CERENCES
CC 07.03 GRANVILLE TERRE ET MER
   
FAITS HISTORIQUES
     
 

Cérences, collection CPA LPM 1900

 
     
 

Cérences - article Renault 1854

« Annuaire de la Manche »

 

Dans le XI° siècle, Cérences faisait partie du domaine ducal de Normandie ; car Richard III, duc de Normandie, épousant au mois de janvier 1027, la princesse Adèle, fille de Robert, roi de France, affecta à la dot de sa fiancée plusieurs cours ou domaines, au nombre desquels figure Cérences : concedo quoque super eumden fluvium Senae (la rivière la Sienne) cartem quae appelatur Cerencis .

 

Le château et la vicomté de Cérences appartenaient autrefois au Comté de Mortain. Aussi, vit-on Robert, comte de Mortain, donner à son église Saint Evrout et aux moines du Rocher la dîme des revenus de son moulin et de sa forêt de Cérences qu’on appelait aussi forêt de Folligny, avec XX livres de rentes sur la recette du même lieu de Cérences. Quand plus tard, il fonda dans sa ville, au château de Mortain, un chapitre de chanoines, il lui donna, entre autres choses, la dîme du marché, du moulin et des anguilles péchées à Cérences : apud cerentias decimam telonei et molendini et anguillarum.

 

Lorsque Geoffroy Plantagenet, comte d’Anjou, vint en Normandie, après la mort d’Henri 1er , pour y défendre les droits de sa femme Mathilde contre les prétentions d’Etienne de Blois, il reprit plusieurs châteaux, au nombre desquels était celui de Cérences : ipse aulem movens exercitum Cerentias venit quo sine ferro recepto ad Bricatim (Avranches) civitatem venit

 

Après la mort de Philippe, comte de Boulogne, fils de Philippe-Auguste, roi de France, on fit le partage du comté de Mortain : on en composa trois lots. Le second lot qui échut à la comtesse de Boulogne, comprit, entre autres domaines, Cérences, Cerencie ; Montchaton, Mons Catonis et la terre de Richard Leriverenc, sise à Cérences, terra ricardi Leriverenc apud Cerencias. Dans le premier lot figurèrent Coutances, Constancie ; Baudreville, Baudrevilla ; Contrières, Contrerie ; Ancteville, Anquetevilla ; Geffosses, Guinoufosse ; Saint Sauveur, Sanctus Salvator ; Muneville, Munevilla ; Grimouville, Grimouvilla ; Créances, Criencie ; La Feuillie, Foilleia ; Linverville, Livervilla ; Gouville, Goouvilla ; Le Homméel, Hommeel ; Anneville, Anslavilla ; Savigny, Savigneium ; Servigny, Sirvigniacum ; Saussey, Sauceium ; Hudimesnil, Heudoin-mesnillum ; la foire de Muneville, feria de Munevilla. Cet acte précieux pour l’ancienne topographie du pays, fut fait à Rouen à l’échiquier de Pâques, au mois d’avril 1235.

 

Lorsque Henri II, duc de Normandie, fit rédiger le Livre rouge de l’Echiquier, Hugues de Beauchamp tenait dans la vicomté de Cérences un fief de chevalier, dépendant du roi, sous le comté de Mortain. Deux autres fiefs, situés aussi à Cérences, dépendaient du même comté. Hugues de Carbonnel tenait l’un, et Olivier de Tracy l’autre. Tous les deux devaient le service au château de Mortain. L’un des ancêtres de Hugues de Carbonnel était à la conquête de l’Angleterre avec Guillaume de Falaise.

 
     
 

Cérences, collection CPA LPM 1900

 
     
 

Plusieurs aveux rendus, dans le XIV° siècle, fournissent sur Cérences quelques faits historiques, et des renseignements sur les revenus des terres, qui ne sont pas sans intérêt. Ainsi, on lit dans un aveu de l’année 1327 que, dans la sergenterie de Cérences, « M° Nicolle Baudre, tient du roy nostre sire un petit franc fieu gage plege qui est appelé fieu de Mons et vaut environ 25 livres de revenu ».

 

Dans un autre, que « Fouques de Sainte-Marie prestre tient en la paroisse de Cérences du roy nostre sire une vavassorie qui vaut communes années 10 livres et est tenue franchement à gage-plège. » On voit qu’en l’année 1327, «Richard deTorcheboeuf tient du roy notre sire en la paroisse de Cérences un moulin appelé le petit moulin de la chaussiée (Chaussée) avec toute la chaussiée et toute la terre qui appartenoit au vivier au temps qu’il estoit vivier et avec le giste du dict vivier les brecs et escluses par ou l’eau venoit au dict moulin et avec toutes les appartenances au dict moulin de quelle condition qu’en soit pour 25 livres 10 sous de rente rendant la moitié à la Saint-Michel, et l’autre moitié à l’échéance de Pasques et le tient le dict écuyer par lettres du roy nostre sire et vaut au dict Richard chacun an 80 livres ou viron…»

 

Dans un autre aveu, on lit que « Guillaume Carbonnel, chevalier, seigneur de Sordevast, tient du roy nostre sire, un fief de haubert à Cérences, à Lengronne, à Heugueville, à Tourville, à Orval, à Montchaton, à Renieville, adjoints au dit fieu de Cérences par grâce du prince qui vaut ou peut valloir de revenu bon an mal an 220 livres. Item il tient outre ycelui fieu le patronage de l’église de la dicte ville de Cérences qui rent au dixiesme 200 livres. Item il tient à Cérences la tour de Cérences dont il rent au roy 20 s. à la St Michel et 20 s. à Pasques… Et pour le dict fieu de Cérences il doit services de 53 hommes armés trois jours et trois nuits au pertuis de Saquespée… ».


Ce Guillaume Carbonnel céda à Robert, évêque de Coutances, une partie de la dîme des blés de Cérences ; car on lit dans une charte de l’année 1303 que l’évêque concéda cette portion de dîme pour la fondation d’une chapelle dans la cathédrale : damus et concedimus intuitu charitatis medietatem portionis decime bladorum crescentium in parochia de Cerenciis quamquidem decimam acquisivimus a Guill. Carbonnel armigero.

 

Dans l’état des fiefs de l’élection de Coutances, on voit qu’en l’année 1327 Allis de Courcy, veuve d’Olivier Paynel, tenait à Cérences, de Guillaume de Montfort, un quart de fief de haubert, appelé le fief de Guelle. A cette époque, le fief principal de Cérences devait encore appartenir à la famille de Carbonnel ; car on trouve que Jean de Carbonnel, chevalier, qui avait épousé Marguerite Le Cointe, et qui mourut en 1404, était alors seigneur de Cérences, et que son fils, Henri de Carbonnel, l’était encore à la fin du siècle.

 

Dans le cours du XVII° siècle, on comptait à Cérences quatorze fiefs nobles. Trois dépendaient des domaines du roi et des vicomtés de Coutances, Gavray et Cérences, et ils en avaient les vicomtes pour sénéchaux.

 

Les fiefs le Tourneur, Pirou et le Vallois, dépendant de la baronnie de Bréhal, appartenaient au duc de Longueville. Les tenants devaient comparaître aux plaids de la baronnie.

Les fiefs de la Grande Sieurie, des Grandes Hiettes et de Maupertuis appartenaient à Louis de Montgommery, écuyer, sieur de Chantelou.

 

Les deux fiefs de Guelle étaient, l’un à Henri-Robert Lecourt, écuyer, sieur de Sainte-Marie, et l’autre au comte de Vezelay.

 
     
 

Cérences, collection CPA LPM 1900

 
     
 

Les héritiers de Costentin possédaient les fiefs du Mesnil-Vaudon et de la Molière. Raoul du Saucey, seigneur de Gratot dans le XIV° siècle, avait possédé le fief de Mesnil-Vaudon, qui valait alors trente sols. Il le tenait par hommage du seigneur de Saint-Denis.

 

Robert Tanqueray, conseiller au présidial de Coutances, avait le fief des Petites Hiettes.

 

Il y avait à Cérences, à la même époque, sept moulins à blé qui marchaient par eau. Les deux moulins de Saint-Nicolas et celui des Etrainville appartenaient au sieur de Chantelou. Leurs revenus étaient de 400 livres.

 

Le Court de Sainte-Marie avait les trois moulins de Guelle.

 

Et le moulin de la Chaussée, valant 60 livres de revenu, dépendait du domaine de Périers.

 

Les grands rôles de l’Echiquier de Normandie, tenus à Caen, en l’année 1180, nous fournissent quelques détails sur les revenus de la ferme de Cérences. On y voit, entre autres, que « le receveur de la ferme de la vicomté de Cérences, s’acquittant des aumônes établies, donne au trésorier de Mortain six livres ; au matriculaire c’est à dire à celui qui tenait les registres de l’église collégiale, 40 sols ; pour le luminaire de la même église, 40 sols ; au doyen, pour sa dîme, 7 livres 4 sols ; pour l’ échange d’Yvrande, 7 livres ; enfin, il fournit encore, à cause de l’aumône devenue coutumière, 8 sols à un garde, forstario castanoarie. » Il est écrit à la suite de ce rôle : Ecclesia de Cerences ex donatione regis de comitatu Moritonii.

 

Ces grands rôles normands nous apprennent qu’il y avait à Cérences une léproserie, et qu’elle recevait 4 sols 6 deniers de rente sur l’aumône établie.

 
 

Cérences, collection CPA LPM 1900