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LA NORMANDIE ANCESTRALE Ethnologie, vie, coutumes, meubles, ustensiles, costumes, patois Stéphen Chauvet. Membre de la Commission des Monuments historiques Edition Boivin, Paris.1920 |
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Lit Normand.
Après l'armoire, qui est le meuble principal de la chambre à coucher normande, et avant d'aborder l'étude de la salle commune, il me faut dire un mot du lit des fermiers normands. A cet égard, on peut ;faire une remarque analogue à celle que je mentionnerai ultérieurement, à propos des fauteuils et des chaises. Le lit normand n'a, en général, rien de particulier et n'est pas une des pièces caractéristiques de l'ameublement normand. C'est pourquoi, comme je l'explique plus loin, on parle de la chaise alsacienne-lorraine et du lit breton, et l'on ne parle ni de la chaise normande, ni du lit normand, tandis que tout le monde connaît les mérites de l'armoire, du coffre et de l'horloge normands. Le lit des Normands est, en effet, en général, un lit de chêne, fort simple. Il est même assez curieux que les artisans normands qui sculptaient si bien, n'aient pas pris l'habitude de travailler les lits à l'instar des autres meubles. Je parle, bien entendu, du lit régional, car on peut trouver, dans certaines fermes, des lits fort beaux, de tous styles; mais, quoique fabriqués en Normandie, ce ne sont pas des lits normands. Dans les chaumières, le lit [ou basse-couchej se trouve dans un coin obscur de la pièce commune, composé de planches de chêne grossièrement assemblées; il supporte une paillasse de paille d'avoine ou de fougère, parfois un matelas de laine ou plutôt de plumes de poules, deux draps de grosse toile, rapiécés et une couverture de droguet à bandes rouges et noires. Chez les paysans plus aisés, le lit est dans une pièce à part; il était parfois, à partir de l'époque Louis XVI, entouré de rideaux de toile supportés par un grand cadre de bois, ayant la forme et les dimensions du lit et suspendu au plafond. Ces rideaux étaient souvent, dans les intérieurs aisés, en toiles imprimées sur des planches de bois, gravées sous Louis XIV ou Louis XV, et, chez les paysans, soit en indienne du pays, soit en toile flammée de Rouen ou « siamoise », à dessins bleus sur fond blanc. On les rencontre, d'ailleurs, beaucoup plus communément dans toute la vallée d'Auge, région dans laquelle, chose curieuse, on trouve également quelques lits clos en bois, fort simples et jamais à deux étages comme en Bretagne.
Dans certaines régions de la Manche, en particulier dans la Hague, on rencontre non des lits clos, mais des sortes de lits alcôves constitués par quatre montants qui supportent une corniche. Des traverses réunissent les montants en haut et en bas. La traverse située à la partie antérieure et supérieure du lit est généralement moulurée et quelque peu sculptée (une corbeille de roses et des branchages). Des rideaux de toile ferment ce lit alcôve qui est, en somme, un lit clos sans portes.
Il faut signaler, enfin, que les menuisiers normands n'ont pas créé un modèle de berceau régional caractéristique comme Font fait les artisans bretons, flamands, auvergnats, alsaciens-lorrains, provençaux, etc.. Les lits d'enfants sont des sortes de caisses, munies de quatre pieds droits, et dont les côtés sont constitués par de simples baguettes plates, verticales et espacées.
Avant de terminer la description de la chambre normande, il faut mentionner que les miroirs étaient très rares. Seuls les fermiers aisés eurent, vers la fin du xvm c siècle, des petites glaces à frontons décorés de branches de lauriers et de trois roses stylisées, en relief. Les montants de la glace, en relief, étaient ornés d'encoches courbes et de quadrillages. Les glaces étaient dorées ou argentées. Ces « mirettes » servaient à la maîtresse pour ajuster sa coiffe.
Enfin, je signalerai que si, dans les fermes un peu importantes, le lit et l'armoire sont dans une chambre, par contre, dans les chaumières, ils se trouvent dans un coin de la salle commune, dont je vais, maintenant, m'occuper. |
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