 à la ville de Vire pour une exposition et de nouveau réparé à l’occasion.

 

Les dates à retenir de la vie de la cure après la Révolution :

 

Construction du presbytère entre 1806 et 1812 (c’est encore actuellement une superbe bâtisse, propriété d’une société britannique depuis la mise en vente en 2000). La croix du cimetière fut érigée en 1854 en granit des carrières locales (pareillement d’ailleurs à la croix de l’hôpital de Saint-Hilaire).

 

Les années 1891-1892 furent marquées par les demandes récurrentes des curés Ménard  puis Noël et de la Fabrique, de faire réparer l’église…voire d’en construire une neuve. La commune resta sur sa position.

 

1933 : bénédiction du chemin de croix, d’une statue de sainte Thérèse et le vieux calvaire en bois de la Croix-des-Bois fait place à un ouvrage en granit.

 

1935 : le conseil municipal donne son accord pour la construction de la sacristie et à cette occasion, il est mis en place une tombola pour trouver les fonds nécessaires.

 

1975 : le clocher est refait et trois fois par jour, sept jours sur sept, Léon et Marie-Ange Davy  font sonner les cloches.

 

L’abbé Henri Le Grand, nommé le 19/08/1945 y fêta son jubilé sacerdotal en 1961 et quitta Montgothier en 1966 pour prendre la tête du doyenné d’Isigny. Son remplaçant, Michel Trublet, fut le dernier prêtre résidant de Montgothier jusqu’en 1976. A cette date, il devint curé de Saint-Hilaire jusqu’en 1991. Toutes les églises paroissiales du canton furent supprimées le 1er septembre 1994 pour faire place à une seule paroisse nommée « Saint-Martin d’Isigny ».

 
     
     
 

Isigny-le-Buat. L'église Notre-Dame de Montgothier. Ikmo-ned — Travail personnel

 
     
   
 

MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  LE LOGIS
         
   
     
 

Le Logis de Montgothier

 

Publié par Georges DODEMAN

g.dodeman@wanadoo.fr

 

Sa construction (autour de 1722-1728 pour le corps de logis principal), est à placer dans la continuité des sieurs Abraham enterrés dans l’enfeu de l’église quand leur petite fille Elisabeth épousa, début XVIIe siècle, Claude Gouin, bourgeois de la ville d’Avranches.

 

En 1724, leur descendant obtint (1) la réunion du fief local avec celui d’Athys et c’est lui qui fit construire ce superbe édifice de style Louis XIII, assez ressemblant à celui du Buat. Les communs sont respectivement datés de 1728 et 1732. On sait que l’évêque y descendait lors de ses visites pastorales et qu’il ne disposait pas de chapelle car ayant, en son intérieur, un oratoire particulier (2). A noter encore son entrée solennelle à deux piliers, son puits pittoresque dans la cour, l’escalier extérieur à double révolution.

 

Transformé en ferme après la Révolution, il échappa de ce fait aux fâcheuses modifications que l’on vit un peu partout dans la région au XIXe siècle et fut bien relevé par la famille Gautier-Sauvagnac à partir de 1970. C’est autour de ce bel ensemble que se tint une quinzaine d’années durant le fameux spectacle des Féériques dont nous parlons par ailleurs. Tout à côté, la ferme a été longtemps tenue par Paul Vauprés, maire de 1941 à 1946 puis de 1953 à 1968, et dont les noces d’or en 1970 furent honorées de la visite du célèbre journaliste Jean-Paul Rouland qui s’y était réfugié à l’âge de 15 ans en 1944. André Vauprés y a ensuite remplacé son père et c’est son frère l’abbé Marcel Vauprés, vicaire à Avranches, qui a publié l’article sur les carrières du Bouée dont nous avons publié précédemment un extrait.

 

Cette jolie demeure seigneuriale a donc retrouvé une nouvelle jeunesse grâce aux époux Gautier-Sauvagnac qui, en plus d’avoir eu l’amabilité de nous recevoir, ont bien accepté de  nous expliquer comment ils en étaient devenus acquéreurs. « Mes racines rurales fortes dans la région de Houdan et dans le Limousin, explique Denis Gautier-Sauvagnac, se sont transplantées du fait de notre mariage en 1965 à Parigny (avec Solange Fauchon de Villeplée, famille originaire de Vezins) en Normandie, dans cette vieille demeure, sauvée par nos amis Vauprés qui l’habitaient ». Achetée en janvier 1970, c’était une ferme qui avait un certain cachet, mais qui n’avait vu aucun ouvrier depuis 43 ans, quand les couvreurs s’attaquèrent à la toiture ! Les travaux perdurèrent jusqu’en 1995, ce bel ensemble finissant par être bien connu de toute la région, grâce au succès populaire des Féériques qui amenaient de 20 000 à 25 000 personnes tous les étés pendant près de 15 ans. « On ne peut garder pour soi une telle demeure que nous ouvrons donc au public pour les journées du patrimoine en septembre et les deux mois d’été. Souvent absent pour raisons professionnelles je me ressource dans cette maison qui conforte mes attaches rurales, l’hiver j’y élague mes arbres ou j’y monte à cheval (Denis Gautier Sauvagnac fut en effet 14 ans président de l’Eperon, la société hippique de Saint-Hilaire) et ce fut aussi, moralement, ma forteresse quand le ciel m’est tombé sur la tête à deux reprises en 1983 et 2007 »

 
         
     
     
   
 

MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  LES SABOTIERS
         
   
     

Sabotiers

 
 

Carrières et sabotiers de Montgothier

Les sabotiers au XIXe siècle

Texte de Marcel VAUPRÉS. (Relevé dans la Revue de l’Avranchin n° 251 de 1967)

 

Au XIXe siècle, cette activité fut une des plus florissantes de cette petite commune. En feuilletant les registres de catholicité, nous avons retrouvé de nombreux noms de sabotiers et de villages où se tenait cette industrie. La principale fabrique de sabots avait son centre surtout dans les bois de La Bouverie où le promeneur peut encore découvrir plusieurs hêtres majestueux.

 

Cette activité occupait, surtout pendant l'hiver, des paysans qui n'avaient que des petites terres et qui trouvaient là une seconde source de revenus. A La Bouverie, les sabotiers étaient là l'hiver et l'été ils s'en allaient travailler à la moisson dans les fermes de la commune ou des environs. Ils logeaient et couchaient dans la boulangerie ; lorsque le froid se faisait plus dur, ils allaient trouver un peu de chaleur dans l'étable aux brebis.

 

La fabrication des sabots se faisait en deux temps. Il y avait d'abord l'abattage des hêtres que l'on trouvait en grande quantité dans le bois des « pares ». On mettait les têtes des arbres de côté car on n'allait pas seulement en faire du bois de chauffage. Ces grosses têtes, avec toutes les autres branches, allaient servir à faire du charbon de bois que les blanchisseuses utiliseraient. Ce charbon de bois venant du hêtre a pour propriété de ne pas s'éteindre et de durer longtemps. Voici comment les ouvriers procédaient : toutes les têtes des hêtres étaient rassemblées dans de grands tas, on les recouvrait de terre, en laissant tout de même une petite cheminée pour l'aération. Ces « fourneaux » étaient fabriqués de telle façon qu'il ne fallait pas d'air, en dehors de la cheminée. On allumait le bois, et il fallait qu'il « brûle sans flamber ». Il était donc nécessaire de le surveiller continuellement, afin que le bois se consume tout doucement. Il y avait un délai pour la « cuisson » et, passé ce délai, on obtenait du bon charbon de bois avec lequel les nombreuses blanchisseuses feraient chauffer leurs fers à repasser. Ce charbon serait également utilisé par les maréchaux de la région.

 

Il fallait ensuite faire transporter des troncs, sciés par petits bouts, dans le jardin de La Bouverie. C’était la deuxième étape de la fabrication des sabots. Ce travail s'effectuait à l'intérieur, au cours des froides journées d'hiver.

 

Les sabots étaient peints en noir surtout ou bien ils étaient vernis et servaient le dimanche. Tout le monde portait des sabots et même la plupart des habitants se rendaient à la messe en sabots. Quelques familles aussi, pour le dimanche, mettaient sur leur paire de sabots du noir qui avait été pris au derrière de la marmite. Il fallait également les « clouter » pour qu'ils résistent mieux à l'usure et mettre dedans une bonne couche de paille pour maintenir les pieds bien au chaud.

 

C'est le fabricant lui-même qui vendait ses sabots c'est-à-dire le patron de l'atelier si on travaillait à plusieurs. En 1900, une paire de sabots valait 18 sous.

 
     
   
 

MONTGOTHIER (ISIGNY LE BUAT)

  CC 25.07 AVRANCHES MONT-SAINT-MICHEL
   
  LA FOIRE A LA FORGE COQUELIN
         
   
     

Une foire

 
         
 

La foire à la Forge Coquelin

Texte de Marcel Vauprés, extrait de la Voix des Clochers n° 81 de 1968

 

Situé à l'une des extrémités de la commune, sur la route d'Avranches à Mortain, le village de la « Forge Coquelin » a connu au siècle dernier une grande activité agricole. C’ est là que se tenait une des foires champêtres de cette contrée, vers le 20 septembre, un peu avant que ne finisse l'été et que ne commence l'automne. La moisson est terminée, les corvées de battage battent leur plein, les pommiers sont en pleine production. Dans tous les villages, on parle de ce voyage à la foire « à la Forge », et les parents promettent cela comme récompense à leurs enfants : « Fais bien ton travail si tu veux aller à la foire à la Forge ».

 

Avec le village du « Fréchot », celui de la Forge est composé de nombreux feux. Le jour de la foire, des gens de Montgothier, du Grand-Celland et de la Chapelle-Urée, partent très tôt le matin vers ce lieu de la foire. On s'est bien endimanché, les hommes ont mis leur plus belle blouse et par tous les chemins, on se dirige vers la foire qui se tient des deux côtés de la route, sous les pommiers et dans les champs. En venant du bourg de Montgothier  on prend le plus souvent le petit chemin sur la droite après le carrefour de la « Croix de la Datinière ».

 

C'est le jour où l'on va essayer de vendre le petit poulain, une des vaches de l'étable ou bien une « cagée » de petits cochons ainsi que des moutons de l'année. C'est déjà un beau remue-ménage dans tous les alentours ; on s'appelle, on s'invite à « boire un coup ». Les marchands, avec leur grande blouse et leur chapeau, sont là nombreux pour offrir leurs prix et les tractations vont durer une partie de la matinée.

 

Ce n'est pourtant pas la seule activité de cette foire, car dans un champ au bout d'un chemin creux, un cirque est venu planter sa tente et ses manèges. C'est la joie de tous les enfants des communes environnantes. On peut faire une partie de manège « à pas cher ». «  Je me souviens, dit un contemporain, avoir vu un gars de cirque tourner sur le ventre, perché au bout d'un mât. » On a donné un tout petit peu d'argent aux enfants pour acheter un « garot » ou une « torquette » à l'étalage du Père Boudet, cet excellent garotier de la Pesnière. On vendait alors le garot de 1 à 4 sous (50 francs anciens). Il ne fallait pourtant pas dépenser beaucoup, on n'était pas riche !  « Je te donne vingt sous, mais surtout, ne les dépense pas ! » disait une maman à sa petite fille ; « c'était la fête pour tout le monde ; nous  étions récompensés de la longue marche qu'il fallait effectuer pour arriver non loin des «  Hauts Vents », sur ce haut-lieu de Montgothier ».

 

Après avoir vendu leur bête, ou bien pour «  finir » le marché, les hommes s'attablaient sous un pommier, non loin d'un tonneau de cidre et l'on buvait cette boisson normande, à  « grandes moques ». C’était pratiquement la seule boisson vendue sur le champ de foire. De temps en temps, les hommes quittaient la table posée sur des tréteaux pour aller faire une  partie de « ballière » où l'on s'amusait à lancer la balle. C'était, bien entendu, le jeu des  enfants et des jeunes également.

 

Le temps passait ainsi, et il fallait songer au retour. Par petits groupes, les amis et voisins du village repartaient, chaussés de leurs beaux sabots résonnant sur les cailloux des chemins. Tout le monde était heureux et prenait le temps de l'être, et souvent, on chantait pour que la route paraisse moins longue, des chants qui avaient déjà égayé les veillées d'hiver. Les parents parlaient des affaires réalisées et de la foire de l'année suivante, ou bien aussi, de la récente  « Assemblée » qui s'était déroulée dans le bourg de Montgothier.

 

Les dernières années de cette foire, il n’y avait plus que trois tentes avec, près de chacune d'elles, un tonneau de cidre sur la voiture. On se souvient encore de la tente de François Rochefort, du  Grand-Celland. Il y avait également le café de la Mère Chenu, les loteries habituelles, le tir à la cible, les marchands de bonbons et de bibelots. Cette foire a duré jusqu'au début du XXe siècle. Ce serait en 1913, aussitôt avant la « Grande Guerre », qu’aurait disparu cette foire champêtre. Elle s’est estompée avec le développement de la ligne de chemin de fer, par le Pont-d'Oir, vers Domfront et vers les villes voisines. Il devenait alors plus facile de se rendre aux plus grandes foires d'Avranches et de Saint-Hilaire. Le soir, au coin du feu, pendant les longues veillées d'hiver, on parlait longtemps de la « Fère à la Forge ».

 
         
 

L’hymne des Forgerons

 

      1er Couplet

 

C'est aujourd'hui la Saint-Éloi.

Suivons tous la vieille loi.

La forge, il faut balayer (bis),

Les outils, il faut ramasser.

 

     2e Couplet

 

Allons au bourg promptement,

Monsieur le curé nous attend.

La Messe il faut écouter (bis)

Et celui qui va la chanter.

 

     3e Couplet

 

Nous voilà tous revenus.

Que cinquante coups soient bus.

Et de notre pain bénit (bis)

Nous en porterons au logis.

 

     4e Couplet

 

Nous allons fleurir le marteau

Et lui donner du vin sans eau.

Que nul ne fasse de bruit (bis)

Car nous allons dîner ici.

 

     5e Couplet

 

A la santé du marteleur,

Sans oublier son chauffeur,

Ainsi que le brave affineur (bis)

Qui travaillent tous avec coeur.

 

     6e Couplet

 

Les filles de notre canton

Aiment bien les Forgerons,

Elles n'ont pas peur du marteau (bis)

Quand dessus...............