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LA NORMANDIE ANCESTRALE Ethnologie, vie, coutumes, meubles, ustensiles, costumes, patois Stéphen Chauvet. Membre de la Commission des Monuments historiques Edition Boivin, Paris.1920 |
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Armoires Louis XIII.
C'est sous Louis XIII (1610-1643) que l'on se mit à fabriquer les premières armoires en chêne. Tout porte à croire que c'est dans le Cotentin d'abord que l'on fabriqua ces meubles, Quoique le bien-être commençât à se répandre dans les campagnes, ce furent surtout des meubles de châteaux, de manoirs et d'abbayes, [de même que les premiers buffets à quatre portes semblables et que les premières horloges]. C'est pourquoi tous ces meubles sont fort rares. Il en est de même des meubles de sacristie, destinés à remiser les objets du culte, que l'on ne rencontrait que dans les abbayes riches. Chez les paysans de ce temps, le meuble le plus courant continua à être le coffre construit sur des anciennes données. Ce fut, d'ailleurs, à cette époque et aussi un peu après, que l'on construisit les derniers coffres. |
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Outre ceux-ci, les paysans n'avaient, comme autres meubles, que les bancs tout simples. Les escabeaux étaient, en effet, plutôt des sièges de châteaux et de manoirs. Quant au lit paysan, il n'existait pas à proprement parler, La paillasse était simplement maintenue par de grossières planches de chêne.
Pour en revenir aux armoires Louis XIII, elles sont toutes en chêne et d'assez petite taille. Elles sont, en effet, notablement plus petites que les armoires Louis XIV. Les armoires Louis XIII sont très sobres; elles n'ont pas de sculptures en général mais simplement des moulures. Elles représentent plus un travail de bon menuisier que d'ébéniste. Avec les armoires Louis XIV ce sont celles qui ont le plus d'unité de facture et de style.
Ces armoires Louis XIII comportent deux portes suspendues par des gonds de fer forgé. Ces portes ont des motifs décoratifs géométriques, ce qui n'est pas étonnant, le style Louis XIII étant précisément caractérisé par une réaction contre l'afféterie où était tombé, à la fin du xvi c siècle, l'art de la Renaissance. La corniche est à plusieurs rangs, entamés de rayures simples. Les pieds sont carrés et droits et prolongent le montant latéral. Ce n'est qu'à la fin du style Louis XIII, au moment de la transition avec le style Louis XIV, qu'on commença à sculpter, dans les angles des panneaux, des motifs décoratifs inspirés de la feuille d'acanthe. Dès cette époque, comme les armoires devinrent plus répandues, on commença à reléguer les coffres dans les communs et, en particulier, dans les écuries où ils reposaient sur la terre plus ou moins humide. C'est ce qui explique la pourriture des pieds des coffres que l'on trouve actuellement. A l'écurie, ces meubles servaient à renfermer l'avoine. Cet usage a permis d'en conserver beaucoup. D'autres furent détruits, ou servirent à faire des cages à lapins. On trouve parfois des devants de coffres dont les sculptures sont perforées de trous, en raison de cette dernière destination.
Les armoires Louis XIV, assez rares, sont les plus belles. Ce sont de superbes pièces de chêne massif, ayant deux grandes portes sculptées, une corniche à plusieurs rangs de sculptures et généralement un tiroir inférieur, lui-même sculpté, qui occupe toute la largeur de l'armoire. Ce tiroir, qui porte une serrure, est muni de deux glands qui servent à le tirer. Ces glands, comme les gonds des portes et les deux appliques ajourées des serrures, sont en fer forgé secondairement étamé. Chaque porte comprend deux panneaux carrés, supérieur et inférieur, séparés par un panneau rectangulaire, allongé horizontalement.
Aux quatre coins de chacun des panneaux carrés, se trouvent sculptés des motifs ressemblant à des feuilles d'acanthe.
Ce motif est, en outre, souvent répété sur une ou plusieurs des rangées de la corniche. Le petit panneau horizontal, médian, est sculpté de fleurs et de branches ou de guirlandes. Sur les côtés de ces armoires, les panneaux (deux grands,' carrés, séparés par un panneau intermédiaire, rectangulaire) portent des rainures géométriques fort simples mais d'un ensemble harmonieux. A l'intérieur de ces armoires, se trouvent soit, ce qui est rare, un grand tiroir de chêne situé au milieu de la hauteur de ces meubles, soit, ce qui est presque la règle, deux tiroirs fermant à clefs, situés toujours au niveau du milieu des armoires et occupant, chacun, la moitié de la largeur intérieure. Dans ces tiroirs, les Normandes rangeaient leurs bijoux : cœur et croix jeannette, pendeloques d'oreilles, épingles de coiffes et de fichus, etc.. Elles y mettaient aussi leurs économies et parfois leurs fichus et leurs dentelles. |
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