MARECHAUX D'EMPIRE

MARECHAL PONIATOWSKI (1763-1813)

         
 

BIOGRAPHIES

DES MARECHAUX D'EMPIRE

Extrait du dictionnaire

Larousse du dix-neuvième siècle


Le vrai roi de Pologne,

c’était Poniatowski ;

il réunissait tous les titres,

et il en avait tous les talents.

 

         Napoléon Bonaparte

 

Maréchal PONIATOWSKI (le prince Joseph), général polonais et maréchal de France, né à Varsovie en 1763, mort près de Leipzig en 1813. C’est le plus illustre des membres de cette famille et celui qui a le plus contribué à rendre la cause polonaise populaire en France.

 

Sa bravoure chevaleresque lui fit donner le surnom de Bayard polonais, et notre grand poète Béranger lui a consacré une de ses odes immortelles. Il était neveu du roi Stanislas-Auguste et fils d’André Poniatowski

 

Maréchal Poniatowki

 
         
 

Né en 1735, mort en 1773, qui, ayant été nommé ambassadeur de Pologne à Vienne en 1764, prit peu après du service dans l’armée de Marie-Thérèse et reçut le grade de lieutenant général d’artillerie. Le prince Joseph fit ses premières armes dans l’armée autrichienne, au service de Joseph II, et se distingua dans la guerre contre les Turcs (1787), rentra dans sa patrie en et s’occupa de la réorganisation de l’armée polonaise. Pendant la guerre de 1792 contre les Russes, on lui confia la défense des points les plus importants de la Pologne et le commandement de l’armée du Midi. Il remporta de brillants avantages à Zielenka et à Dublenka ; mais sa déférence aux ordres contradictoires de son oncle, le roi Stanislas, lui donna une apparence d’indécision qui mécontenta ses compatriotes. Cependant, après que le roi eut accédé à la confédération de Targowitz, prélude du partage de la Pologne, il donna sa démission et se retira à l’étranger. L’insurrection polonaise de 1794 le ramena dans le camp des patriotes ; il s’enrôla comme simple volontaire sous les drapeaux de Kosciusko, reçut le commandement d’une division, s’illustra par la défense de Powonski et rendit de grands services pendant les deux sièges de Varsovie. On sait quelle fut l’issue désastreuse de cette lutte ; désespérant presque de sa patrie et de ses destinées, Poniatowski se retira à Vienne et refusa noblement les offres brillantes de Catherine II. L’entrée des Français en Pologne, après la bataille d’Iéna (1806), lui fit confier par le roi de Prusse le gouvernement de Varsovie, qui fut bientôt après occupée par Murat.

 

Après quelques hésitations, Poniatowski suivit l’impulsion générale de la nation polonaise, embrassa le parti des Français, fut nommé ministre de la guerre du gouvernement provisoire établi à Varsovie, organisa l’armée polonaise avec une rapidité et une habileté qui lui méritèrent les éloges de tous les généraux français, et servit fidèlement depuis lors la cause de la France, confondue avec celle de sa patrie. A la suite du traité de Tilsit (1807), par lequel fut établi le grand-duché de Varsovie, le prince Joseph conserva le ministère de la guerre et reçut le titre de généralissime, néanmoins sa position fut des plus difficiles.

 
         
 

Napoléon venait de traiter la Pologne en véritable pays conquis ; il avait laissé dans ce pays 80.000 hommes, qu’il s’agissait de nourrir, de vêtir, et avait imposé aux Polonais d’autres conditions onéreuses ; d’un autre côté, les troupes françaises commettaient de grands désordres. Heureusement, le maréchal Davout arriva à Varsovie avec le titre de gouverneur du duché, mit un terme à l’arbitraire, aux exactions, et la situation du prince Poniatowski devint moins pénible. Pour protéger Varsovie, il fortifia le faubourg de Praga, Modlin, Serock, Thorn, Czenstochowa, etc., et réussit à former une année de douze régiments d’infanterie, de seize de cavalerie, avec un parc d’artillerie convenable. Mais Napoléon dissémina ces excellentes troupes en Espagne, en Saxe, de sorte que, lorsque la guerre éclata entre l’Autriche et Napoléon en 1809, Poniatowski n’avait plus sous ses ordres que 8.000 hommes quand l’archiduc Ferdinand envahit la duché de Varsovie avec 40.000 combattants.

 

Un conseil de guerre réuni pour délibérer sur les moyens de défense se prononça pour qu’on bâtit en retraite ; mais le prince Joseph fut d’un avis contraire.

 
 
         
 

Il se couvrit de gloire en défendant avec une poignée de braves le village de Raszin contre l’armée de l’archiduc Ferdinand, empêcha par ce fait d’armes la prise de Varsovie et repoussa les Autrichiens en soulevant contre eux la Galicie. Lorsque la paix fut signée (1809), il reprit le portefeuille de la guerre, s’occupa de fonder des établissements militaires, qui manquaient à l’armée polonaise, une maison d’invalides, des écoles du génie et de l’artillerie, un hôpital militaire, augmenta considérablement les fortifications des places les plus importantes et réorganisa l’armée. Bien que, par le traité de Vienne (1809), Napoléon eût rendu à l’Autriche toute l’ancienne Galicie, que les Polonais avaient reconquise pendant la campagne précédente, bien qu’il eût cédé l’arrondissement de Tarnopol à la Russie, qu’il continuât à envoyer des troupes polonaises en Espagne, Poniatowski et ses compatriotes espéraient toujours que l’Empereur comprendrait la nécessité de rétablir la Pologne dans son intégrité, dans l’intérêt même de sa politique, et, dans cet espoir, ils supportaient tout, se montraient toujours prêts à tous les sacrifices. Lorsque éclata la guerre entre la France et la Russie, Poniatowski put fournir à l’Empereur une armée de 100.000 hommes. « Mais, dit L. Chodzko, au grand regret du prince, la majeure partie de cette armée lui fut enlevée pour être répartie dans différents corps de l’armée napoléonienne, comme avant-garde et comme interprètes. Il ne lui resta bientôt que 30.000 hommes, qui formèrent le cinquième corps, placé d’abord sous les ordres de Jérôme Bonaparte.

 
         
 

Après le départ de ce dernier, il lui succéda dans le commandement et forma constamment l’extrême droite de la grande armée. 

 

Vainement Poniatowski, qui connaissait le pays, ses ressources, son esprit, qui savait que les populations polono-ruthéniennes étaient prêtes à se soulever pour leur indépendance, que leur pays offrait d’inappréciables ressources pour servir, en cas de revers, de refuge à la grande armée, vainement le prince donna à Napoléon les plus utiles et les plus sages conseils, Napoléon ne voulut point l’entendre et commit faute sur faute. Le prince Joseph ne se conduisit pas moins, pendant toute cette funeste campagne, de la façon la plus glorieuse. Il se signala notamment par une héroïque valeur à Smolensk, à la Moskowa, à Tscherikovo, entra un des premiers à Moscou, combattit, pendant la retraite, à Malo-Yaroslavitz, à Voronovo, reçut ensuite une grave blessure, gagna Varsovie et de là Cracovie (février 1813). Bien que vivement sollicité par ses compatriotes, qui avaient perdu toute confiance en Napoléon, d’abandonner ce dernier, il refusa, rejoignit avec un corps d’armée l’Empereur en Saxe et concourut à la prise de Gabel, de Friedland, de Reichberg.

 
 
         
 

A la bataille de Leipzig, son héroïsme le fit nommer sur le champ de bataille maréchal de France (16 octobre 1813). Sans décliner cet honneur, il en fut affecté et dit à quelques-uns de ses compatriotes, qui étaient venus le complimenter : « Je suis fier d’être le chef des Polonais. Quand on a le titre unique et supérieur au maréchalat, celui de généralissime des Polonais, tout autre ne saurait convenir, par ailleurs, ma mort approche ; je veux mourir comme général polonais, et non comme maréchal de France. » Trois jours après, chargé de protéger la retraite et n’ayant avec lui qu’un petit nombre de soldats, il contint les colonnes ennemies jusque sur les bords de l’Elster ; là, pressé par des forces supérieures, ne pouvant traverser le fleuve, dont les Français avaient détruit les ponts, couvert de blessures, il refusa néanmoins de se rendre, poussa son cheval dans l’Elster et essaya de le traverser à la nage ; mais il se noya dans le trajet (1813). Sa mort fut pleurée non-seulement par sa patrie, qu’il avait aimée avec passion, mais encore par la France, qu’il avait si vaillamment et si fidèlement servie. Son corps, retrouvé seulement le 24 octobre, fut embaumé, porté à Varsovie, puis à Cracovie et déposé près du tombeau de Kosciusko. Ce vaillant et brillant général joignait à une belle figure un port noble et majestueux, des manières pleines d’affabilité et de grâce. – II ne se maria point, mais il eut de Mme Czosnowska un fils, Joseph Poniatowski, né en 1809, que sa tante paternelle, la comtesse Tyszkiewicz, adopta en qui se fit naturaliser Français et fit les campagnes de Morée, de Pologne (1831) et d’Algérie, où il mourut en 1855.