HISTOIRE DE CHERBOURG
  Début XXeme siecle
         
 

Cherbourg les Transbordeurs CPA collection LPM 1900

 
   
 

Port d'émigration

Texte issu de WIKIPEDIA


Port protégé et accessible à toute heure et de tout temps, pointe avancée dans la Manche, la position de Cherbourg intéresse rapidement les compagnies de navigation reliant les ports tels qu’Anvers et Southampton à la côte est des États-Unis. Le grand brassiage du port (entre 6 m et 13 m, quand Southampton dispose de moins de 10 mètres de profondeur), la rareté des brumes, la sûreté des côtes, et la facilité de chargement ou déchargement, sont autant d’avantages techniques offerts par la ville, dans une concurrence où la rapidité est primordiale. Ainsi, après L'Union le 22 juin 1847, premier navire de croisière à quitter Cherbourg pour New York, les paquebots de la Royal Mail Steam Packet & Co puis de Hamburg Amerika Linie y font escale avant de traverser l’Atlantique dès la fin des années 1860. En 1869, on compte 47 escales et 1 175 passagers pour un tonnage de 81 507 ; 31 ans plus tard il s'élève à 1 651 884 avec 378 escales et 30 313 passagers. Dès lors, Cherbourg acquiert une dimension mondiale – comme en témoigne l’accueil d’une exposition internationale en 1905. Le Titanic y fait escale en 1912 pour son voyage inaugural où il embarqua 274 passagers. Trop gros pour accoster sur les quais de la gare maritime inaugurée en 1912, les steamers doivent mouiller dans la partie ouest de la rade, des transbordeurs, tel le Nomadic, faisant la navette. En 1913, Cherbourg reçoit 500 paquebots et 70 000 passagers.

 

Durant la Première Guerre mondiale, le trafic est entièrement suspendu. Cherbourg de-vient le lieu d’arrivée du matériel et des troupes britanniques puis américaines, et de dé-part des permissionnaires et des blessés. Pour faire face au besoin de main d’œuvre, la ville se voit octroyer par le gouvernement des travailleurs coloniaux en provenance du Maghreb et de l’Indochine ; ils sont installés dans un grand camp sur la Saline d’Équeurdreville.

 

Le port militaire connaît un accroissement d’activité. Si la Manche est sous la surveillance de la Royal Navy, la Marine française réarme néanmoins les forts de la côte et renforce la garnison en poste à Cherbourg. Tandis que le gros des combats sous-marins a lieu dans la mer du Nord, Cherbourg devient un port sûr, où les navires militaires et commerciaux viennent se faire réparer et se mettre à l’abri, et la base arrière des torpilleurs.

 

Cherbourg le Théatre CPA collection LPM 1900


Toute la ville se met à l’heure du conflit : les hôpitaux, complétés par un hôpital de fortune dans la gare maritime, reçoivent blessés et gazés, les camps militaires poussent aux Mielles, et dans la campagne environnante (à Fermanville et dans le parc du château de Saint-Pierre-Église), la population doit accueillir les réfugiés de guerre, travailleurs coloniaux et prisonniers de guerre. La configuration du port, mal desservi à terre et peu profond, empêche son développement commercial face au Havre et à Rouen. Il s'équipe alors de puissantes grues et de voies ferrées, posées par les prisonniers de guerre, pour faire face à l’augmentation des importations de charbon britannique et de pétrole texan. Le charbon est débarqué au port du Homet ; pour l’hydrocarbure, on construit un port pétrolier à Querqueville qui alimente les grands réservoirs de Brécourt. Dès lors, le trafic du port double, atteignant 600 000 tonnes en 1918. Dans les esprits, un port de commerce devient conciliable avec un port militaire.

 

Le transit transatlantique reprend au lendemain de la guerre avec la White Star, la Red Star, l’American Line, la Royal Mail, la Booth Line, la Cunard, la Lloyd, la United States Line, la Canadian Pacific Railway. Depuis Southampton, Brême, Londres, Hambourg et Anvers, elles desservent principalement New York, Montréal, Québec et Halifax, mais aussi Buenos Aires. En revanche, la seule compagnie française, la Compagnie générale transatlantique, reste fidèle au Havre.

 

 
 

Pour accueillir au mieux les escales, la Chambre de commercefait construire un port en eau profonde, conçu par Paul Minard, et une nouvelle gare maritime imposante. Face à la faiblesse des infrastructures portuaires commerciales relevée par la guerre, un projet de vaste zone dédiée au chargement, déchargement et stockage des marchandises se met en place sur le terrain des Mielles, à l’est de la rade, en complément du port en eau profonde. Dans l’Entre-deux-guerres, un train spécial amène en trois heures les passagers partant vers les États-Unis depuis Paris, directement à la grande gare maritime de Cherbourg ; un service d’aérobus assure les correspondances avec les paquebots de la Cunard et de la White Star. En 1929, la gare accueille 985 escales et 300 000 passagers, faisant de la ville le premier port de migration en Europe, devant Hambourg, Southampton et Liverpool. Aussi les compagnies Cunard Line (38 700 passagers en 1921, la moitié du trafic cherbourgeois), White Star Line (22 000 passagers, un quart du trafic), et Red Star Line commandent-elles, en 1922, à René Levavasseur l’hôtel Atlantique (aujourd'hui siège de la Chambre de commerce et d’industrie) pour recevoir les émigrants et interner ceux qui nécessitent quarantaine ou désinfection. Mais le nombre de quotas américains d’émigration est réduit à cause de la crise de 1929, le nombre des émigrants passant de 41 000 à 8 000 entre 1922 et 1935. La légende transatlantique est alimentée pendant plus d’un demi-siècle par les majestueux paquebots que sont le Queen Mary, le Queen Elizabeth et le Normandie, et par ses passagers, stars d’Hollywood, (Liz Taylor et Richard Burton, Orson Welles, Rita Hayworth, Charlie Chaplin, BurtLancaster…) et artistes européens (Salvador Dali, Fernandel, Greta Garbo…). Dans le même temps, le centre-ville se rénove, notamment sous les projets architecturaux de René Levesque, Drancey et René Levavasseur

 
     
 

Transatlantique en rade de Cherbourg, Collection CPA LPM 1950