LE DONJON D'AVRANCHES
     
 EFFONDREMENT DU DONJON
     

Avranches, CPA collection LPM 1900

 

Le donjon d'Avranches

Un mystère historique...

David NICOLAS-MÉRY 2002

 

4 Le donjon d'Avranches suite à son effondrement

 

Notre édifice, au début du XIXe siècle, est dans un bien curieux état. Beaucoup de conditions sont déjà réunies pour qu'en 1883 il s'effondre: l'installation du télégraphe Chappe et l'infiltration des eaux de pluie dans les maçonneries sont sans doute les causes majeures de cette catastrophe. En 1848, le percement de la rue Neuve d'Office provoque des dégâts irréparables.

 

Enfin des habitations sont venues s'adosser aux murailles médiévales; le propriétaire de l'une d'elle annexe une modeste salle voûtée interne au donjon; ce voisin a dû utiliser une ouverture médiévale, dans la paroi, pour s'arroger cet espace. Cependant il n'a aucune idée de l'incroyable volume de remblai compris, au-dessus de lui, entre "son réduit" et les télégraphistes.

     

Le 23 février 1883, c'est la rupture de cette voûte qui est à l'origine de la destruction de l'édifice. La presse relate longuement l'évènement.

 

Quoi qu'il en soit, le donjon est à terre.

 

Cependant, et c'est paradoxal, les riverains ont eu à ce moment précis, sous leurs yeux malheureusement non avertis, un véritable "écorché" du bâtiment. En fait, seuls deux pans de murs se sont détachés et les entrailles de l'édifice sont alors visibles. Un photographe avisé, nommé Hodiesne, va immortaliser les ruines. Aujourd'hui, la bibliothèque d'Avranches conserve, par chance, trois clichés essentiels, dont deux véritablement inédits, qui nous permettent de mieux comprendre le donjon d'Avranches.

 

La presse relate longuement l'évènement...

 

 

La rue Neuve d’ Office,

aujourd’hui rue de la belle Andrine

     

Le Nouvelliste, journal local de l'époque, nous apporte la preuve que le donjon était dans un état de délabrement général. Il relate la construction d'un muret, quelques mois avant l'effondrement, autour de la terrasse du télégraphe, "pour éviter les chutes de pierre et de débris qui se produisaient sur la toiture de la maison Briens", maison située en contre bas, au bord de la rue Neuve d'Office.

 

Les articles parus le lendemain de la catastrophe sont unanimes: c'est une voûte, fragilisée par l'important remblai qu'elle soutenait, qui a lâché.

 

D'après Le Nouvelliste, le soir précédant l'effondrement "à 10 heures et demi, onze personnes, ingénieur, architectes, hommes de loi, entrepreneurs et intéressés étaient réunis sous cette voûte, et, dès le lendemain matin, l'on devait commencer les travaux d'étaiement et de déblaiement".

 

La face est du donjon,

Schéma, réalisé par le chanoine Pigeon

     

Le bâtiment aurait-il pu être sauvé? Nul ne peut le dire. Quoi qu'il en soit, tout ce beau monde a bien failli être enseveli sous les tonnes de gravats: un peu plus d'une heure après, le donjon n'existe plus. La voûte cède vers minuit moins le quart,"la terrasse, d'une hauteur totale de 25 mètres s'écroulait, entraînant dans sa chute les murs qui l'entouraient de deux côtés", commente Le Nouvelliste.

 

Il est intéressant de voir de quelle manière les Avranchais ont réagi face à cet événement spectaculaire ayant eu lieu au coeur de leur ville, mais aussi de découvrir la manière dont ils percevaient le bâtiment, le donjon étant alors complètement masqué par des habitations et inaccessible. Les deux journaux locaux relatent longuement l'événement: à aucun moment le mot "donjon" n'est utilisé.

 

Personne ne semble avoir l'idée qu'un tel édifice se trouve à cet emplacement. Le terme "tour" est employé pour parler du bâtiment. L'Avranchin parle tout de même de "construction militaire de l'époque de saint Louis". Ce journal fait également mention "d'énormes blocs de granit et des pans de mur de grosses pierres". Ces blocs de pierre pourraient être des vestiges gallo-romains, semblables aux réemplois évoqués précédemment.