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Le Mont Etenclin Publié par Un regard offert | ||||||||||||
HISTOIRES INSOLITES EN MANCHE
In Procès intenté aux Sorciers de Carentan et de la Haye du Puits en 1670, par Nicolas Mauger, Revue de l’Amateur Manchois tome 2, 1886 Par Les Goubelins ⋅ mardi 21 avril 2009
Voici la retranscription d’un article paru en 1886 dans la Revue de l’Amateur Manchois concernant la célèbre affaire des sorciers du Mont Etenclin, qui fit grand bruit en 1670 dans la région, éclaboussant d’un parfum de satanisme plus de deux cent personnes...
A noter également que cette affaire a été reconstituée de manière un peu romancée mais en utilisant tous les éléments historiques, par Nicole Buffetaut dans "La Lande Ensorcelée", chez Ysec.
Vers la fin du XVIIème siècle, Carentan a été le théâtre de prétendus sortilèges qui ont donné lieu à un long et grave procès, dont les archives du Parlement de Rouen ont conservé les pièces officielles, reproduites en partie par deux auteurs contemporains, Saint-André et Boissier. Ces documents sont curieux à parcourir comme étude de l’esprit humain. On est surpris de retrouver dans ces pièces les anneaux mystérieux de cette longue chaîne de crédulité, amie du merveilleux et du surnaturel, qui se perd dans les premiers siècles de la civilisation. (...)
Le procès qui fut instruit, en 1670, à la haute justice de la Haye du Puits et au bailliage de Carentan contre les sorciers qui tenaient leurs réunions dans le bois d’Etenclin, situé à Varenguebec près de l’ancienne abbaye de Blanche-Lande, est demeuré célèbre dan sles traditions de la localité. L’instruction de cette affaire sembla prouver qu’il y a avait quatre sabbats généraux par an. Le plus solennel était celui de la Saint-Jean, parce qu’on distribuait aux initiés la graisse dont ils devaient se frotter le corps quand ils voulaient aller au sabbat et de la poudre de maléfice en usage pour faire le mal. De ce nombre étaient, les gogues ou boulettes empoisonnées qui, placées dans les abreuvoirs faisaient mourir le bétail de son ennemi. La recette de cette graisse était étrange. Chaque sorcier se rendant au sabbat portait en main une branche de fougère, de gui, de plantain ou d’armoise.
Le diable, sous la forme d’un bouc ou d’un homme noir, recevait ces palmes et les plaçait après une aspersion fort étrange, dans une vaste chaudière où des crapauds, des couleuvres et des nouveaux-nés, coupés par morceau, servaient de base à l’horrible pot-au-feu, d’où le diable tirait la graisse qu’il distribuait aux sorciers la veille de la Saint-Jean (lettres de Saint-André au sujet de la Magie, pages 324, 327 et 385).
Dans le procès de 1670, un grand nombre de personnes furent fortement compromises. Antoine Questier, curé de Coigny, canton de la Haye-du-Puits ; Charlotte Levavasseur, sa belle-soeur, qui fut condamnée à mort comme sorcière, Mademoiselle de Lilletot qu’on accusa d’avoir près d’elle un diable transformé en chien noir ; Jacques Noël, de la Haue-du-Puits ; Charles Basneville de Varenguebec ; Charles Godefroy, élève du collège de Coutances ; Jacques le Harivel dit Plein-de-Vin, et un grand nombre d’autres subirent diverses peines. Le Parlement de Normandie qui, dans la première moitié du XVIIème siècle, s’était signalé par ses rigueurs contre les sorciers fut saisi, en 1670, de l’appel de 34 sorciers découverts à la Haye-du-Puits et aux environs, qui venaient d’être condamnés à mort au bailliage de Carentan. Quatre d’entre eux allaient être livrés au supplice, quand des lettres du roi vinrent commuer leur peine, et ordonner, quant aux autres, de surseoir jusqu’à la réception de nouveaux ordres. Le roi, après un long et minutieux examen des procédures et malgré les remontrances du Parlement, qui laissait voir une vive sympathie pour les rigueurs alors en usage dans la Normandie contre les sorciers, déclara éteintes et supprimées toutes les procédures instruites en Normandie contre les sorciers, et ordonna d’ouvrir les prisons à ceux qui y étaient détenus pour fait de sortilège seulement. ainsi, grâce à l’esprit éclairé du monarque, les sorciers de la Haye-du-Puits eurent la vie sauve, et ainsi cessèrent des rigueurs qui n’avaient plus cours qu’en Normandie. Dans ce curieux procès se trouve une lettre du 1er octobre 1688, dans laquelle l’abbé Le Bourgeois, curé de Cérences, s’étonne "que sur la lande d’Etenclin les juges n’aient point remarqué la trace des pas des sorciers danseurs et la place de la chaudière où Satan faisait son orviétan diabolique». | ||||||||||||
Varenguebec l'église début 1900, CPA collection LPM 1900 | ||||||||||||