FLAMANVILLE
  CC 13.03 DES PIEUX 
   
 

MINE DE DIELETTE

         
 

Les mines de Dielette, CPA lcollection LPM 1900

 
   
 

LE BASSIN MINIER DE LA BASSE NORMANDIE 1911

Etude scientifique, économique et sociale

UNE NORMANDIE INCONNUE

A. PAWLOWSKI.

 

De longue date, le gîte de Diélette, reconnu dans ses affleurements, aux laisses de basse-mer, fut exploité sans autorisation officielle. Le minerai servait alors de lest aux bateaux qui venaient ancrer dans le port de Diélette.

 

Mais les recherches sérieuses ne furent poursuivies que de 1860 à 1862, par le sieur Bérard, qui obtint la conces-sion en 1865. Un puits, dit n° 1, fut creusé. L'exploitation, cependant, fut peu active. En 1877, la Société anonyme des mines de Diélette fut consti-tuée. Elle se substitua, l'année suivante, à M. Bérard, et prononça ses sondages

 

La Compagnie décidait bientôt la construction d'un second puits, au lieu dit Guerfa, pour explorer le gisement à la profondeur de 50 mètres, et sur une longueur de1,500 mètres sous la nappe marine.

 

Une galerie, creusée à la cote 50 atteignit 185 m de longueur. Elle rencontra deux couches de minerai.

 
   
 

Chargement du mineraiu juillet 1914, CPA lcollection LPM 1900

 
   
 

Malheureusement, le fonçage avait été pratiqué trop près du flot. Des venues d'eau obligèrent les exploitants à interrompre les travaux en 1880. C'est alors qu'on songea à ouvrir un troisième puits, à la Cabotière. Ce dernier fut longtemps utilisé par la Société des mines de fer de la Manche qui avait remplacé la Société de Diélette. laquelle avait dû liquider.

 

La nouvelle Compagnie exploita de 1884 à 1892. Elle se trouva, comme la précédente, aux prises avec de graves difficultés : frais onéreux des travaux, la force motrice d'épuisement nécessitant une consommation exagérée de charbon, impossibilité de charger le charbon à Diélette sur des bateaux de plus de 300 tonneaux, qui exigeaient un fret de 10 fr par tonne pour le transport en Angleterre, ravitaillement en houilles mal assuré, par suite de l'insuffisance du port de Diélette battu de la mer, etc., obligation de prolonger les galeries d'avancement très rapidement pour attaquer la 4e couche, assez tourmentée.

 

La crise métallurgique, qui sévit en 1892, précipita les événements. La Société avait commencé trop tard ses travaux préparatoires. Elle dut abandonner l'entreprise. En 1900, une Société anglaise, dirigée par un ingénieur russe, se remit à l'oeuvre. Ses essais furent infructueux, la mine ayant été envahie par les eaux.

 

La nouvelle Société qui se constitua en 1907 eut à dénoyer la mine. Elle n'y parvint pas sans efforts. Elle dressa ensuite une digue pour arrêter les venues d'eau aux épuisements, et établit une station électrique centrale. En même temps, on résolut de recourir à une méthode d'exploitation plus rationnelle. Les recherches récentes ont permis d'établir nettement la topographie de la mine. Celle-ci renferme une série de couches à peu près parallèles, intercalées dans des terrains schisto-cristallins, qui s'appuient sur le granit. On a pu observer la présence de six couches, d'une puissance de 3 à 14 mètres, et d'une épaisseur totale de 42 mètres.

 
   
 

Le puit de La Cabotiere, CPA lcollection LPM 1900

 
   
 

A la surface, la 4e couche n'est accessible qu'aux fortes marées ; les 5e et 6e couches sont toujours sous les eaux. Par places, le granit a relevé les couches, et en a arraché des lambeaux qu'on retrouve sur les falaises.

 

On ne trouve aucune trace de gisement dans les îles voisi-nes. Il semble donc qu'une faille limite le gite à l'Ouest.

 

A l'heure actuelle, on prépare l'exploitation en grand de la concession, La 4e couche a été autrefois très utilisée ; on se propose d'attaquer les autres couches, particulièrement la 6e, qui a été reconnue, mais en opérant en profondeur. L'étage 90 étant à peu près épuisé (4e couche), on fonce un nouveau puits, qui a déjà atteint l'étage 150, et dans lequel on envoie des injections de ciment.

 

Une galerie de 300 mètres de longueur s'avance sous la mer.

 

On fonce à niveau bas, de crainte d'infiltrations.

 

A l'étage 90, une station d'épuisement a été installée.

 

Un « serrement » a été construit dans le but de protéger les abords du puits et la station du sous-sol, en cas d'envahissement du niveau 90, lequel servira de retour d'air.

 

La dureté du minerai a nécessité l'emploi de marteaux perforateurs, comme dans les exploitations du Calvados et de l'Orne.

 

Au jour, on a établi une station centrale provisoire de 500 HP une cantine, un dortoir, des maisons ouvrières, et l'on dressera sous peu deux chevalements de puits.

 

Une voie ferrée de 1 kilomètre et demi, de 0 m 70, relie la mine au port de Diélette. La traction s'y exécute avec une machine à benzol.

 

La Société de Diélette, dont fait partie M. Thyssen, juge qu'elle ne tirera profit de la concession qu'en exploitant en grand. Le port de Diélette ne saurait donc répondre à ses besoins. Elle avait pensé à relier Diélette à Cherbourg — distant de 24 kilomètres — par une voie ferrée. Elle y a renoncé : le parcours serait, en effet, très accidenté, et la dépense d'établissement considérable. De plus, l'entrée de la ville de Cherbourg est étroite.

 
     
 

Etablissement de GUERFA, CPA lcollection LPM 1900

 
     
 

La voie minière devrait emprunter les rails de l' Etat. Or, ceux-ci sont déjà surchargés. Enfin, il serait difficile de loger sur le port de Cherbourg un parc de dépôt de minerais.

 

La Société a donc envisagé l' établissement d'un port en eau profonde à Diélette, à 500 mètres du rivage. Un caisson de 30 m > 12 sera foncé pour servir de dock. Quatre caissons intermédiaires supporteront des pylônes destinés aux câbles d'un transporteur aérien, qui fera le va-et-vient entre la mine et le dock. La dépense en est évaluée à plusieurs millions.

 

 
 

Le département de la Manche comprend une autre mine en exploitation, si tant est qu'on puisse appeler exploitation l'extraction de quelques tonnes de minerai. Il s'agit de la concession qui s'étend sur les communes de Surtainville et de Pierre-ville, et qui appartient à M. Margis, de Paris. Alors qu'à Diélette, on rencontre un mélange cristallin d'oligistes et de magnétites, à Surtainville-Pierreville l'hématite se trouve mêlée à de la galène et de la blende argentifère. Commencée dès 1830, l'exploitation à Surtainville fut tôt arrêtée, peut-être, comme le pense M. G. Letellier, faute de moyens pratiques de communications.

 

Un puits, néanmoins, fut creusé au lieu dit Bazin, dans une couche de minerai carbonate, reconnue sur un kilomètre. A la Godaillerie, un travers-banc de direction nord-sud a été tracé sur 84 mètres de longueur, dans le but de recouper, en profondeur, une autre couche.

 

En 1904. Un puits fut foncé, sur Pierreville, à 13 mètres de profondeur: en 1910, il a été poussé à 30 mètres, tandis que des galeries de recherches étaient ouvertes à 25 mètres. On a découvert en ce point un gisement de galène et blende argentifère à la teneur de 75 % pour la galène et de 60 % pour la blende. Il y a lieu d'observer que cette concession n'a été accordée qu'au titre d'exploitation de plomb argentifère. Son avenir est restreint.

  

Les statistiques officielles ont fixé ainsi la production du minerai bas-normand de 1902 à 1908 (hématite et carbonate calciné aux mines) ; 1902, 152,000 tonnes ; 1903, 202,000 ;1904, 217,500 ; 1905, 258,000 ; 1906, 295,000 ; 1907, 327,000 ; 1908, 357,000. En 1915, il semble qu'on puisse escompter 2,500.000 tonnes. Ce chiffre n'a pas lieu de surprendre. Comme les synclinaux parais-sent n'avoir leur fond qu'à 1,200 mètres, on peut estimer, avec le savant M. Nicou, l'éminent profes-seur de la Faculté de Nancy, le gisement total à 700 millions de tonnes, sans parler des zones non encore connues.

 
     
 

La Cabotiére, le premier embarquement de minerai, CPA lcollection LPM 1900