LES CHANSONS DE BERANGER
 

MARGOT

   
         
 

Air : Car c’est une bouteille

 

Chantons Margot, nos amours,

Margot leste et bien tournée,

Que l’on peut baiser toujours,

Qui toujours est chiffonnée.

Quoi ! L’embrasser ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Moquons-nous de ce Blaise :

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.

 

D’un lutin c’est tout l’esprit ;

C’est un cœur de tourterelle.

Si le matin elle rit,

Le soir elle vous querelle.

Quoi ! se fâcher ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Voilà comme on l’apaise :

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.

 

Le verre en main, voyez-la ;

Comme, à table, elle babille !

Quel air et quels yeux elle a

Quand le champagne pétille !

Quoi ! l’air décent ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Mets ta pudeur à l’aise :

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.

 

Qu’elle est bien au piano !

Sa voix nous charme et nous touche.

Mais devant un soprano

Elle n’ouvre point la bouche.

Quoi ! par pitié ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Ici point d’Albanèse :

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.

 

L’amour, à point la servant,

Fait pour Margot feu qui flambe ;

Mais par elle il est souvent

Traité par-dessous la jambe.

Quoi ! par-dessous ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Il faut bien qu’il s’y plaise :

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.

 

Margot tremble que l’hymen

 

 

Illustration de Marcel Bloch,

collection CPA LPM 1900

 

De sa main ne se saisisse ;

Car elle tient à sa main,

Qui parfois lui rend service.

Quoi ! pour broder ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Que fais-tu sur ta chaise ?

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.

 

Point d’éloges incomplets,

S’écrîra cette brunette :

À moins de douze couplets,

Au diable une chansonnette !

Quoi ! douze ou rien ? dit un sot.

Oui, c’est l’humeur de Margot.

Nous t’en promettons treize :

Viens, Margot, viens, qu’on te baise.