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Bricqueville sur Mer, Collection LPM CPA 1900 | ||||||||||||
Revue monumentale et historique de l’arrondissement de Coutances Renault, « Annuaire du département de la Manche » 1854
Bricqueville près la Mer Bricqueville, Bricvilla, Brechevilla, Bricquevilla.
On sait que le nom de cette commune se compose du mot Bric ou Brec, nom de famille, augmenté du mot villa, qui signifie demeure, habitation.
A l'extrémité de la commune, sur les bords de la mer, on voit encore quelques ruines du château de Bricqueville-sur-Mer, appelé le Château de Grimaldi, forteresse qui, disait-on, remontait au IX° siècle.
L'enceinte, de forme carrée, était flanquée de quatre tours circulaires aux quatre angles. Ces tours, dépourvues de créneaux, avaient environ trente pieds de hauteur.
Ce château fut démoli il y a soixante ans environ.
Après la mort de Henri Ier, duc de Normandie, Etienne, comte de Boulogne, neveu de Henri, et petit-fils du Conquérant par Adèle, sa mère, homme entreprenant, s'empara du trône d'Angleterre, et se fit déclarer duc de Normandie. Mathilde, de son côté, fit valoir les volontés de son père, qui l'avait fait reconnaître son héritière par tous les barons normands. Tandis qu'elle se montrait en Angleterre, Geoffroi, comte d'Anjou, son mari, se jeta sur la Normandie. Presque tous les barons se soumirent et lui firent hommage. Raoul de La Haye et son frère Richard tinrent pour la cause d'Etienne. Maîtres de plusieurs châteaux-forts, ils voulurent arrêter Geoffroi dans le cours de ses conquêtes. Ils levèrent des troupes, garnirent leurs forteresses d'hommes et de vivres, et se mirent en campagne ; mais Raoul fut battu, et obligé de rendre les châteaux-forts de Muneville, de Chanteloup et de Bricqueville-sur-Mer.
Le domaine de Bricqueville a appartenu â la puissante famille des Paynel. Ainsi, on voit qu'au commencement du XIII° siècle, Fouques Paynel tenait le fief de Bricqueville-sur-Mer de l'abbaye du Mont-Saint-Michel et devait le service d'un chevalier. Fulco Paganellus tenet de illo (de abbate Montis) Briquevillam per servicium unius militis.
L'état des fiefs de l'élection de Coutances, que le grand bailli de Cotentin rédigea en l'année 1327, nous apprend qu'alors la seigneurie de Bricqueville appartenait à Gilbert de Malesmain. Ainsi, on lit dans un aveu de la même époque que M. Raol de Saucey, clerc, tient un tènement à Bricqueville« sur-la-Mer, de Guillebert Malesmain, escuyer, par hommage, et vaut soixante sous de revenus ou viron, bon an mal an. »
Après Gilbert Malesmain, la seigneurie de Bricqueville, du moins en partie, appartint â Guillaume de Tournebu, car un acte du roi Charles V, dans le cours du XIV° siècle, nous apprend que « en la baronnie de S. Paer il a pluseurs porz de » mer ou il arrive ou peut ariver de jour en jour pluseurs vesseaulx denrées marchandises desqueles les cous-tumes et autres devoirs appartiennent aux religieulx du Mont Saint-Michel et nient-mains Guillaume de Tournebu chevalier sire de Briqueville sur la Mer pour partie et par cause de sa fame laquele terre est tenue par hommage des diz religieux pour cause de leur dite baronnie et assise es metes d'icelle…, en icelle terre de Briqueville avoit un port de mer appelé Lessay de Briqueville enquel maintes denrées et marchandises venanz en neefs et autres vesseaulx de mer arivent ou peuvent ariver et descendre et aussi de la terre charger es diz vesseaulx pour entrer en mer.» | ||||||||||||
Bricqueville-sur-Mer, faucheurs de varech. CPA 1910 Collection LPM CPA 1900 | ||||||||||||
Cet acte, intéressant par les détails qu'il nous fournit sur le port de Bricqueville-sur-Mer, nous apprend encore que Guillaume de Tournebu avait obtenu, à l'insu des religieux, un marchié au jour du vendre-di en la dite ville de Bricqueville et une foire… Mais le roi, sur la réclamation sans doute des religieux du Mont-Saint-Michel, révoqua le privilège, et supprima la foire et le marché. Il paraît que le domaine de Bricqueville redevint la propriété de la famille Paynel ; car Nicolas Paynel, seigneur de Bricqueville, et qui était fils de Fouques Paynel et d'Agnès de Chanteloup, demanda au roi Charles VI la permission de relever son château et d'en rebâtir les tours . Ce Nicolas Paynel épousa Jacqueline de Varenne, veuve de Raoul Tesson, seigneur du Grippon. Leur fils Jean fut aussi seigneur de Bricqueville. Plus tard, un de leurs descendants se maria à Jeanne du Mesnildot.
Nicolas Paynel, qui était encore seigneur de Bricqueville lors de l'occupation anglaise, resta fidèle à la cause de la France. Henri V, roi d'Angleterre, confisqua son château et ses terres, et les donna au comte de Huntingdon. Le 28 septembre 1421, le roi chargea Guillaume, comte de Suffolk, et Jean d'Arsheton, son bailli dans le Cotentin, de raser les forteresses de Bricqueville et de Chanteloup.
Après l'expulsion des Anglais, la seigneurie de Bricqueville rentra dans la famille Paynel, qui, plus tard, la porta par un mariage dans celle des de Piennes. Vers la fin du XV° siècle, un des membres de cette famille vendit le domaine de Bricqueville à Elisa-beth do Montboucher, veuve de Jean de Montgommery.
Ce domaine resta la propriété des Montgommery pendant plusieurs siècles; mais, en l'année 1769, la marquise de Thiboutot, qui en était devenue propriétaire, le vendit à Pierre Duprey, conseiller du roi, lieutenant ancien civil et criminel au bailliage de Coutances. Une de ses filles, Françoise-Louise-Victoire Duprey, le porta en mariage à Philippe-François-Henri Abaquesney, écuyer, seigneur et patron de Parfouru.
La religion réformée eut ses partisans dans le pays, Ainsi, on vit, en l'année 1567, un curé de Bricqueville-sur-Mer, nommé Pierre Cirou, abjurer la religion catholique et embrasser les nouvelles doctrines. Il ne voulait ni dire la messe, ni administrer les sacrements à ses paroissiens, et cependant il prétendait percevoir les dîmes qu'on refusait de lui payer. L'official de Coutances le fit appeler, et se contentant de le réprimander, il le renvoya gouverner sa paroisse. Cette indifférence de l'autorité religieuse supérieure engagea plusieurs prêtres à adopter la nouvelle religion, qui leur offrait une doctrine plus conforme à leurs penchants.
Dans le cours du XVII° siècle, il y avait à Bricqueville neuf fiefs nobles.
- Les fiefs de la grande Sieurie de Bricqueville, Saint Eloy et les Maizieres appartenaient au seigneur de Montgommery. - Les fiefs de la Saucée et d’Annoville étaient au seigneur de Cerisy. - Celui de la Vallée au seigneur de la Bazoche. - Celui de Beaumanoir appartenait au seigneur d'Auxais. - Celui de la Motte, qui n'était qu'un démembrement de la grande Sieurie, appartenait à Jean-Baptiste Pillon.
On trouve comme seigneurs et patrons de Bricqueville-surMer dans les XVII° et XVIII° siècles : Jean-Charles Michel, chevalier, seigneur aussi de Camprond, Cambernon et gouverneur de Coutances. Sa veuve, Elisabeth de la Vieuville, prenait le titre de châtelaine et patronne de Bricqueville, Sainte-Marguerite et Saint-Martin-le-Vieux.
François-Louis Michel; il épousa Marie-Madeleine de Cauvet.
Pierre Duprey ; il prenait les titres de seigneur, châtelain et patron de Bricqueville, Chanteloup, Cérences, Saint-Martin-le-Vieux et Verge de Sainte-Marguerite.
Bricqueville-sur-Mer est aussi nommé Bricqueville-les-Salines, à cause du sel qu'on y fabrique. Cette industrie, autrefois fort étendue, a perdu toute son importance. On comptait à Bricqueville plus de soixante salines qui aujourd'hui sont réduites à trois. Celle décadence des salines remonte à la fin du XVIII° siècle, époque lors de laquelle on supprima les droits et les règlements. Le sel qu'on fabrique à Bricqueville est fin et blanc, et s'obtient par ébullition. | ||||||||||||
Bricqueville-sur-Mer. Collection LPM CPA 1900 | ||||||||||||