ETIENVILLE
  CC 20.12 DE LA BAIE DU COTENTIN
   

LES QUENOUILLE DE LA MARIEE
         
 

Etiennville CPA collection LPM 1900

 
         
 

Les quenouilles de mariées

 

Chateaubriand a écrit dans son Génie du Christianisme : « L'épousée recevait du curé la bénédiction des fiançailles et déposait sur l'autel une quenouille entourée de rubans. » Le grand écrivain fait allusion, dans ce passage de son livre, à une coutume autrefois très répandue et qui était encore bien connue dans la seconde moitié du siècle dernier dans plusieurs provinces françaises.

 

 Cet usage est signalé, dès le XVIe siècle, par G. Bouchet dans son curieux ouvrage, les Sérées : « Anciennement, écrit cet auteur, on portoit devant la mariée, en allant au logis de l'époux, une quenouille chargée de laine, avec le fuseau, pour luy ramentevoir (rappeler) qu'elle se devoit exercer à filer et non à autre chose. » Si, du temps de cet aimable conteur, cette tradition était déjà perdue, cependant une autre était encore en vigueur : celle de remettre, lors du mariage, une belle quenouillée de lin sur l'autel de la Vierge.

 

Cette tradition existait en Normandie, et de nombreux auteurs nous l'ont décrite. À Étienville, dans la Manche, au XVIIIe siècle, et sans doute au début du XIXe, une quenouille restait en permanence auprès de la statue de la Vierge. La jeune mariée, ou sa demoiselle d'honneur, devait, le premier dimanche après les noces, y attacher un ruban et faire présent à l'église d'un écheveau de fil de lin. Vers 1880, J. Lecœur nous décrit ainsi la cérémonie dans le Bocage normand :

   
  « Quelques jours après le mariage, la jeune épouse, accompagnée de son époux et des proches, part le matin de sa demeure, emportant la quenouille chargée de lin, enrubannée, qui a figuré sur le char du trousseau. Le cortège se rend à l'église, assiste pieusement à la messe, puis, l'office achevé, la mariée va s'agenouiller devant l'autel de la Vierge. Après une fervente prière, elle se lève et place auprès de l'image vénérée sa rustique offrande, qui y restera exposée jusqu'au jour où la quenouille d'une autre bru viendra la remplacer. Jadis, la nouvelle mariée emportait la quenouille qu'elle venait de remplacer par la sienne et devait la filer. Sa quenouille attendait la mariée suivante, et ainsi le fil ne manquait jamais à la sacristie ni au presbytère. »