BREHAL
  CC 07.01 GRANVILLE, TERRE ET MER
   
 

SAINT-MARTIN LE VIEUX

CAHIERS DE DOLEANCES

         
 

Saint-Martin-Le-Vieux, CPA collection LPM 1900


Les cahiers de doléances de Saint-Martin-le-Vieux

Extrait de « Bréhal-Chanteloup » Pierre BEHIER ; OCEP 1969

 

Procès-verbal d’Assemblée

(Le procès-verbal authentique n‘a pu être retrouvé)

 

Nombre de feux : 15. Députés : Pierre Marie RABASSE, chirurgien (2 jours, 6 l ; Acc.) ; Louis André LE TOUQUERAND, laboureur (2 jours, 6 l. Acc.).

 

Cahier de doléances

 

Doléances, plaintes et remontrances de la paroisse de Saint-Martin-Le-Vieux, diocèse de Coutances, doyenné de Saint-Pair.

 

Cette paroisse maritime extrêmement petite dans son territoire, puisqu’elle n’est habitée que par quatorze particuliers y possédant fonds, est relativement à son étendue, grevée d’une multiplicité d’impôts exorbitants , qui réduisent presque tous ses malheureux habitants à une affreuse indigence. Car outre que chacun d’eux n’y est propriétaire que de très peu de terrain, la majeure partie d’icelui étant possédé par des particuliers des paroisses circonvoisines, il est encore obligé de se constituer en des frais et en travail considérable pour faire fructifier son sol, qui étant élevé et très aride, ne produirait rien ou presque rien, si tous les ans il n’était engraissé de nouveau. Voilà cependant l’unique ressource de tous et chacun de ses habitants, n’y aient dans l’endroit aucune espèce de commerce.

 
 

 

 
 

Saint-Martin-Le-Vieux recolte du varech, CPA collection LPM 1900


Cette paroisse, toute petite qu’elle est, est encore coupée par un grand nombre de chemins vicinaux et publics, qui à raison de ce qu’ils sont très exploités par les habitants des paroisses limitrophes, pour l’enlèvement des engrais de mer, obligent les bordiers à des réparations très coûteuses, par la rareté de la pierre ou moellon nécessaire à leur entretien. Cette communauté ne peut trop marquer son amertume du genre de violence qui tous les ans y ôte aux infortunés vieillards leur unique soutien et des bras à l’agriculture, dans les jeunes gens qu’on lève par la voie du sort, ou pour servir en tant que canonnier garde-côtes, ou pour être embarqués sur les vaisseaux de Sa Majesté. Car cette paroisse, comme celle des environs sur la côte, ne se trouve déjà que trop dépeuplée par le grand nombre de jeunes gens que leur goût naturel fait librement prendre le parti de la marine, sans y forcer outre leur inclination ceux qui ne paraissent pas nés pour être destinés à cet état. Et il est de remarque constante, que tous ceux levés par le sort pour la marine et qui ont été embarqués par force, il n’en est presque pas revenu, tandis que les paroisses du bocage beaucoup plus peuplées que celles de la côte, fournissent ou librement ou forcément infiniment moins d’hommes pour les services du Roy.

 

Cette paroisse se plaint encore des corvées qu’elle est obligée de faire souvent.

 

Elle se plaint de la lenteur, pour ne rien dire de plus, avec laquelle la justice est rendue par la municipalité, des formalités peu nécessaires qui entraînent des dépens excessifs, dans des procès que des intérêts nécessitent quelquefois.

 

Et pour borner aux représentations, elle a enfin l’honneur de remontrer qu’un marais d’une certaine étendue, lequel lui est commun avec les paroisses de Longueville, Donville, Bréville et Coudeville , n’est dans l’état où il est que de très médiocre utilité pour ces paroisses, par rapport aux eaux de la mer qui le couvrent en majeur partie dans les grandes marées, y stagnent, et, par la corruption que bientôt elles éprouvent, répandent dans les environs des exhalaisons funestes, qui y occasionnent tous les ans des maladies de fièvres longues et souvent mortelles ; outre qu’elles en rendent impossible toute espèce de cultures. Ce marais serait cependant, au moyen d’une digue facile à établir pour en défendre l’entrée à la mer, d’un grand avantage aux habitants de ces paroisses y ayant droit, si à leur désir et selon leurs vœux, il se trouvait partagé entre eux en proportion des propriétés de chacun. Alors par la culture dont il serait susceptibles et l’amélioration qu’on y pourrait faire, étant intermédiaire entre ces paroisses et le rivage de la mer, il leur deviendrait non seulement d’un grand secours et pour la production de blé et pour le pâturage des bestiaux nécessaire à l’agriculture, vu qu’ils n’ont d’ailleurs que fort peu de terrain qui y soient propres ; mais ils les préserverait de cette cause de maladies fréquentes, qui en en moissonnant un grand nombre, laissent ceux qui n’en périssent pas dans des langueurs de souvent plusieurs années. Le peu de terrain possédé par les habitants de cette paroisse est encore grevé de beaucoup de rentes seigneuriales et foncières, au point que les propriétaires en plus grand nombre ne sont guère que fermiers du terrain qu’ils ont entre leurs mains . A joindre qu’une partie de la paroisse voisine du marais susdit se trouve souvent submergée par la mer, ce qui lui cause un dommage considérable et ôte absolument au malheureux cultivateur tout le fruit de ses sueurs, et à sa famille désolée l’aliment qu’elle en attendait.

 

Justice pour les riches, compassion pour les pauvres, sont les vœux ardents de la communauté de la paroisse de Saint-Martin-le-Vieux.


 

Fait pour être présenté à l’assemblée du bailliage du Cotentin devant se tenir à Coutances, le 2 mars 1789.

 

THUILLET C. de S.M, L. TOUQUERANT, Pierre SU, Jacques FAUNY, DUREY, POTIER, J. LEMOINE, François GUYOT, RABASSE.

 

Saint-Martin-Le-Vieux, CPA collection LPM 1900