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S'il n'y avait qu'un nom propre associé à l'histoire des phares de France, ce serait sans doute celui de Fresnel, Augustin Fresnel, savant et ingénieur des ponts et chaussées mort en 1827 à l'âge de 39 ans.
Il est l'inventeur des appareils lenticulaires qui, au début du XIXe siècle, révolutionnèrent les techniques employées pour l'éclairage des feux.
L'origine des phares modernes s'est en effet condensée sur les objets dont on lui attribue la paternité, des lentilles de verre conservées comme de pieuses reliques par plusieurs institutions scientifiques.
Mais la célébration d'Augustin fait oublier le rôle joué par un autre Fresnel. Dans le Calvados, sur la plaque dédiée par souscription publique aux hommes célèbres du village de Mathieu, les noms de trois Fresnel apparaissent : ceux d'Augustin, de Fulgence, l'orientaliste, et de Léonor, l'ingénieur.
Ce dernier, beaucoup moins connu que son frère, a pourtant joué un rôle décisif dans la politique de signalisation maritime de la France.
En mars 1827, Léonor rejoint le pavé de Paris, alors qu'il se consacrait depuis deux ans à l'étude d'un canal qui devait relier Paris à la mer au sein de la Compagnie du Canal de la Seine, concessionnaire du futur ouvrage.
Est-ce la débâcle financière de ce projet ou la maladie de son frère qui le pousse à rejoindre Paris et les phares ? La correspondance partielle éditée par Léonor ne fait référence qu'au deuxième événement. Sans douter des sentiments que les deux frères éprouvaient l'un pour l'autre, les déboires du Canal de la Seine donnent à sa décision de se mettre au service des phares un caractère moins sacrificiel, et donc plus humain. C'est pourtant dans la perspective de cette fidélité à son frère mort qu'il écrit au directeur général des Ponts et Chaussées, le 25 juillet 1827, quelques jours après la mort d'Augustin : "Je croirai, monsieur le Directeur Général, n'avoir pas démérité de vos bontés pour moi, et du noble héritage auquel vous voulez bien m'appeler, si je puis contribuer à hâter l'accomplissement de vos vues bienfaisantes pour l'amélioration de l'éclairage des côtes de France et à répandre la connaissance des savants et ingénieux travaux qui ont illustré mon frère ".
En 1827, et pour près de 20 ans, Léonor devient donc secrétaire de la Commission des phares, un poste qui avait été créé et confié à son frère en 1819, avec le soutien de l'astronome françois Arago, l'un des personnages les plus actifs de ladite Commission.
Quand Léonor Fresnel succède à son frère, l'inventaire de l'héritage n'est pas aussi exaltant que des lectures rétrospectives de cette période ne le laissent trop facilement croire.
En 1824, l'ingénieur écossais Robert Stevenson n'avait pas été convaincu par le dispositif installé à Cordouan et, dix ans plus tard, Léonor ne conseille pas l'adoption des appareils lenticulaires dans les îles britanniques, car les réflecteurs paraboliques installés dans les feux d'Angleterre et d'Écosse sont effica
Pendant près de 20 ans, Léonor va consolider les intuitions de son frère en menant à son terme un processus d'innovation auquel Augustin avait consacré une part importante des dernières années de sa vie.
La visite des ateliers Lepaute par les ingénieurs anglais de la Trinity House, puis l'annonce, en février 1844, de l'allumage du premier phare catadioptrique de grande taille sur le rocher écossais de Skerryvohr, marquent deux étapes importantes dans la reconnaissance internationale du travail des Fresnel, dont la consécration sera la commande, pour l'exposition universelle de 1855, d'une frise représentant les allégories féminines des nations maritimes, rendant hommage au buste du savant mort. ces et fiables.
Léonor hérite surtout de la confiance et du soutien d'un groupe d'hommes, rassemblés au sein d'une commission des phares, et qui appartiennent aux institutions scientifiques les plus prestigieuses du pays : l'Académie des Sciences, l'École des Ponts et Chaussées, le bureau des Longitudes, l'Observatoire de Paris, l'École polytechnique
Les appareils lenticulaires ne se seraient pas imposés dans les phares de France, puis du monde entier, sans l'ouverture préalable d'un espace expérimental dans lequel on donna à Fresnel les moyens de poursuivre le développement d'une idée moins originale que ses biographes ne le prétendent, puis de démontrer son efficacité face à des concurrents dont les systèmes équipaient déjà les phares de France, à la demande de la Commission.
Secrétaire de cette commission, Léonor est le premier à qui les Annales des Ponts confère le titre de directeur de l'embryon du service des phares : l'atelier central où l'administration fait construire, en régie, de petits appareils lenticulaires. Cette activité de production disparaîtra au milieu du XIXe siècle.
Dans le même temps, Léonor rédige des instructions pour l'entretien des appareils lenticulaires, inaugure les tournées d'inspection sur le littoral et se bat pour le rattachement de l'exploitation des phares au service public.
Quand il transmet en 1846 ce pouvoir à Léonce Reynaud, Léonor Fresnel a mis en place une institution qui ne se substitue pas au travail collégial de la Commission, mais qui prend à sa charge le développement technique et le contrôle du réseau des phares de France. Il peut désormais se consacrer à l'édition et à la publication des œuvres complètes de son frère, un travail qu'il poursuivra jusqu'à la fin de sa vie, en 1869. |
Augustin Fresnel |
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Léonor Fresnel |
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François Arago |
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Phare de Skerryvohr |
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Commission des phare de 1863 |
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