CREANCES
   CC 10.04 CANTON DE LESSAY
   
  LA CULTURE MARAICHERE
         
 

Les Créançais coupaient déjà chaque année du varech sur les rochers et l'utilisaient comme engrais.  Collection CPA LPM 1900

 
     
 

Extrait de Créances et les Créançais au fil des siècles et des ans

de Joseph Fromage


En 1251, les Créançais devaient déjà cultiver des légumes puisque le monastère de Lessay avait droit, entre autres, aux deux tiers des aulx et des oignons procurés par les dîmes de leur paroisse.

Au début du XVIIIe siècle, la qualité de pays maraîcher de Créances est déjà clairement établie. Manquant sans doute de terrains, les Créançais défrichent, sans demander l'autorisation du seigneur, les sables des mielles de la comté. Ils vendent leur production sur tous les marchés de la région. Comme les femmes des autres paroisses n'entendent rien à la culture des légumes et répugnent, semblent-il, à s'y consacrer, il se marient de préférence entre eux.

 

Le premier texte administratif mentionnant la culture maraîchère à Créances (oignons, poireaux, panais, carottes.) et précisant que la commune est "renommée par tous les marchands" est une lettre du maire en date du 14 février 1801. A cette époque, les Créançais coupaient déjà chaque année du varech sur les rochers et l'utilisaient comme engrais.

 

Pendant le XIXe siècle, Créances produit tous les légumes susceptibles de se vendre mais surtout beaucoup de melons. Certains cultivateurs en élèvent près de 4000 pieds dans de petites pièces protégées du vent. Tous les légumes continuent d'être vendus sur les marchés. Pour les villes éloignées, comme Cherbourg, Vire, Bayeux, Caen, on utilise une charrette; pour les autres, les légumes sont souvent transportés "à somme" sur le dos des chevaux, des mulets ou des ânes. L'élevage reste important, surtout le long du havre et au Buisson: en 1866, on dénombre 409 chevaux, 310 vaches, 57 boeufs et 1464 moutons à Créances.

 

Les méthodes de travail sont manuelles et l'outillage rudimentaire.

 

Il y a peu de charrues et beaucoup d'outils sont en bois. On défonce les terrains sableux jusqu'à un mètre et plus de profondeur; on retourne la terre à la bêche et on casse les mottes à la main. 

 

A la veille de la Grande guerre, les techniques ont peu évolué à l'exception des bêches qui sont désormais entièrement en fer. En 1913, on dénombre dans la commune : 6 charrues, 2 arraires et 3 faucheuses mécaniques. La culture du melon est en nette régression mais celle du plant à piquer: choux, poireaux et surtout betteraves fourragères, etc. s'est beaucoup développée. Les Créançais vendent leur production sur trente-cinq marchés et, chaque semaine, plus de cent charrettes chargées de récoltes  quittent la localité pour s'y rendre.

 

Les premières expéditions de légumes aux halles centrales de Paris par un négociant créançais ont lieu en 1919. La culture de la carotte commence alors son développement. Elle est transportée sur la capitale dans des wagons, en vrac et non lavée. Les premiers lavages ont lieu à la main. Ils se généralisent en 1928 avec l'arrivée des premières machines à laver. Le travail des sables s'étend dans les mielles; l'utilisation massive du varech et les apports de tangue permettent d'obtenir des  légumes d’excellentes qualités, notamment de très belles carottes.

 

Avant la guerre 1939-1945, deux groupements professionnels se créent afin de vendre directement la production maraîchère de leurs adhérents. Le plus ancien se transforme en coopérative maraîchère en 1943.

 

Après la guerre, la culture des légumes se répand partout, dans les mielles et dans les dunes. Le commerce est en plein développement: la S.P.A.C. crée des préparations inédites (pot-au-feu, salsifis épluchés) sous sachet transparent. Vers 1960, outre la coopérative, Créances compte dix grossistes. Le nombre de maraîchers diminue et mais ceux qui restent se modernisent à un rythme accéléré et bouleversent leurs méthodes de travail.

 

Actuellement, Créances produit en grosse quantité des carottes et des poireaux et les vend en France et à l'étranger. Il reste qu'un nombre important de maraîchers, comme leurs ancêtres, continuent de commercer sur les marchés de la région et cultivent tous les légumes demandés par leurs clients. Les techniques et les méthodes utilisées sont celles de l'agriculture moderne. Cependant, l'utilisation du fumier, acheté dans les fermes du bocage, est important et le ramassage du varech à la mer n'est pas abandonné. Enfin, actuellement, les producteurs se concertent pour mette en place dans leurs exploitations des mesures agri-environnementales.

 
     
 

Creances, CPA collection LPM 1900