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Sainte-Mère-Eglise, CPA collection LPM 1900 |
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Annuaire du département de la Manche, année 1867, Article de Mr Renault
Sainte-Mère-Eglise, Fanum Matricis ecclesiœ, Sancle Marie ecclesie, Sancta Maria ecclesia.
L'église paroissiale de Sainte-Mère-Eglise appartient, partie au XIeme ou XIIeme siècle, et partie au XIVeme siècle. Elle se compose d'un chœur, d'une nef, de bas-côtés et d'un transept. Des arcades surhaussées ou en fer à cheval mettent la nef en communication avec les bas-côtés ; une porte est percée dans le mur occidental, et une autre dans le mur méridional de la nef. Le mur absidal cote droit, el les murs de la sacristie qn'on y a accolée sont à pans coupés.
Les colonnes et les arcades qui soutiennent la tour sont dans le style roman ; sur l'un des chapiteaux, qui appartient au XIIeme siècle, on remarque un personnage dont les bras sont tendus et la figure bouffîe ; il tient un poisson dans chaque main ; sur un autre chapiteau on distingue un lapin et un coq qui semblent brouter la feuille servant de volute au chapiteau.
On remarque dans le cimetière une croix que forment une base attique évidemment romaine, et deux morceaux dont l’un parait appartenir à une colonne miliaire.
Cette église, classée au nombre des monuments historiques, est sous le vocable de la Sainte Vierge. Elle était le chef-lieu d'une exemption ou enclave du diocèse de Bayeux. On nommait anciennement exemption des églises situées dans la circonscription d'un diocèse, et soumises cependant à un autre diocèse. Ainsi les paroisses de Sainte-Mère-Eglise, J^ieu- saint, Neuville-au-Plain, Vierville et Chef-du-Pont, situées dans le diocèse de Coutances, formaient une exemption dépendant du diocèse de Bayeux, sous le titre d'exemption de Sainte-Mère-Eglise. Ces paroisses étaient restées au diocèse de Bayeux pour attester que ses évêques avaient envoyé saint Marcouf et ses compagnons évangéliser le Cotentin. Ils avaient dû attacher en effet un grand prix à posséder les lieux qui avaient été sanctifiés par les travaux ou témoins des miracles de ces pieux missionnaires, sortis de leur diocèse. Une autre origine est attribuée à cette exemption ou enclave. Ainsi saint Lo, issu d'une riche famille, aurait possédé comme domaine patrimonial cinq paroisses qui se trouvaient dans le diocèse de Bayeux.' Devenu évêque de Coulances, il donna à son évêché ces cinq paroisses, qui étaient Sainte-Croix, Saint-Georges-de-Montcocq, Baudre, le Mesnil-Rouxelin et N. D. de Saint-Lô; en échange, on aurait cédé au diocèse de Bayeux cinq autres paroisses, qui formèrent l’enclave du diocèse de Bayeux dans celui de Coutances. L'évêque de Bayeux avait des dîmes importantes dans la paroisse de Sainte-Mère-Eglise. Le seigneur du lieu avait le patronage de la cure qui, en 1765, valait 2,000 livres, et se rattachait à l'archidiaconé des Vez et au doyenné de Trévières.
Antiquités de l'époque romaine.
— En l'année 1853 on trouva, en défonçant un terrain, an grand vase en terre qui contenait environ 1500 monnaies romaines, appartenant, à très-peu d'exceptions, au commencement du IVeme siècle de l'ère chrétienne. Ces monnaies, petit bronze, étaient bien conservées. On y a reconnu: 1 Alexandre Sévère, 1 Gallien, Yictorin, 1 Aurélien, 2 Probus, 2 Constance-Chlore dont une Consécration ou médaille commémorative, 1 Galère Maximien, 32 Maximin Duza, 3 Maxence, 900 Constantin-le-Grand, la majeure partie avec le revers : Soli invicto comiti; 160 Licinius, père, collègue de Constantin, 35 Crispus César, fils de Constantin et de Minervine, 42 Constanlin-le-Jeune, premier fils de Constantin et de Fausta.
Tout porte à penser que le vase aura été enfoui par le possesseur de ce trésor, entre l'année 317 et 323 ; et que ces pièces sortent des ateliers établis dans les Gaules par les Romains. |
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Sainte-Mère-Eglise, CPA collection LPM 1900 |
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Faits historiques.
— Dans les grands rôles de l'échiquier de Normandie, pour l'année 1180, on lit : Ricardus Baignart et Roberlus de Terrascona reddunl compoium de lâO lib. de firma de Ste Marie ecclesia in thesauro 158 lib. pro terra data Itiulfo in Sancte Marie ecclesia 40 soi. per cartam régis, et quieli sunt . Cette ferme de Sainte-Mère-Eglise figure souvent dans ces grands rôles de l'échiquier. Sainte-Mère-Eglise faisait partie du domaine ducal.
Henri V duc de Normandie, donna à l'abbaye et aux moines de Sainte-Marie-de-Montebourg, la terre de Sainte-Mère-Eglise et la vacherie de Barnavast : et terram de sancte Marie ecclesia et vaccarium de Bemewast .
Il exista pendant longtemps, en Normandie, une famille du nom de Sainte-Mère-Eglise. Lors de la rédaction du registre des fiefs de Normandie, Gauthier de Sainte-Mère-Eglise et Thomas de la Fière, tenaient chacun un fief de chevalier qui dépendait de l'honneur de Lithaire : Galterus de Sancte Marie ecclesia et Thomas de la Fiere tenent inde (de Lithaire) feodum univs mililis.
On trouve siégeant aux assises de Valognes, le 9 octobre 1231, Gauthier de Sainte-Mcre-Eglise .
Guillaume de Sainte-Mère-Eglise, doyen d'Avranches et protonotaire de Richard Gœur-de-Lion, devint le 31 évêque d'Avranehes, en 1236.
La paroisse de Saînte-Mère-Eglise a donné trois abbés à l'abbaye de Blancbelande ; Thomas de Sainte-Mère-Eglise, mort le 40 septembre 1262; Pierre de Sainte-Mère-Eglise, et Guillaume Aubert de Sainte-Mère-Eglise, qui mourut dans le mois de novembre 1274, et un évèque à Avranchcs, Guillaume de Sainte-Mère-Eglise, prélat très-éloquent et homuie d'une vertu éprouvée et d'une science profonde.
Un Gauthier de Sainte-Mère-Eglise, et Lucie, sa femme, se montrèrent les bienfaiteurs de Blancbelande; ils donnèrent à cette abbaye et lui confirmèrent, par une charte de 1294, l'aumône que lui avait faite Robert de Flamanville. Cette famille de Sainte-Mère-Eglise portait d'azur à six aigles d'or éployées. |
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Sainte-Mère-Eglise, CPA collection LPM 1900 |
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Henri V, roi d'Angleterre, occupant la Normandie, présenta, le 44 octobre 1448, à l'évèque de Bayeux, Jean Poisson, pour la cure de Sainte-Mère-Eglise, vacante par la mort d'Antoine de Waregny.
En l'année 1479, la seigneurie de Sainte-Mère-Eglise appartenait à la famille Ferrières. Dans un aveu de la baronnie de Ferrières, située dans la vicomte d'Orbec, les fiefs de Sainte- Mère-Eglise, Saint-Marcouf et Fontenay, sont désignés comme faisant partie de cette baronnie. Les armes de la famille Feirières sont d'hermines et de fers à cheval d'or.
N. Desbarres, sieur de Sainte-Mère-Eglise, donna, en 1233, et aumôna aux religieux de Blancbelande, plusieurs tenements et rentes, avec le droit de sieurie qu'il pouvait avoir sur ces tenements: plus tard les religieux, et Simon, sieur de Sainte-Mère-Eglise, furent en procès au sujet de la droiture et juridiction, gage piège, cour et usage que les dits religieux disent avoir en la dite paroisse de Sainte-Mère-Eglise ; et à l'appui de leurs prétentions ils invoquaient, entre autres titres, la donation de 1233; mais le parlement de Normandie jugea, le 27 mars 1555, que la sieurie de Sainte-Mère-Eglise avec le patronage estait tenu nuement et sans moyen du roy en sa vicomte et chatellenie de Carentan par un plain fief de haubert ; qu'ainsi les religieux ne pouvaient prétendre droit de fief ou seigneurie : ils perdirent donc leur procès et furent condamnés à 20 sous d'amende.
Une autre contestation s'éleva entre Louis de Sainte-Mère-Eglise, sieur du Tourp, et Guillaume de Surtainville; il avait été jugé, le 22 décembre 1601, que Louis de Surtainville serait maintenu dans la dénomination et qualité de seigneur d'Omonville-la-Rogue, au préjudice de Louis de Sain te-Mère-Eglise, sauf à celui-ci à prendre la dénomination du fief du Tourp, ou toute autre que celle d'Omonville-la-Hogue. Sur l'appel de Louis de Sainte-Mère-Eglise, le parlement de Normandie dit que Guillaume de Surtainville pourrait se nommer et qualifier en tous actes sieur d'Omonville-la-Rogue, et que Louis de Sainte-Mère-Eglise pourrait se qualifier de sieur d'Omonville-la-Rogue en partie.
Jean de Pirou figure comme seigneur de Sainte-Mère-Eglise, en 1523, et Arthur de Saint-Simon, en 1588 ; il épousa Eléonore de Beauvoisin, et obtint par ce mariage la baronie de Gourtomer.
Le roi Louis XIII, en 1611, permit, par lettres patentes, la réunion des fiefs de Féville (Fauville) et Samboville (Gamboville) au fief, terre et seigneurie de Sainte-Mère-Eglise,appartenant au sieur baron de Courtaumer, et establissement d'un marché au jour de jeudy, au bourg du dict Sainte-Mère-Eglise. On trouve aussi qu'en 1740, il y eut élection de la terre de Sainte-Mère-Eglise en comté, sous le nom de Gourtomer, avec union à celle de plusieurs fiefs, domaines et héritages, en faveur du sieur de Saint-Simon de Gourtomer.
Jacques-Antoine de Saint-Simon de Gourtomer était, en 1686, en procès devant le bailliage de Falaise, avec François de Glinchamps, marquis de Bellegarde, au sujet de la grange de Sainte-Mère-Eglise. En l'année 1725, il était seigneur et propriétaire des fiefs de Sainte-Mère-Eglise, Chef-du-Pont et Bohon. Dans le courant du XVIIIeme siècle, de Saint-Simon, seigneur de Gourtomer, l'était aussi de Méautis et de Plain-Marest ; Guy-Antoine de Saint-Simon entra dans les chevaliers de Malte.
Léon-Marguerite Leclerc, baron de Juigné, comte de Gourtomer et seigneur de Sainte-Mère-Eglise, prit part, en 1789, à l'assemblée des trois ordres du grand bailliage de Cotentin.
Le protestantisme avait fait des prosélites dans le Cotentin ; car, en 1656, on supprima un prêche à Sainte-Mère-Eglise; au village de la Gapellerie, il y avait pour les protestants un lieu de sépulture. En 1685, on comptait encore à Sainte-Mère-Eglise trois familles nobles protestantes.
Sainte-Mère-Eglise vit naître, le 16 octobre 1615, Henri Basnage de Fraquenay, fils du célèbre protestant Benjamin Basnage: il fut un des plus habiles et des plus éloquents avocats du parlement de Rouen. Il mourut âgé de 80 ans, laissant un Commentaire sur la coutume de Normandie, en 2 volumes in-folio, et un traité des hypothèques.
Montfaut, en 1463, trouve noble à Sainte-Mère-Eglise, Jean de Paris, et les de Sainte-Mère-Eglise à Omonville et à Hémevoz.
Roissy, en 1599, y mentionne comme nobles les Hurel, anoblis en 1523, les Marcadé anoblis en 1543, Jean Goquet, Robert de la Haulle, et y ajourne François et Robert Le Sauvage.
En 1766, Ghamillard y trouve nobles les Hurel, Jean d'Auxais, les Marcadé et les de Brix, anoblis en 1543.
La paroisse de Sainte-Mère-Eglise dépendait de l'intendance de Caen, de l'élection de Carentan et de la sergenterie dont elle était le chef-lieu. Masseville lui donnait 276 feux, et Expilly 1195 habitants. En 1871, sa population est de 1513 habitants. |
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