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Saint-James CPA collection LPM 1900 |
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Cette affaire, dans laquelle la défaite fut causée par la panique et l'indiscipline, est racontée avec des détails variés par les historiens. Quelques-uns donnent 20000 Bretons au connétable : ce qui paraît très - considérable. Jean Chartier et l'auteur de la Chronique de la Pucelle donnent aux Anglais six à sept cents hommes : des historiens français et bretons disent 6000. Tandis que Gruel fait ignorer aux assiégés la panique des Bretons, D. Lobineau met ceux-ci entre deux feux « Les Bretons n'avaient pour aller à un boulevard qu'ils devaient attaquer qu'un petit chemin difficile et dans le moment où ils commençaient à descendre dans le fossé, ils entendirent crier des deux côtés : Salberi et Suffolk! En même temps Nicole Burdet qui commandait dans le boulevard fit une vigoureuse sortie par une fausse - porte. » Le général anglais , Rameston , secondé par Burdet et Ph. Branche, selon M. de Gerville , fit une sortie qui acheva de dissiper les Bretons. Le combat, commencé sur les bords de l'étang de Saint-James, eut pour principal théâtre un terrain près du roc de Dierge qui s'appelle encore aujourd'hui la Bataille. Les Bretons arrivèrent le lendemain au point du jour à Antrain.
Le jour saint Pierre 1448, le maréchal de Lohéac reprit ce château sur les Anglais sans aucune difficulté. Dès-lors 11 est resté à la France : le mariage d'Anne de Bretagne le rendit inutile contre cette province.
Un des fils du grand Montgommery, Gedéon, eut la capitainerie de Saint-James, d'après une pièce du château de Ducey. Une autre du même dépôt nous montre la geôle de Saint-James désignée dans un partage entre les Gis de Gabriel n, autre fils du grand Montgommery.
En 1605, une peste ravagea Saint-James, ce qu'atteste une charte de Louis XIII.
En 1705, une maladie contagieuse y fit périr plus de 300 personnes '.
Les dernières guerres qu'ait vues Saint-James sont celles de la chouannerie. Des engagemens assez vifs eurent lieu dans ses environs où les chouans avaient pour chef un homme actif et entreprenant, nommé Boailly. |
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Saint-James l'abreuvoir CPA collection LPM 1900 |
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Saint-James avait deux églises, celle du Prieuré, intra tmtros, et celle de Saint-Martin dit du Bellé , de Bello, bâtie par Guillaume en souvenir du patron de la Conquête, connue il avait fondé sur le théâtre même de sa victoire l'abbaye de la Bataille. De cette église il ne reste plus qu'un élégant portail ogival, que, par un pieux respect, on a réédifié comme porte du cimetière, et quelques fenêtres acquises par M. de Guiton et rétablies dans sa chapelle. Elle existait encore, mais à l'état de ruine, il y a une vingtaine d'années : les amateurs en possèdent un carton par M. Le Normand, qui offre une tour à bâtière, à lanterne ronde, son portail du xm° siècle et quelques baies gothiques. On remarque sur la tour les traces de l'incendie qui dévora l'édifice. Dans sa visite de 1708 , l'archidiacre Bragelongne trouva Oresve, curé de Saint-MartiB-de-Saint-James, établi dans le Prieuré : un incendie avait consumé son église et n'avait laissé que les murs et la tour. Le curé eut un procès avec Charles Guiton : il avait brisé son écusson peint sur les vitraux et avait enlevé les pierres tombales. Les Guiton étaient patrons de cette église, de haute antiquité, puisque dans une charte de 1254 Raoul Guiton est qualifié de Persona S. Martini de super Beuron. Le curé fut condamné à remettre les choses a leur place, mais les vitraux ne purent être refaits, le secret de cette peinture étant perdu.
Saint-Martin était l'église paroissiale de Saint-James, et, s'il faut en croire l'Enquête précitée, était « une des plus belles et des plus grandes du diocèse. La chapelle Saint-Ermel était « intra limites parrochialis ecclesie S. Martini de Belle » dit une collation de cette chapelle en 1586.
Cette église fut le théâtre d'une attaque violente qui montre l'animosité héréditaire de deux familles, l'audace et la puissance d'un gentilhomme, même sous Richelieu , et le ferment des haines religieuses mal éteintes. Elle fut l'objet d'une plainte au Parlement dont nous extrairons les traits essentiels:
« Disent les supplians que François Guiton de La Villeberge a droit de séance à banc dans la chapelle N. D. de l'église S. Martin de S. James, qu'il entretient les vitres de ladite chapelle où sont ses armes,... lequel banc fort vieil avait à jour passé servi à la devanture dudit Guiton , lequel n'ayant encore atteint l'âge de vingt ans, et le sieur de La Paluclle se servant de sa minorité, peu de jours avant la fête S. Martin auroient ôté le banc et ne se contentant pas du banc qu'ils ont dans le côté dextre du chœur, voulant obliger ledit Guiton à prendre séance avec le commun du peuple; ce que voyant N. Billeheust et Guiton avoient prié le curé de parler auxdits de La Paluelle... ayant fait refus les supplians auroient fait replacer ce banc... Les supplians étant allés le jour de S. Martin à la messe, lesdits de La Paluelle voulant continuer leurs violences avoient envoyé en poste guérir Budes et ses gens et avoient fait assembler en leur maison des Granges 70 hommes qu'ils avoient armés de pertuisanes, hallebardes, mousquets , arquebuses et carabines, et s'étant armés de cuirasses en l'assistance dudit Budes sieur de Sacey, avoient conduit toute cette cohorte à la porte de l'église, avoient fait monter six mousquetaires dans la tour, et ayant laissé dehors huit mousquetaires avoient fait entrer quatre hommes portant pertuisanes suivis de six arquebusiers ayant le chien rabattu , après lesquels suivoient 25 ou 30 hommes armés de carabines ,. arquebuses à gibier et pistolets ayant tous le chien rabattu et l'épée nue, lesdits Budes et de La Paluelle abordèrent les supplians entendant la sainte messe , étant le prêtre à la consécration et avoient saisi les supplians au collet leur tenant le pistolet contre la tête et disant avec blasphèmes exécrables qu'il falloit mourir. Ce que voyant ledit de Billeheust dit à Budes: Et quoi, M. de Sacey, ce ne sont pas là les protestations d'amitié que me fîtes avant-hier à votre maison. A quoi fut dit par ledit Budes que c'étoit trop raisonner et qu'il falloit mourir. Ce qu'entendant les supplians s'étoient jetés entre les bras du prêtre qui avoit été obligé de quitter la consécration. Ce que voyant lesdits Budes et complices avoiem poursuivi les supplians contre l'autel disant : Ventre de Dieu , coquins, il faut mourir, vous êtes des huguenots et faites les galans. Il vous faut des bancs, je renie Dieu , vous mourrez présentement, si ne voulez mettre l'épée à la main. A. quoi ledit de Billeheust ayant reparti qu'il n'y avoit apparence de commettre de telles violences en ce lieu, lesdits de La Paluelle avoient dit audit Guiton : Mon petit mignon, c'est à vous à qui nous en avons et faut voir ce que savez faire; mettez l'épée à la main ou je vous tue. Ce que lesdits complices eussent fait cessant que le vicaire qui disoit la messe s'étoit porté au-devant des coups et à l'aide de la foule du peuple avoit favorisé la retraite des supplians... Les complices se ruèrent sur le banc et le mirent en morceaux, proférant infâmes blasphèmes du nom de Dieu et retardèrent plus d'une heure la consécration... Lesquelles violences ont été faites an préjudice des édits du roi et à la passion des supplians , lesquels à cause de l'autorité desdits complices sont empêchés de se plaindre par-devant les juges des lieux... ont recusé la juridiction d'Avrançhes, etc. » |
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Saint-James Grande rue CPA collection LPM 1900 |
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Saint-Martin formait une seule paroisse avec Saint-Benoît « unico pastore regi solitas, » quoiqu'il soit spécialement désigné : Montmorel avait en 1275 un héritage: « In parrochia S. Martin de S. James de Beuvron. François Péricard, en 1630, transporta la paroisse au Prieuré.
La Maladrerie de Saint-James est souvent citée dans les documens locaux. La chapelle de Saint-Ermel est mentionnée dans le Pouillé de 1648 qui lui attribue un revenu de 200 l. En 1698, elle n'avait plus que 150. Un acte de 1413, cité par M. Boudent, donne à l'évêque d'Avranches la collation de cette chapelle. Un titre du Mont du XIVeme siècle nous apprend que « la vavassorerie de la Maison-Dieu de St-Jacques devait hommage à ce monastère étant située en Villiers et en la Croix. L'hôpital ou Maison-Dieu de Saint-James était distinct de la Maladrerie, et n'est pas moins ancien. L'Inventaire des Titres du Mont signale une pièce intitulée : Littera DomusDei de S. J. de Beurone. C'est sans doute la charte suivante datée de 1244 : « Ricardus humilis abbas Priori et fratribus Domûs Dei S. Jqeobi super Beurone presentibus litteris confirmamus quod ipsi teneant... quale quod habent apud villam, quod dicitur la Croix in Abrincatino et apud Viliers et Planee quod feodum Reginardus de Cruce miles quondam tenuit de nobis reddendo. s. ad manerium nostrum de Ardevone. » Un acte de 1457 attribue à cette maison le droit de havage. La Maladrerie y fut réunie, en 1698 , et alors fut nommé le premier chapelain à gages de cet hospice , en remplacement du prieur. La statistique de cette année lui attribue un revenu de 200 liv. En 1707, il fut confié ,à des religieux de Saint-Thomas-de-Villeneuve. En 1720 , y fut enterré son restaurateur, le bon abbé Bragelongne. En 1830, une chapelle fut construite sur l'emplacement de l'ancienne.
Le couvent des dames Trinitaires dont la chapelle n'a d'intéressant qu'un bénitier, la Maison des Retraites dont l'oratoire à été décoré avec goût par les missionnaires diocésains, bordant la rue du Mont, complètent la liste monumentale de SaintJames. Elle est voisine du manoir d'Auberoche et du cimetière où nous avons montré le portail de Saint-Martin, et où l'on remarque la tombe d'un étudiant de dix-huit ans, A. Amelinc, sur le marbre de laquelle est un cadran solaire avec ces vers: |
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Puisque nos vœux et ta jeunesse Ne purent t'arracher au sort, Repose ici.... notre tendresse Nous rassemblera dans la mort.
A une demi-lieue de Saint-James, au pied d'un coteau escarpé dont le Beuvron suit les contours, au bout d'une longue rue, est la chapelle de Saint-Benoît, autrefois église paroissiale de Saint-James, avec Saint-Martin-du-BelIé pour annexe. En effet on lit dans l'Enquête précitée:
« S. Martin a toujours été annexe et succursale de S. Benoît, régie comme elle et par un même curé, et les habitans comme ne faisant qu'un corps avec eux étaient imposés en un seul et même rollc à taille. »
La tradition parle d'une abbaye de Saint-Benoît qui aurait été établie très-anciennement dans ce lieu , et cette tradition a peut-être quelque élément de vérité. En outre , ou montre, dans une prairie de cette vallée , une pierre miraculeuse sur laquelle l'œil d'une foi complaisante reconnaît l'empreinte des côtes du saint et ses larmes intarissables. |
Saint-James CPA collection LPM 1900 |
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Il semblerait que l'église de la paroisse devrait être aussi ancienne que sa succursale: toutefois il n'y reste rien de roman, excepté peutêtre les fonts. Elle semble appartenir au xvr siècle par sa grande ogive de l'est, son portail cintré , des restes de vitraux et son campanier à deux tintcrelles.
En 1370, le moulin du Pré en Saint-Benoît, et en 1372, le moulin du Déluge furent acquis par le Mont Saint-Michel. En 1587, le Fief du prieur fut aliéné par le sieur de Romilly, au bénéfice de Saint-Benoît et de Saint-Martin. Il faisait partie de la donation affectée au prieuré par les ducs de Normandie. Les guerres de religion furent vives dans le Saint-Jamais: « Les églises de S. James et de S. Benoît furent ruinées par des gens iniques et mal vivans, les images rompues et cassez les livres bruslez et les vitres rompues avec les cloches et les ornemens perdus et emportez par lesdits perfides et méchans. Somme toute il y eut grande persécusion des gentz d'église. »
C'est près de Saint-Benoît, dans le lieu élevé appelé LongueTouche ou Lantouche que s'établit primitivement le monastère dit depuis Montmorel : et ainsi s'explique un peu cette abbaye de Saint-Benoît dont parle la tradition. Le G allia parle ainsi de ce premier siège de Montmorel : « Abbatiœ fundamenta prius posita f"aerant in quadam villa nomine Longe-Touche qnœ adhuc cernuntur, sed mutato consilio Monmorellum ob aquarum utilitatem aquarnm translation est adificium. » Lantouche appartenait à Montmorel, comme nous l'apprend son Cartulaire: « Ex dono Joh. de Sulligneio sedem malendinorum in Bevrone et cursum aque et Longam Tuscam. »— Carta J. Lovcl quorumdam que habebat in Longa Tuscha 1259. Jean de Longa Tosclta est cité dans les Rôles de l'Échiquier près de Robert de Juilli.
Saint-Benoît est riche en noms significatifs : Cassini cite un lieu appelé les Millières; les champs voisins de la pierre qui pleure les larmes de Saint-Benoît, s'appellent les Châtelets et les Landelles j il y a le village de la Maladrerie , celle de SaintJames, le hameau des Villettes, Thannel, et Haut-Thannel que l'on peut rattacher à l'étymologie de Tanis, Blet avec sa vieille maison et le manoir d'Auberoche, Alba roca, maison seigneuriale de la paroisse. Raveu de Campront, sieur d'Auberoche , était seigneur de Saint-Benoît à la fin du xvr siècle, et son fils fut tué en 1590, dans les guerres de religion, dans la maison du cheval Noir à Avranches. Un Garnier et un Ôthon d'Auberoche étaient avec du Guesclin à la bataille de Navarrette '. Montitier est cité dans une charte de Montmorel: « Tribus sot. in parrochia S. Benedicti supra Bevron apud Montiter ou Montitier. » |
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Saint-James CPA collection LPM 1900 |
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Saint-James rue Poisonniere CPA collection LPM 1900 |
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Le roi Henri II ayant demandé le serment de fidélité aux barons de Bretagne , Raoul de Fougères le refusa et entraîna dans son parti le comte de Chester. Raoul brûla le château de Saint-James: « Rad. de Fulgeriis castrum S. Jacobi tradidit incendio, similiter castrum Tilioli.... Cornes verà Cestrie et Rad. et 40 milites cum eis cum non possent effugere, quia inimici eorum obstruxerant viam fugiendi, incluserunt se in turrim (Dol); itaque obsessa est turris Doli a Drebenzonibus et ptebe Abrincatina. »
Peu de temps après, Henri II pardonna à Hugues, reçut son serment de fidélité , et lui rendit le château de SaintJames. Les vers suivans ont quelque rapport à ce fait:
« Por ce que Hugues li quens de Cestre Ne li pont une plus amis estre, Plus maintenir ne plus aidier Si livout Henris otreier Li chastel que nos apelons (En lieu) Saint Jeauine de Bevron Ni ont en avant nul jor Fors sol la garde de la tor. »
Pendant que Hugues posséda son château , il fit des dons a plusieurs établissemens religieux : à Saint-Sever, dont il fut pour ainsi dire le fondateur, il donna ses moulins: « De S. Jacobo super, Bevron; » à Montmorel, il donna: « Ex dono Comitis cestrie xx" sol. in prefectura Abrinc. et imam plateam in Castro S. Jacobi. » Hugues conserva ce château jusqu'à sa mort, qui arriva en 1181, et le transmit à son fils Ranulf m, qui avait épousé en premières noces Constance , duchesse de Bretagne, veuve de Geoffroy, fils de Henri II. Constance , séparée de lui pour cause d'adultère , fit annuler son mariage , et épousa Guy de Thouars , et Ranulf, de son côté, se remaria deux fois. Dans l'intervalle de sa rupture et de son divorce, il la fit arrêter , comme elle passait à Pontorson, et la retint prisonnière près d'un an au château de Saint-James. Ranulf fut un des plus zélés partisans du roi Jean : aussi ses châteaux en Normandie furent-ils tous confisqués. |
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Saint-James le marché CPA collection LPM 1900 |
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A la fin du XIIeme siècle, le bailli d'Avranches, Gauf. Duredent, rendait compte pour le taillage de Saint-James : « 1180, Gauf. Duredent r. cp. de taillag. de S. Jacobo. » Dans un autre article on lit : « Cornes cestrie reddit compot. per Ran. de Praeriis de 100 l. de firma prepositure de S. Jacobo. In thesauro 90 l. In decima S. AmandiRoth. 10 l. et quietus est. » W. Bacon de Landelle et le comte de Chester devaient 2250. de la ferme de Saint-James; Ranulfe, successeur de ce dernier, donna à Montmorel une place dans la villa de Saint-James.
Pendant la minorité de Saint-Louis, Pierre de Dreux, dit Mauclerc, comte de Bretagne, se révolta contre ce prince, et fit fortifier Saint-James , dont le roi lui avait confié la garde. Après avoir échoué sur la Haye-Pesnel, Pierre Mauclerc demanda sa grace: elle fut accordée. Jean de France dut épouser sa fille , avec plusieurs places pour dot, parmi lesquelles figura Saint-James.
En 1234, le duc de Bretagne fit serment de fidélité au roi de France. On lit entr'autres choses dans ce serment la cession de StJames par ce duc: « Je quitte à perpétuité au roi et à ses hoirs le chasteau de St-James-de-Beuvron, fortifié comme il l'est. »
En 1238, Philippe m rendit l'arrêt suivant relatif à SaintJames :
« Cùm burgenses nostri Sancti Jacobi de Beurenio nobis conquesti fuissent quod burgenses de Dynamio impediebant quominus possent emere fitum, laneum et lanam... nos burgenses de Dynamw coram nobis fecimus adjornari... quâ die recognoverunt quod burgenses nostri Sancti Jacobi de Beurenio, in duabus nundinis possunt emere filum, laneum et lanam, excepta die mercati... donec burgenses ville de Dynamio emerint quantum voluerint... et sic fuit usitatum. »
En 1266, Robert Doissey était capitaine de Saint-James au nom de Saint-Louis.
En 1316, Louis-le-Hutin, par libéralité ou par reconnaissance, fit don au duc de Bretagne de la ville de Saint-James, |
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Dix ans auparavant était mort un des plus braves capitaiues àe Saint-James, qui l'avait défendu deux fois avec succès contre les Anglais, Raoul Guiton, qui reçut de Philippele-Valois ce témoignage : « Raoul Guiton, escuyer, a tenu gouverné le fort de S. Jacques de Beuron bien et loyaument et l'a tenu françois à granfs couts frais et missions tant par deux peines de siège que les Anglois mirent devant comme autrement... en juing 1348. « Il mourut à Saint-James , et on grava ces mots sur sa tombe : « Cy gist R. Guyton esc capitaine du fort de céans pour le roy nostre sire qui trespassa le 14 juing l'an de grace 1349. Priez Dieu pour l'âma de ly. »
Nous avons pour ce siècle des titres relatifs à la vallée de Beuvron et a ses nombreux moulins : « Littera W. Tardif quod tenet esclusam de valle de Beur. in bono statu. —Lit. ijuod tred. molendini de Bruille in valle Beuronis ad nos pertinet 1322. — De molendino de Bige. — De Bore. — De Beurone. —Du Deluge. Ibid. 1322. »
Jean Paynel, chevalier, sire de Marcey, était capitaine da cette place à la fin de 1355, et Pierre de Villiers le remplaça l'année suivante : ce dernier était en même temps capitaine de Pontorson3. En 1367, Fraslin Avenel fut nommé capitaine de Saint-James, et Guillaume le Bègue de Fayel en 1379. C'est en cette année que Charles v rendit son ordonnance précitée.
En 1386 mourut Sylvestre de La Cervelle , évêque de Coutances , originaire de Saint-James.
En 1418, Vigorde Cliuchamp prit possession de la capitainerie de Saint-James , probablement au nom du roi d'Angleterre. On fit, en 1424 , le dénombrement de cette place. On y trouva (intra muros) 277 feux et 1,328 habitans.
L'époque de l'occupation anglaise fut féconde en affaires militaires pour l'Avranchin : une des plus importantes eut lieu sous les murs de Saint-James. Un conteur moderne nous offrira une introduction à une ancienne narration de cet événement:
« Si le lecteur, qui nous a déjà si souvent et si complaisnmment suivi dans nos excursions historiques à travers la vieille France, veut bien, cette fois encore , faire avec nous un pas rétrograde , nous le transporterons à quelques lieues de la jolie petite ville d'Avranches, au pied d'un châteaufort dont les murailles, cachées à cette heure sous l'herbe , ceignaient bravement le bourg de Saint-James-de-Beuvron. Sur l'emplacement occupé par les vertes et grasses prairies qui s'étendent jusqu'à Pontorson , s'élevaient alors les logis de l'armée de Bretagne, qui, depuis le carême de 1425 , était venue mettre le siége devant le château de Saint-James. En • jetant les yeux sur le fossé qui ceint le camp... on reconnaîtra que c'est un capitaine savant dans l'art de mener une bataille qui a tracé le plan de ces fortifications , établies à la fois pour l'attaque et pour la défense... C'est ce qui pouvait arriver d'un jour à l'autre à l'armée de Bretagne, s'il plaisait aux Anglais d'Avranches de venir en aide à leurs frères de Saint-James. » |
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A cette exposition do romancier contemporain, aux détail» dramatiques duquel nous renvoyons , ajoutons ie récit du secrétaire même du héros de cette affaire, G. Gruel, historien du connétable de Richemont:
« Et de là allèrent mettre le siége audict lieu de Beuvron et fut en caresme et ne dura ledict siége que huicl ou dix jours. Et dist-on que le chancelier de Bretagne fist retarder le payment des gens de guerre , et à l'occasion de ce ils n'a-voient de quoy payer les marchands qui leur amenoient les vivres. Et pour ce fut conclu l'assault par grande délibération de conseil. Et quand ceulx qui estoient audict assault devers l'estang montoient pour combattre main à main à ceulx du dedans, ils veirent une grande compaignic de gens d'armes qu'on avoit ordonné à faire les courses durant ledict assault. Car le comte de Suffolc et le sire de Scales estoient à Avranches. Et ainsi cuidèrent nos gens que ce fussent les Anglois et se commencèrent à retirer. Et alors lesdicts Anglois saillirent sur eux et en tuèrent et firent noyer un grand nombre en l'estang dudict lieu et ceulx qui estoient de l'autre côté n'en sçavoient rien. Et se fallut retirer et y eut grande multitude de gens morts et prins.... et ceste nnict plusieurs commencèrent à desloger sans congé, les uns blessez, et les autres pour les conduire. Et bientôt après meirent le feu ès logis dudict siége de Beuvron et tantost l'on vint dire à monseigneur le connestable et à monseigneur d'Estampes, son beau frère, qu'ils seroient bruslez s'ils ne se sauvoient et que tout le monde s'en alloit. Et ainsi montèrent lesdicts seigneurs sur petits chevaulx pour cuider faire demeurer ceulx qui s'en vouloient aller; mais homme ne vouloit arrester. Et tant que mondict seigneur le connestable fut abatu en la presse cheval et tout et passoient par dessus luy qui ne l'eust secouru et conveint malgré luy s'en venir quand et les aultres, ou demeurer bien seul. Et pensez que c'est grand chose quand un dessarroy se met en un grand ost, et de nuict. » |
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Saint-James Corderie CPA collection LPM 1900 |
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Saint-James place Saint-Martin CPA collection LPM 1900 |
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Avranchin monumental et historique, Volume 2 Par Edouard Le Hericher 1845
Danfront, Avrenches par en som Desqu'à Saint-Jame de Beuvron. (Chron. des dues de Normandie. )
Au bout d'un promontoire projeté de trois côtés sur une vallée profonde où le Beuvron bondit sur des rocailles, animée par le bruit des eaux, par les cascatclles des moulins et les voix joyeuses des lavandières, dans les vases de laquelle reposent d'antiques débris, sur cette Hogue, prédisposée au séjour des hommes, surtout des hommes de guerre, s'élevait naguère le château de Saint-James et s'élève encore sa vieille église: la ville moderne couvre l'isthme et s'éparpille vers la campagne. La commune , très-irrégulièrement découpée , se compose de deux lobes inégaux, le grand au nord , le petit au sud; celui-ci, naturellement limité par la Dierge à l'ouest, et à l'est et au sud par le Beuvron aux coteaux boisés, l'autre arbitrairement dessiné. La grande route d'Avranches à Fougères coupe cette commune en deux bandes longitudinales, en courant sur la crête du coteau occidental du Beuvron. Cette grande commune, formée des paroisses de Saint-Benoît et de Saint-James, est semée de villages dont les plus intéressans par leurs noms et leurs souvenirs sont: Atré avec sa fontaine aux barils d'or, la Vieille-Paluelle, berceau d'une illustre famille, les Vallées-Miettes, le Réclus, Beaufour, Pontcel, Aube-Roche, dont le nom rappelle Pierres-Aubes, Petrce albce, le château de la Paluelle, belle habitation seigneuriale sur une croupe pittoresque, un des beaux sites de l'Avranchin, laVillette, la Maladrerie, Lantouche, berceau de Montmorel, le Haut - Thannel, nom saxon, l'Épine, la Croisette, le Val-de-Sée sur le Brezel, les Guitons, les Bourreaux, les Touche-de-Souet, Touche-Gâté, Touche-Pommier ', la Croix-Blanche, la Cave-des-Pains, le Moulin-duPrieur, la Salle, la Porte, la Croix - Chastel, la Croix-duRepaire, la Croix-Blanche.
Le nom primitif de cette commune doit avoir été celui de Beuvron. Du moins dans la plus antique mention que nous connaissions de cette localité, dans une charte du commencement du xr siècle, par laquelle le duc Robert donna au Mont ce qu'il y possédait, on ne trouve que le nom de Beuvron: < Dono in perpetuum donatum esse volo in burgo quod appellatur Beurona quidquid in eo meijurù erat2. » Ce nom de Beuvron, Bevro, Brevo, Beuro, signifiant rivière, se trouve dans les nombreuses localités de ce nom, dans les Bièvres, les Biefs, et est resté dans les mots bief, bieu et bièvre. Le nom de James est fort ancien : il se retrouve dans la commune de Jametel, Jacobellus: les Normands l'ont porté en Angleterre.
L'église de Saint-James remonte au commencement du XIeme siècle, et fut bâtie et dotée par les ducs de Normandie Richard et Robert. |
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Cette assertion est puisée dans une Requête manuscrite présentée en 1592 à Daniel Huet par Guérin, prieur commendataire du Prieuré de Saint-Jacquesde-Saint-James contre certaines prétentions des La Paluelle. On y lit:
Le sieur Guérin a justifié par des titres aussi anciens qu'ils sont sans reproches, que l'église du Prieuré a été bâtie et fondée par les ducs de Normandie, Richard et Robert, son frère, qui la donnèrent à l'abbaye de Fleury, de manière que l'abbé en est seul collateur; en un mot qu'il est si vrai que cette église est la même qui fut bâtie par les ducs de Normandie et donnée à l'abbaye de Saint-Benoît, qu'encore aujourd'hui le prieur qui jouit des revenus est obligé d'acquitter les charges portées par le fondateur , entre autres de faire célébrer une messe la semaine et de nourrir un pauvre... La charte qu'on a rapportée de Guillaume qui confirme celle de Richard et de Robert, l'extrait des archives de l'évêché d'Avranches, fait par M. de Bourbon en 1481 , et la copie tirée des œuvres manuscrites de messire Robert Cenalis, évêque d'Avranches qui vivait il y a deux cents ans sont des témoignages authentiques.
En 1648 , ce Prieuré dont l'abbé de Marmoutier était patron , rendait 1,000 liv. |
Saint-JamesEglise Saint-Martin CPA collection LPM 1900 |
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Nous connaissons quelques-uns de ses prieurs ou curés. Nous avons trois nominations à cette cure dans lesquelles on voit que depuis l'an 1594 , Clément-le-Moine, Jean Menard, Jean-le-Pigeon et Richard Levesque , furent successivement appelés à ce bénéfice. Le prieur Guérin précité dut être leur successeur immédiat. M. Fargeonnel, conseiller-clerc au parlement de Paris, fut le dernier prieur et cessa de l'être en 1790, époque de la suppression des monastères.
L'église de Saint-James est une des quatre de l'arrondissement dont la nef ait des bas-côtés , et la quatrième dans l'ordre archéologique ou artistique. Elle est généralement romane : elle a du roman la physionomie austère et grave , la massive carrure, la nudité froide, et la « vacuité sombre, » toutefois avec les apports des siècles ultérieurs. Le roman, le roman avancé, réclame la nef, et peut-être le collatéral du nord. Cette nef s'ouvre par un portail de même style et de même temps, à deux archivoltes brodées de rosaces entaillées, à deux colonnes dont les chapiteaux sont historiés de volutes végétales ou de figures symboliques : l'un a des fleurs de lis et un quadrupède qui se mord la queue, l'autre un quadrupède, un oiseau, et au milieu une tête de chien qui semble dévorer quelque chose. Deux contreforts plats filent jusqu'à la naissance d'un fronton à deux niches où s'abritent deux saints très-antiques, un évêque et un autre saint fleurdelisé, sans doute Saint-Louis. Au milieu une bonne fenêtre gothique se montre vide de sa tracerie. Le collatéral du sud, auquel suivant l'orientation ordinaire, s'accolait le cloître, n'est pas ancien. Le transept du nord est gothique: on y remarque une fenêtre semblable à celle de la façade. Le chœur, l'autre transept et la tour sont récens. La nef est pavée de tombes qui ne vont pas au-delà du xvir siècle : celle qui peut être antérieure est ornée d'une croix fleurie. Dans la nef on remarque une grande madone gothique: c'est la Vierge de Saint-Martin-du-Bellé qui, dit-on, eut grand peine à quitter son église. Il y a des restes de vitres coloriées, des têtes de saints, une d'abbé, un personnage en dalmatique avec une auréole, peut-être saint Etienne, avec le mot maturis, et audessus une tête à collerette coiffée d'une calotte à la Louis xi. La tour tomba en 1669 : une sentence condamna le prieur à rétablir « le chancel tour et clocher, ensemble l'aile du côté du prieuré; les habitans de leur obéissance réparèrent la nef et l'aile N. D. » |
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Saint-James Château du Gault CPA collection LPM 1900 |
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La principale illustration de Saint-James est son château et son histoire militaire. De cette forteresse , sentinelle avancée de la Normandie, il ne reste qu'un robuste fragment de mur, au nord-ouest de la ville, dans lequel les hommes de nos jours se sont creusé une habitation. Ce débris gigantesque fait rêver à l'ensemble, et, avec sa position formidable, donne l'idée d'une puissante forteresse : l'histoire confirme cette conception. Pour préciser cette idée, il faut recourir à des souvenirs encore récens et aux documens historiques. Ce château avait plusieurs tours. Une d'elles donnait sur la campagne, et Charles v, en 1379, y fit ouvrir une porte, comme nous le voyons dans son ordonnance. Nous croyons qu'elle était où se trouve le Calvaire. Une tour, qui devait être le donjon, s'appuyait aux murs de la ville, sur l'isthme ou la partie la plus expugnable. L'ordonnance ci-dessous semble autoriser cette hypothèse : « Pour la seûreté de notre chastel de S. James de Bevron et pour d'autres causes qui à ce nous meuvent, avons ordonné que en icelui chastel soit faite une yssue par laquelle on puisse yssir et rentrer audit chastel sans passer par ladite ville, et aussy que la tour qui est contre les murs de ladite ville soit par telle manière ordonnée et guerittée que l'on puisse être en ycelle sans le danger des habitants par la manière que en charge l'avoit nostre amé et féal chevalier Le Bègue de Fayel et comme il vous dira de par nous, et vous mandons à chacun de vous que ladite yssue vous fassiez faire audit chastel et aussi ladite tour remparer par la manière que dit est. 1379. » Les fortifications furent détruites au xvir et au xvme siècle. Une tour subsistait encore au midi de l'enceinte quelque temps avant la Révolution. Certains seigneurs de la baronnie de la Croix étaient tenus de garder une des portes de ce château , quand l'armée de Normandie combattait ailleurs : « Illos de honore Crucis qui servant imam portant de castello S. Jacobi cum exercitus Normannie alicubi progreditur. »
A cette description trop incomplète d'une forteresse trèsimportante s'ajoute naturellement son histoire : les faits durent plus que les pierres, et ils ont encore leur intérêt et leur signification , même en l'absence de leurs témoins matériels.
Le château de Saint-James fut bâti par Guillaume-le Bâtard : il le dit lui-même dans une charte adressée aux Bénédictins, auxquels son père et son grand'père avaient donné l'église : « Circa verb eamdem ecclesiam ego Willelmus, successor eorum, Nortmannorum Dux et per Dei misericordiam Anglorum rex effectus, bellis ingruentibus, ob meœ terrc e defensionem, cum locus magis idoneus ad id videretur, castellum exstruxi, quo facto multa Mi quce ibi non pertinebant attribui, viz leugam cum stagno et theloneo et mercatum... et nundinas duas et pediaticum. Tria stagna construxi et homines illos qui pro voluntate sua ibi manebant stabiles esse feci... apud Rodolium. 1067 » Ce château, comme le dit cette charte féconde en détails locaux, est antérieur à la Conquête ; d'ailleurs le biographe du Conquérant, G. de Poitiers, dit qu'il fut bâti contre les excursions de Conan : « Castellum quod S. Jacobi appellatttm est opposait in confiuio ne famelici predones ecclesiis inermibus auc ultimo terrœ suœ vulgo excarsionibus latrocinantibus nocerent'. » G. do Jumiège répète à peu près ces idées, et ajoute que la garde du château fut confiée à Richard, comte d'Avranches, père de Hugues-le-Loup , qui devint comte de Chester: « Illud castellum ad eos arcendos institutum tradidit Richardo Abrincatensi prœsidi patri Comitis Hugonis. » Guillaume euleva au Mont plusieurs biens dans Saint-James: <• Abstulit etiam nobis burgum de Beuron et feriam que nunc est apud S. Jacobum. » Le Mont le tenait sans doute du duc Robert, car on lit dans un manuscrit : « 11feb. obiit Rob. cornes Norm. qui nobis dedit villam de Bevone ctan 8 molendinis. »
Ce ne fut pas Hugues-Ie-Loup qui représenta Saint-James à la Conquête : ce fut Gautier Giffart à qui Guillaume offrit le drapeau à la.bataille d'IIastings. Ce fait est raconté dans un fragment de AYace, différent du passage analogue du Roman de Rou, tel qu'il a été publié par M. Pluquet: |
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Gantier Giflait lont amene Qi a Saint Jame aveit esté Tendi sa main les règnes piist Pie en estiieu desus sassisl.
Et li dus garda ilallrr, part Si apela Gautier Giflait Cest gonfanon dis! il pernez En la bataille le portez Gautier Giflard li respondi Sire dist il por Deu merci.
Il refuse le gonfanon , qui est donné à
Tosteins le le fils rou le blanc oui non Al Bec en Chauz aveit maison.
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Saint-James ancien costume CPA collection LPM 1900 |
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