LES MOITIERS D'ALLONNE
  CC 12.08 de La Côte des Iles
   
  DUNES D'HATAINVILLE
     
   
     
 

Dunes d’Hatainville

Textes : Yann Mouchel (SyMEL)

Quand les douaniers patrouillaient dans les mielles…

Méfi-ous des gabelous qui travêquaient dans la myille

 

La transition est marquée. Peu à peu nous quittons les dunes embocagées, crissent sous nos pas les mousses et les lichens. Bienvenue dans l’univers lunaire des dunes grises.

 

A l’interface entre la terre et la mer, les plages, les dunes et les falaises face aux îles anglo-normandes ont toujours été propices à la contrebande (étoffe, tabac…). Plusieurs toponymes dans les dunes nous rappellent cette surveillance de la côte.

 

Sur la plage la garde fait référence à un corps de  garde  édifié  en  1669,  aujourd’hui  disparu, pour assurer la défense de la côte occupée en temps de guerre par la milice garde-côte. Les guets font référence aux hommes qui guettaient la mer.

 

Plus surprenant, les « 1500 pas » situent le chemin qui passe devant cet abri de douanier découvert en 2005. Il existe deux de ces toponymes, l’un en venant du village d’Hatainville, et l’autre en partant de la Vieille Eglise. Ils mènent tous deux au cirque, une vaste dépression au milieu de la partie sud des dunes et permettaient de rejoindre les rochers du Ritt pour aller à la pêche. Entre le départ de chaque sentier, la distance est d’environ 3 kilomètres, et de part et d’autre se situent des abris. Ils sont construits en pierres de schiste directement prélevées sur les affleurements  rocheux  dégagés  du  sable,  et  les toitures sont recouvertes de milgreu (l’Oyat). Un certain nombre de carrières sont visibles comme celle  des  Roques  au  nord.  Enfin,  les  hougues désignent des dunes hautes desquelles on pouvait également avoir un bon aperçu de ce qui se passait dans la mielle. (La Hougue à crapaud, les Houguettes, la Hougue carrée…)

 

Au XIXesiècle, le village d’Hatainville abrite d’ailleurs une caserne de douaniers. Guetteurs permanents, les douaniers fréquentaient alors assidûment les lieux.

 

Le récit des « Pilleurs d’épaves » dans Feux sur la falaise de Jean Barneville

 

« Il y a bien des années, le village d’Hatainville passait  pour  un  véritable  repaire  de  pilleurs d’épaves. Sa situation, à proximité des courants du passage de la déroute, des falaises de Carteret et ses sables mouvants d’une plage rarement visitée, son  isolement  loin  de  toute  agglomération,  lui donnait  un  caractère  particulier.  »  Ainsi  dit-on, « les tempêtes étaient attendues avec impatience et les vents terribles du large étaient salués avec enthousiasme  […]  Pendant  les  nuits  obscures, prétendait-on  dans  la  région,  certains  habitants seraient même allés jusqu’à faire le guet, munis de  lanterne,  pour  attirer  sur  les  rochers,  des pilotes  à  la  dérive,  ainsi  trompés  par  l’illusion d’un  havre  très  prochain.  »

 

… Les dunes appelées « les Criminels » garderaient la légende des malheureux naufragés détroussés par ces pirates d’un autre genre …

 

Légende tenace sur les côtes françaises, aucune mention historique n’avère la présence de pilleurs d’épaves sur les rivages de la Côte des Isles. En revanche, de tout temps, les habitants sont toujours « allés à gravage », pour récupérer les épaves que la mer laisse échouer sur les grèves, d’où sans doute une certaine confusion dans la mémoire collective.

 

L’ascension commence à travers les dunes grises pour rejoindre la fameuse dune de « la Découverte», cette grande dune pelée que l’on voit si bien du Cap de Carteret et qui culmine à 65 mètres. Lors de la formation des dunes au cours de la dernière glaciation, il y a 10 000 ans, le sable est venu recouvrir la falaise d’anciens rivages vieux de 170 000 ans.

 

Ces placages sableux en hauteur constituent alors ce que l’on appelle des dunes perchées. C’est l’originalité géomorphologique des dunes d’Hatainville. Une vue imprenable sur l’immensité du massif jusqu’au pied du cap de Carteret s’offre au marcheur.