SAINT-AUBIN-DE-TERREGATTE
  CC 24.07 SAINT-JAMES
   
  HISTOIRE
         
 

Saint-Aubin-De-Terregatte, collection CPA LPM 1900

 
     
 

Avranchin monumental et historique, Volume 2

Par Edouard Le Hericher 1845

 

Rot. de S. Johanne debet i inilil. de Terra vasta.

 

SAINT-AUBIN affecte la disposition d'une feuille reniforme , dont les lobes s'étalent au nord et au sud : au nord , la Sélune et le Gué-au-Râle sont les limites naturelles les plus continues ; le ruisseau de la Fief à l'est, et ceux du Moulin-Neuf et de la Quesnellière à l'ouest, forment des segmens de limites. Le sud confme à la route de Saint-James à Saint-Hilaire.

 

Les noms intéressans sont Juilley, Mirande, Signy, le Hoc, la Porte, la Motte, le Theil, Beauregard, la Touche, Yvrande, Hoilandei, etc.

 

L'affixe du nom patronal est ce mot wast, gast, dérivé de vastus, ravagé, et conservé dans dégât, qui appartient au roman, et qui est en particulier très-commun dans Wace. C'est à l'imagination , à défaut des données de l'histoire, à rêver les guerres, les incendies, les fléaux qui ont donné lieu à cette expression : les noms saxons et normands, assez communs dans ces parages, peuvent faire présumer les auteurs et l'époque de ces dévastations'.

 

L'église de Saint-Aubin dépendait de l'abbaye de Montmorel. L'édifice actuel a dû être assez important : il y avait une tour à flèche octogone de la hauteur , dit-on, de cent vingt pieds, qui s'écroula en 1801. Cette chûte écrasa la nef, qui fut refaite en 1805, et qui ne conserva que quelques contreforts de physionomie romane. Il est probable que cette tour était en style normand, et l'on dit dans le pays qu'elle avait été bâtie par le Conquérant. Une tour à dôme moscovite fut construite en 1823 , forme barbare et bâtarde, qui ne dérive même pas de la tour en bâtière, laquelle a encore quelque chose de national et de traditionnel. Les transepts sont du siècle dernier. L'intérieur, vaste et clair , n'offre rien à l'antiquaire que de nombreuses tombes sur plusieurs desquelles nous avons lu des dates du xvr siècle, 1516, 1586, 1591. Une d'elles est celle d'Artur Dogeru, dont les armes étaient sculptées dans le transept septentrional qu'il avait fait bâtir. Les fonts ne manquent pas d'art; un bénitier de forme classique porte la date de 1741.

 

Un prieur de cette église « W. moitachus de Terra wasta, » souscrivit à la charte de Boucey, au xir siècle2, et, en 1232, un chanoine d'Avranches , W. de Campania, percevait « 25/. in altalagio ecclesie S. Albini. Rector ipsius ccclesic deserviens in eadem percipiet totum altalagium. »

 

En 1648, cette église rendait 300 liv., et 1,000 en 1698: il y avait alors trois prêtres. Une taille de 3,483 liv. était payée par 540 laillables. Les gentilshommes étaient Ph. Dubosc , J. du Gage, J. de Routnilly, F. David , sieur du Bourg. Montfaut y trouva nobles H. Dubois et J. Marie.

 

Le manoir de Saint-Aubin, avec sa porte cintrée, ses fenêtres en accolade, son écusson, ses fleurs de lis, et le logis de Dogeru avec ses douves, son colombier et sa chapelle, sont les principales habitations seigneuriales. Au premier se rattachent quelques noms épars dans les documens : « Petr. de Terra Vasta r. cp. de 1. bis. pro. audienda concord. in ipsttm frem suum. sic cyrog. eor. testatur', » et celui du seigneur cité dans notre épigraphe.

 

Il .paraît presque certain qu'un guerrier de la Conquête sortit d'un hameau de cette paroisse, appelé d'Arcie. Normand d'Adreci est inscrit dans le Domesday comme Tenant en chef dans le Lyncolnshire. Sa famille a formé trois branches en Angleterre2. Les d'Arcie sont souvent cités dans les chartes de Savigny (Ran. d'Arcie, 1202 , avec le sceau au lion passant, Rad. de Arceio,) et dans celles du Mont (le même,, P. d'Arsiz, de Arcieco, 1243 et 1247, et Jean de Arsiz, 1248-52-54), qui toutes relatent des donations dans leur domaine de Terregatte.

 

Le Cartulaire de Montmorel renferme aussi des stipulations des d'Arcie , et de nombreuses mentions des localités de Saint-Aubin , aumôuées à cette abbaye:

 

« Ex dono P. de Arsitio tenementum Ivonis de S. Albino, 12l03. — Carta P. de Larsiz pro Renaudeia S. Albini, 1247 : cum assensu J. de Larsiz filii mei tradidi conventui Montis Morelli masuram apud S. Albinum de Terra vasta que vocatur la Renaudee. — Ejusdem pro clauso Vendenge, 1252. — Ejusdem pro la Dabonneie. — Carta Joh. de Larsiz  pro manerio de Mota S. Albini. 1254 dono B. M. de Monte Morelli UO sol. super manerium meum de Mota... exceptoclattso Vendenge quod diu ab abbate per homagium teneo canonici suam plenariam justiciam in omnibus poterunt exercere. — Ego P. filius Hamelini dedi B. M. de Monte Morelli omnem calumpniam quam habebam in ecclesia S. Albini de Terra Vasta. 1200. »

 

Ce Cartulaire renferme une lettre [du roi de France, de laquelle on peut tirer plusieurs renseignemens. Elle prouve que le nom de ce quartier de Terregatte s'appliquait comme affixe aux deux paroisses voisines de Saint -Brice- de Landelles et de Saint-Laurent-de-Landelles; en outre , le nom des Chéris nous y apparaît sous sa forme ancienne , et on y trouve cette paroisse « de Ingleyo, » déjà citée à l'article de Saint-Quentin, et dont le nom ne peut être que celui de Juilley. Voici un fragment de cette lettre de 1276:

 

« Philippus... abbas de Monte Morelli firmavit que acquisita sunt.... in parrochia S. Albini de Terra vasta.... Item in parrochia de Lander (sic) de Terra Gasta... apud Landeles de Terra Gasta... Item in parrochia S. Bricii de Landelles de Terra Gasta... Item in parrochia de Escharis... Item in parrochia de Ingleyo ex dono Symonis de Chennier. »

 

Les seigneurs du fief de Signy, en Saint-Aubin, figurent au nombre des bienfaiteurs de Montmorel : « Ex dono Jordani de Signeio masuram Pelliparii de Thesnelles... Ex dono IV. de Signeio et Rob. fratris ejus decimam lande de Grasse Vache... et feodum Godet... Ex dono Signeiensium insulam de Bace21210. — Ex dono Andree de Signeio et W. et J.

 

Les du Buat apparaissent au même titre : « Apud S. Jlbinum de terra Gasta ex dono Agnetis uxoris Gervasii du Buat, militis octava parte molendini de Orelart. » Les du Val sont très-souvent cités pour Saint-Aubin dans la lettre royale précitée.

 

La commune de Saint-Aubin est riche en croix : il y a celle des Anitiers, sans doute contemporaine de l'église romane, celle de la Hier , celle de Thevel, à Champingou , la Croix-Aiguë , près du Bourget.