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Genets, départ d'une Maringotte pour le Mont CPA collection LPM 1900 | ||||
De 1914 à 1950 : d’une guerre à l’autre
La guerre de 14-18 va priver de nombreux bras à l’agriculture manchoise : 86 246 soldats sont mobilisés parmi lesquels une majorité de paysans. En outre, l’armée réquisitionne un tiers des chevaux et les usines d’engrais ou de fabrication de maté-riel agricole se transforment en usines d’armement. La conséquence est la baisse du rendement des blés et la chute du nom-bre de bovins.
A la fin de cette guerre, c’est la population rurale qui est la plus touchée. Le recensement de 1921 donne ainsi 425 512 habitants contre 476 119 en 1912 (le département comptait 611 000 habitants un siècle plus tôt !). Cette baisse s’explique aussi par l’attraction vers les villes et l’extension continue des herbages qui nécessitent moins de main d’oeuvre que les surfaces cultivées.
Les pouvoirs publics réagiront alors en favorisant l’accession à la propriété des agriculteurs (la loi de 1918 accorde des prêts au taux de 1 % remboursables en 25 ans pour l’acquisition ou l’aménagement de petites propriétés rurales). En outre, la pression fiscale touche peu les paysans ; ils ne versent en 1929 que 5 % des ressources sur l’impôt sur le revenu. Le bien-être relatif des paysans est accentué par les aides de l’Etat aux anciens combattants. Cet afflux d’argent sert surtout à diminuer la dette rurale et à acheter de la terre.
Toutefois, le département poursuit sa spécialisation dans l’élevage bovin initiée dans la seconde moitié du XIXe siècle. Les chiffres de 1929 montrent qu’avec 280 860 vaches laitières, la Manche se situe à la première place des départements français (le nombre de bovins est passé de 356 900 en 1919 à 546 800 en 1929), idem pour les moutons dont le nombre atteint 138 000 en 1929, chiffre qu’il ne retrouvera plus dans l’histoire ; le nombre de chevaux quant à lui culmine à 75 000 (dont 17 000 poulinières).
Les pommiers à cidre sont également très nombreux dans les herbages (la récolte de pommes suffit parfois à l’agriculteur pour payer son fermage) : 3 445 000 arbres recensés.
Autre enseignement de l’inventaire de 1929, la mécanisation se poursuit avec l’apparition des moissonneuses lieuses. Les tracteurs font aussi leur timide apparition avec 39 machines recensées.
Corrolaire à ce début de mécanisation, l’électricité arrive dans les campagnes dans ces années 20. Cette même année, la Société des Forces Motrices de la Sélune crée l’usine hydraulique de la Roche qui boit avec un barrage en béton armé à voûtes multiples sur la Sélune. On passera de 77 communes électrifiées en 1922 à 551 en 1939.
Mais arrive la crise de 29 et les prix agricoles s’effondrent.
Ainsi, d’après le bulletin du Syndicat des Agriculteurs de la Manche, « le pouvoir d’achat des agriculteurs est d’environ 75 contre 100 en 1914 ».
Dans le même temps, même si la crise industrielle freine l’exode rural, le mouvement d’équipement s’arrête. C’est le retour à l’économie de subsistance connue pendant la guerre de 14. Cette dernière annonce le conflit de 39-45.
Après une « drôle de guerre » qui permet d’effectuer les récol-tes, le département est occupé par l’armée allemande en juin 1940. A partir de 1941, la construction du mur de l’Atlantique fait évacuer la population littorale. La Manche se replie sur elle-même et de nombreux habitants se réfugient dans les fermes ; l’autoconsommation se développe à nouveau chez les paysans ; elle double en France entre 1940 et 1944. Le régime de Vichy glorifie les paysans. En témoignent certains films de M. Pagnol, comme Regain ; c’est à cette époque (1941) qu’est créée la loi sur le remembrement. Mais les combats pour la Libération de la Normandie dévastent les campagnes.
A la fin de la guerre, en France, tous les espoirs sont permis aux agriculteurs : une nouvelle politique agricole se dessine avec Tanguy Prigent, ministre de l’agriculture et lui même paysan. Il souhaite faire disparaître les pénuries et exporter.
Dans la Manche, nombreux sont les villages à avoir été détruits par les bombardements alliés, certains à 80 %. Les destructions ont aussi concerné les fermes : habitat, immeubles d’exploitation, matériel agricole et cheptel ont subi de plein fouet la guerre. Ainsi, plus de 100 000 bovins ont été tués au cours de cette période dont 50 000 vaches laitières. Quant au matériel, 1/5e a été détruit.
En outre, les rendements chutent, 15 quintaux à l’hectare en 44 contre 22 avant guerre.
Dans cette Manche exsangue et sous-équipée, la priorité est d’abord de revenir au niveau de production d’avant-guerre. | ||||
Eun' bounn' empliette CPA collection LPM 1900 | ||||