ET SI ON EN PARLAIT...
   
  LE GEOLIER
         
 

Sous l’Ancien Régime, il n’existe pas d’administration pénitentiaire et les prisons échappent presque totalement à l’autorité de l’Etat. Des particuliers gèrent et assurent la garde, recrutent eux-mêmes les porte-clefs qu’ils rémunèrent à leur convenance et pourvoient aux besoins des prisonniers. Autant dire qu’il faut mieux être argenté pour bénéficier de quelques commodités payantes : mobilier de location, repas, chambres particulières, chauffage, etc. « En somme, un régime de détention à la carte, sauf pour les plus pauvres, réduits au « pain du roi » et aux paillasses communes ? »

 

Quant aux geôliers, le système leur permet de réaliser des bénéfices sur les prestations fournies aux prisonniers qui peuvent se les offrir. Les abus sont multiples et fréquents.

 

Comment résister à cette facilité d’exploiter une clientèle soucieuse d’adoucir ses conditions de détention ? Comment résister à la tentation de tricher sur les droits d’écrou, de gîte, de bienvenue, de geôlage? ou sur les sommes allouées par le Trésor pour l’entretien des plus démunis ?

 

Geôlier 15ème siècle

 
         
 

En parcourant les arrêts de règlement des parlements, on n’a plus guère d’illusions sur l’honnêteté des geôliers qui inlassablement sont rappelés à l’ordre concernant les interdictions de multiplier les droits et dépassements.

 

Il est vrai que dans l’imaginaire collectif, les « geôliers » sont souvent assimilés à une bande de brutes épaisses, incultes, cupides et cruelles, qui s’engraissent sur le dos des prisonniers. Les archives criminelles de la Conciergerie du XVIIe siècle vont parfois dans ce sens, mais en leur donnant la parole, elles livrent une autre réalité. « Travailler dans une prison comme concierge, morgeur ou guichetier, greffier ou chapelain, est avant tout un métier que l’on exerce avec plus ou moins de zèle et de sens du devoir. C’est presque un métier au sens que l’on donne à ce mot avant la Révolution dans le milieu des artisans et des petits commerçants, avec ce que cela implique, notamment l’appartenance à un groupe solidaire et homogène, et une gestion quasi autonome sur le mode de l’entreprise privée, malgré le contrôle réel exercé par le Parlement.

 

Le geôlier dirige, sous l’Ancien Régime, une prison ordinaire de petit ou moyen effectif. »