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FRAISE (Fragaria) – D’après les renseignements donnés par M. Henri Coudon, la culture de la fraise est relativement récente puisqu’elle ne remonte qu’au XVIe siècle. Après être restée longtemps limitée au potager et au jardin fruitier, elle a pris de plus en plus d’extension, et aujourd’hui elle occupe des surfaces importantes. Les principales variétés cultivées sont : la Marguerite Lebreton, la Victoria et la Vicomtesse Héricart de Thury. La presque totalité de ces fraises est expédiée à Paris et à Londres, puis à Lyon, Genève, Montpellier et Cette. En Bretagne, il existe également de grands centres de production. A Plougastel, on cultive plus de 500 hectares de fraisiers, dont les produits sont expédiés surtout en Angleterre. Aux environs de Paris, on s’adonne beaucoup à cette culture depuis quelques années. | | |||||||
PLANTES QUI NOURISSENT PLANCHE IV -23 FRAISE | ||||||||
Dans la vallée de l’Yvette, il existe environ 300 hectares de fraiseraies ; on en compte de 800 à 1000 dans les communes que traverse la Bièvre, avant d’entrer dans Paris, et plus de 500 dans la vallée de l’Orge. A Paris, la fraise est, sans contredit, le fruit qui se vend le mieux et celui qui arrive en plus grande quantité sur le marché.
Les forts arrivages aux Halles durent environ six semaines. Ils comprennent, en premier lieu, les fraises du Midi de la France, qui arrivent par chemin de fer, pendant 21 jours. Puis ces arrivages cessent et sont remplacés par les apports directs des cultivateurs qui amènent, au moyen de voitures, les fraises plus tardives des environs de Paris et dont la saison dure également 21 jours. La vente subit des fluctuations assez grandes, comme on le voit par les chiffres suivants : 1895, 330 285 kilogrammes, 1896, 328 155 kilogrammes ; 1897, 508 510 kilogrammes ; 1898, 181 610 kilogrammes ; 1899, 266 320 kilogrammes.
Mais le pavillon officiel de la Ville de Paris (pavillon n° 6) est concurrencé par environ 80 maisons de commission et 50 approvisionneurs qui, par suite d’une tolérance de la Préfecture de police, vendent également de la fraise dans le périmètre des Halles et sur le carreau forain. Il en résulte que les transactions sur la fraise sont plus importantes au dehors que dans le marché officiel.
On estime que les quantités vendues au pavillon n° 6 ne représentent que 1/40 des apports généraux faits par chemin de fer et on évalue à 12 810 000 kilogrammes la quantité de fraises arrivant annuellement par voie ferrée et vendue dans le périmètre des Halles. Au « carreau forain », on en vend environ 5 750 000 kilogrammes, ce qui fait en tout 18 560 000 kilogrammes. Il est facile d’évaluer le rendement en argent de la vente de ces fraises. Les prix pratiqués au pavillon n° 6 ont été, en 1899, d’après les relevés officiels, de 1 fr. 07 à 0 fr. 56 le kilogramme, soit en moyenne de 0 fr. 81 le kilogramme. Au carreau forain, le prix moyen a été de 0 fr. 70. La valeur totale des fraises vendues à Paris en 1899 a donc été de 14 401 100 fr.
Après les deux grandes saisons dont il a été parlé plus haut, il arrive de Rouen, Bourg-la-Reine, Saint-Cloud, etc., de petites quantités de fraises des quatre saisons. Ces arrivages durent de juin à octobre ; ils sont peu importants, environ 100 kilogrammes par jour. Les prix varient de 2 à 3 francs le kilogramme et le chiffre de vente annuel dépasse rarement 35 000 francs.
La culture de la fraise est très rémunératrice, mais elle exige beaucoup de soins et de main d’œuvre. Les frais d’établissement d’une fraiseraie sont élevés et sa production n’est guère que de trois années. Même dans les meilleures terres à fraises, la fumure donnée au début agit surtout sur les deux premières récoltes, et après la troisième, le cultivateur se trouve dans la nécessité de retourner son champ pour procéder à une nouvelle plantation
Des constatations faites par M. Coudon, il résulte qu’après avoir été essayée dans presque toutes les communes des environs de Paris, la culture de la fraise s’est concentrée à peu près exclusivement sur les terres qui appartiennent à la formation dite des sables de Fontainebleau. Ces sables forment des sols légers, siliceux, profonds, drainés naturellement et dont les propriétés physiques conviennent parfaitement à la culture du fraisier.
L’ennui des fraisiers, c’est que ce sont des plantes très exigeantes, surtout en azote et en potasse, et que, par suite, elles épuisent rapidement le sol. Les petites fraises des quatre saisons sont, à cet égard, les plus désagréables. Dans les grosses fraises, les exigences sont différentes, suivant les variétés. Les suivantes peuvent se classer, à ce point de vue, par ordre décroissant : Président Thiers, Jucunda, Eléonor, Sir Joseph, Paxon, Héricart de Thury. Cette dernière est celle que les marchands fruitiers, peu respectueux de l’exactitude, appellent « la Ricar » ; c’est d’ailleurs elle qui, à égalité de végétation, donne les plus forts rendements en fruits.
M. Coudon a constaté que le fraisier est extrêmement sensible à l’action des engrais chimiques mis au printemps en couverture. Chacun des trois éléments fertilisants fondamentaux, azote, acide phosphorique, potasse, a une action très marquée sur la production des fraises. Avec une fumure au nitrate de soude, superphosphate et chlorure de potassium, représentant, comme prix d’achat, une dépense annuelle de 330 francs par hectare, on a vu augmenter la récolte de fraises de 47,80 % en 1897 et de 85,7 % en 1898. Cette fumure complémentaire a procuré une augmentation de bénéfices nets, par hectare, de 3 000 francs en 1897 et de 2 940 en 1898. Si on compare la valeur argent des engrais chimiques ajoutée à celle de l’excédent de récolte résultant de leur addition, on voit qu’avec une faible dépense on peut, sans nuire à la qualité des fraises, obtenir une surproduction importante se traduisant, tout compte fait, par un bénéfice net très élevé. Enfin, résultat non moins intéressant, par l’addition d’engrais chimiques, il est en outre possible de prolonger la durée d’une fraiseraie au-delà des limites adoptées par la pratique culturale. | ||||||||