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Godefroi de Bouillon |
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Le succès de l’appel de Clermont dépasse les espérances du pape et paraît difficilement explicable. L’évolution de la condition matérielle et de l’idéal chevaleresque au cours du XIe siècle a dû en favoriser le retentissement en créant un état de disponibilité. Le départ en Orient est un moyen de s’affranchir de la contrainte du lignage, en un temps où le mouvement de paix et le resserrement des liens vassaliques limitent les occasions d’aventure. La croisade réalise la fusion de l’esprit féodal et des préceptes chrétiens (le chevalier réalise au service du Christ et de l’Église son devoir vassalique).
L’appel à la croisade, adressé surtout à la noblesse du sud de la Loire, d’où est issu Urbain II, dépasse largement ce cadre : aux Provençaux s’ajoutent Godefroi de Bouillon, duc de Basse-Lotharingie et son frère Baudouin de Boulogne, Hugues de Vermandois, frère du roi Philippe Ier de France, avec des chevaliers français et champenois et le groupe conduit par Robert II de Normandie, qui vend son duché à son frère Guillaume II le Roux et Étienne de Blois.
Le départ est fixé au 15 août.
Le premier à partir est Hugues de Vermandois. Il quitte la France vers le milieu du mois d'août 1096 avec une suite respectable et passant par l'Italie, où il reçoit l'étendard de Saint-Pierre à Rome. |
Godefroy de Bouillon et les barons reçus par l'empereur Alexis |
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Godefroi de Bouillon finance son expédition par la vente ou en hypothéquant certaines de ses possessions, part également au mois d'août. Bohémond de Tarente, à la nouvelle de ces départs, décide lui aussi de se croiser. Il abandonne le siège d'Amalfi qu'il était en train d'entreprendre, et passe l’Adriatique avec une petite armée normande et son neveu Tancrède, au début de novembre. Le comte de Toulouse, Raymond de Saint-Gilles, rassemble, quant à lui, avec le légat du pape Adhémar de Monteil, la plus grande des armées des croisés, qui traverse la Dalmatie, non sans difficultés, durant l'hiver et parvient à Thessalonique début avril 1097 et à Constantinople le 21 du même mois. Formée de contingents féodaux cheminant isolément, encombrée de non combattants, la croisade ne répond pas au désir du pape qui l’aurait voulu unie sous la direction d’un légat et d’un chef laïc. Elle répond encore moins aux vœux d’Alexis Ier Comnène, qui avait triomphé des Petchenègues, s’était débarrassé de l’émir de Smyrne, Zachas, et entretient des rapports pacifiques avec les Saljûqides de Rum. L’arrivée de la croisade pose à l’Empire byzantin des problèmes de ravitaillement et de surveillance. Cependant Alexis avait fait préparer des approvisionnements et assuré aux croisés qu’il faciliterait leur passage à condition qu’ils respectent leurs engagements de paix.
Les forces des croisés
Si les souverains ne répondent pas à l'appel du pape, de grands féodaux le font :
Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse, qui en 1087 a participé à la Reconquista ; Guillaume des Baux et son fils Raymond des Baux ; Bohémond de Tarente et son neveu Tancrède de Hauteville de la famille des princes normands d'Italie ; Hugues le Grand, comte de Vermandois, frère du roi de France Philippe Ier ; Robert Courteheuse, duc de Normandie, fils de Guillaume le Conquérant, son chevalier Banneret Jehan des Landes. Robert, comte de Flandre ; Godefroy de Bouillon, duc de Basse-Lotharingie, son frère Baudouin de Boulogne et leur cousin Baudouin du Bourg ; Étienne II, comte de Blois ; Enguerrand Ier, comte d'Amiens et son fils Thomas ; Hugues II, comte de Saint-Pol et son fils Enguerrand. Quatre armées se constituent
Quatre armées se constituent par des regroupements régionaux :
- Les Lorrains, menés par Godefroy de Bouillon et Baudouin de Boulogne, qui traversent l'Allemagne et les Balkans ; - Les Normands d'Italie, conduits par Bohémond de Tarente et Tancrède de Hauteville, débarquant en Épire ; - Les Méridionaux autour de Raymond de Saint-Gilles, qui passent par l'Italie du Nord, la Serbie et la Macédoine ; - Les Français dont Hugues le Grand, Robert Courteheuse et Robert de Flandre. L'arrivée à Constantinople
Alexis Ier se méprend des intentions des Croisés, qu'il croit venus offrir leurs services à son empire pour récupérer ses terres à l'instar de ces troupes scandinaves, qui depuis plusieurs siècles se mettaient à son service. Il exige donc un serment de fidélité et la promesse de restituer à l'empire byzantin les terres qui lui ont appartenu avant la conquête turque et de tenir en fief de l’empereur toutes les autres terres conquises.
Hugues de Vermandois, arrivé le premier à Constantinople après un naufrage lors de la traversée de l’Adriatique, prête sans difficulté à Alexis le serment. S'estimant féal sujet et homme lige du seul empereur germanique, Godefroy de Bouillon refuse tout d'abord de prêter le serment d'allégeance exigé par le basileus de tous les chefs croisés. Il faut lui couper les vivres pour le faire céder. Il sacrifie enfin ses principes à l'esprit de croisade et prête à contrecœur le serment requis. Il s'engage ainsi à remettre au basileus tous les territoires ayant appartenu à l'empire byzantin qu'il pourrait enlever à l'Islam. Triomphant et magnanime, Alexis Comnène témoigne de sa satisfaction en le comblant de somptueux cadeaux : chevaux de prix et vêtements de parade, tissus précieux et coffrets remplis de besants d'or. Raymond de Saint-Gilles, prétextant qu’il ne pouvait servir d’autre suzerain que le Christ, se borne à jurer de respecter la vie et l’honneur de l’empereur. Bohémond de Tarente prêterait volontiers serment, si on le nomme grand domestique de l’Orient, charge qui lui donnerait le commandement des forces impériales en Asie Mineure, par conséquent le commandement de l’expédition. La traversée de l'Anatolie
Après la réunion des quatre armées, les croisés avec des troupes byzantines se dirigent vers Nicée qui est assiégée à partir de mai 1097. Cependant, lorsque la ville est sur le point d'être prise, le 16 juin, les turcs font le choix de se rendre aux Byzantins et les croisés sont surpris, sinon déçus, de voir soudain le drapeau byzantin flotter sur la ville qu'ils s'apprêtaient d'attaquer.
Les croisés reprennent leur route vers la Terre Sainte. De son côté Qilij Arslan Ier bat le rappel des Turcs Seldjoukides et attaque par surprise les croisés à la bataille de Dorylée, le 1er juillet 1097. La victoire des croisés leur ouvre la voie de l'Anatolie.
L’armée progresse difficilement, endurant la faim et la soif, perdant ses chevaux en grand nombre et rendant les guides grecs responsable de ses maux. Vainqueurs des Danishmen-dites et de l’émir de Cappadoce à Héraclée, les croisés traversent le Taurus et sont accueillis favorablement en Cilicie par les Arméniens installés là depuis le milieu du XIe siècle. |
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Les batailles
Siège de Nicée
Le siège de Nicée dura du 14 mai au 19 juin 1097, au cours de la première Croisade. C’est la première action militaire des croisés contre les musulmans et cette victoire permet un arrêt de la progression de l’Islam dans cette région.
La progression turque et la première croisade
Au cours du XIe siècle, l’affaiblissement du califat, le pouvoir central de l’Islam, amène l’arrivée au premier plan de dirigeants turcs qui se taillent des fiefs dans l’empire musulman induisant un morcellement politique de l’empire. Cette arrivée des Turcs s’accompagne d’un fanatisme et de persécutions vis-à-vis des peuples non musulmans. Dès 1009, le calife fatimide Al-Hakim fait détruire des églises chrétiennes à Jérusalem
Les turcs saljûqides s’installent an Anatolie, fondent le sultanat de Roum et commencent à s’emparer de territoires byzantins. Le sultan Alp Arslan occupe l’Arménie en 1064 et détruit Ani, l’une de ses capitales. L’empereur byzantin Romain IV Diogène, tente de relever la situation, mais son armée est anéantie à Manzikert en 1071 et il est capturé. Cette victoire permet la conquête définitive de l’Arménie, et prépare celle d’Édesse et d’Antioche. À Byzance, le général Michel Doukas profite de la vacance impériale pour monter sur le trône et se proclamer empereur. Sans opposition, les Seldjoukides n’ont aucun mal à s’emparer de l’Anatolie, prendre en 1081 la ville de Nicée à quelques dizaines de kilomètres de Byzance et à y établir leur capitale en 1081. La ville d’Antioche est prise en 1085 et Édesse en 1087.
Pour les pèlerins chrétiens, cette prise de possession de l'Anatolie par les Seldjoukides se traduit par de plus grandes difficultés à atteindre Jérusalem, les rançonnages, les persécutions, voire les meurtres sont autant d’obstacles sur la route des Lieux Saints. De plus les Byzantins voient avec une grande inquiétude la présence des Turcs aux portes de leur capitale sans qu’ils puissent vraiment s’y opposer militairement et envoient des messages au pape Urbain II afin d’obtenir de l’aide de la part des Occidentaux. Les messagers sont reçus au concile de Plaisance en mars 1095, et le 27 novembre de la même année, le pape profite du concile de Clermont pour lancer un appel à la chrétienté afin de combattre les Turcs et de délivrer les Lieux Saints
L’arrivée des croisades
Tandis que les barons d’Europe s’organisent pour partir en croisade, de nombreuses personnes issues des couches humbles de la population partent en direction de l’Orient, assemblés en croisade populaire, sous la conduite de quelques chefs tel Pierre l’Ermite. Ces croisés, peu ou mal armés, atteignent Constantinople le 1er août 1096 et s’établissent dans le camp de Civitot sur la rive asiatique de la mer de Marmara. Sans la moindre discipline, certaines bandes vont piller les environs de Nicée. Un certain Renaud prend le château de Xérigordon, à proximité de Nicée, mais sa troupe est massacrée par Kılıç Arslan, sultan de Nicée qui attire ensuite les croisés restés à Civitot et les massacre 21 octobre
Kılıç Arslan reprend alors un conflit contre un voisin oriental, Danichmend, en laissant famille et trésor à Nicée. L’enjeu de ce conflit est la souveraineté de la région au nord d’Edesse, et Kılıç Arslan entend soumettre un arménien, Gabriel qui s’est emparé de la ville de Malatya et faire en même temps une démonstration de force destinée à assagir Danichmend.
Pendant ce temps, la croisade des barons arrive à Constantinople en avril 1097 et des premières dissensions apparaissent entre l’empereur byzantin et les croisés. Ces litiges aplanies, les croisés traversent le Bosphore et se regroupent à Nicomédie. |
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L'empire byzantin en 1081 |
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Le siège
La cité bénéficie de solides défenses, six kilomètres de remparts avec 240 tours et, au sud-ouest, le lac Ascanios qui empêche l'accès de ce côté en assurant un approvisionnement en eau.
Pour parvenir à Nicée, Godefroy de Bouillon fait élargir la route reliant Nicomédie à Nicée et l’empereur Alexis Ier Comnène s’engage à assurer un ravitaillement régulier. Après une étape à Nicomédie du 1er au 3 mai 1097, le 4 mai les croisés s'avancent vers Nicée. La ville est atteinte le 6 mai. Les Lorrains menés par Godefroy de Bouillon s'installent au nord, les Normands de Bohémond de Tarente à l'est, et les troupes de Raymond de Saint-Gilles, arrivées le 16 mai, au sud. Entre-temps un premier assaut a lieu le 14 mai.
Enfin, les survivants de la croisade populaire, autour de Pierre l'Ermite, arrivent avec un contingent byzantin commandé par Manuel Boutoumitès. Alexis Comnène fait également venir des machines de sièges et la ville est bientôt cernée aux trois quarts. Seule subsiste libre la porte sud de la ville, par laquelle Kılıç Arslan tente de faire parvenir des renforts, mais l’armée de Raymond de Saint-Gilles et d’Adhémar de Monteil, arrivée peu après sur les lieux, les surprend et anéantit cette troupe de renforts.
Les assiégés tentent une sortie le16 mai, mais elle est repoussée et ils laissent environ 200 hommes sur le champ de bataille. Profitant de ce succès, Raymond tente de miner une tour de l’enceinte en la faisant saper par ses mineurs. Cette tour s’écroule enfin au cours d’une nuit, mais les Turcs réussissent à réparer la brèche et les croisés n’ont d’autre choix que de faire un siège en règle. L’arrivée de l’armée de Robert Courteheuse, duc de Normandie permet de réaliser un blocus complet du côté terrestre, mais les Nicéens peuvent encore se ravitailler par des barques naviguant sur le lac Ascanios .
La réaction de Kılıç Arslan
En pleine campagne à Malatya, Kiliç Arslan reçoit des nouvelles lui annonçant l'arrivée de la Croisade des barons mais il s'en soucie d'abord assez peu. Lorsque la gravité de la situation se confirme, il convient d'une trêve avec son adversaire pour repousser les occidentaux, les Franj.
Du côté turc, si Kilij Arslan a expédié quelques renforts symboliques aux premières alertes, il est trop tard lorsqu'il arrive en vue de la ville. Son avant-garde est battue par un contingent mené par Raymond et Robert de Flandre le 20 mai. Le 21 mai, Kılıç Arslan tente de percer les lignes adverses, mais la bataille qui se termine tard le soir est sanglante et il doit renoncer.
Kılıç Arslan se replie sur Konya, désormais nouvelle capitale du sultanat. Il aurait transmis aux assiégés un message sibyllin suggérant de se rendre aux Byzantins plutôt qu'aux Francs qui l'année précédente avaient fait de terribles ravages et qui s'« amusaient » à catapulter les têtes de soldats turcs morts dans les précédents combats.
Le 3 juin, le dernier contingent croisé, mené par Robert Courteheuse et Étienne II de Blois complète le dispositif franc. Une tour de siège est montée par les Toulousains, et poussée vers la Porte Gonatas, pendant que les sapeurs œuvrent en sous-sol. Mais la tour est endommagée, et ne parvient pas au contact de la muraille. |
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La prise de la ville
L'empereur byzantin Alexis Ier, qui a suivi sans accompagner les Croisés, arrive avec des bateaux qui permettent d'établir un blocus sur le lac Ascanios : les Turcs ravitaillaient en effet la ville par le lac depuis le début du siège. Deux mille peltastes, commandés par Taticius et Tzitas, arrivent aussi sur les lieux.
Alexis Ier avait fait mener des négociations secrètes par Boutoumitès, qui aboutirent la reddition de la ville.
Dans la nuit du 25 au 26 juin des membres turcs de l'armée byzantine pénètrent dans la ville par le lac, et au petit matin, alors que les Francs préparent l'assaut décisif, ils ont la surprise de voir l'étendard impérial flotter sur les remparts, décevant leur espoir de mettre à sac la ville. |
Siège de Nicée |
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La suite du siège
Boutoumites, nouveau duc de Nicée, interdit aux Croisés d'entrer par groupes de plus de dix dans la ville. Malgré les cadeaux de l'empereur en or, chevaux et autres, les Croisés partirent plein de rancœur, le 26 juin. Le premier contingent était mené par Bohémond de Tarente, Tancrède de Hauteville, Robert Courteheuse, Robert de Flandre, accompagnés par Taticius. Godefroy de Bouillon, Baudoin de Boulogne, Étienne de Blois et Hugues de Vermandois composaient le second. Taticius était chargé d'assurer le retour à l'Empire des villes prises. Les Croisés avaient cependant le moral au plus haut : Étienne de Blois écrit à sa femme Adela qu'il espérait être à Jérusalem cinq semaines plus tard. Conséquences Pour les Croisés, la prise de Nicée est la première action militaire contre l’Islam, et leur permet de continuer sur la route de Jérusalem. Le 1er juillet, les Croisés battent Kılıç Arslan à la bataille de Dorylée, et atteignent Antioche en octobre. Ils atteignent Jérusalem deux ans plus tard et fondent une série d’état chrétiens en Syrie, qui se perpétuent pendant près de deux siècles. Mais la rancœur et la méfiance s’est installée entre les Francs et la Byzantins et sera la cause de nombreuses mésententes, voire de trahison, pendant les siècles suivants. Parmi les pertes franques de ce siège, Robert, comte de Gand (mort au combat du 21 mai) Baudouin de Mons, Baudouin Cauderons, Guillaume IV de Lyon, comte de Forez et Gui de Porsenne. Pour les Grecs, cette prise est la première action d’une reconquête de l’Asie Mineure. Avant la Croisade, les Turcs sont presque aux portes de Byzance et sans l’aide de l’Occident, la ville aurait probablement été prise au cours du siècle suivant. Après le passage de la croisade, Alexis Comnène profite de ce que les Seldjoukides soient aux prises avec les Croisés pour reprendre de nombreux territoires côtiers de l’Asie Mineure, jusqu’à Trébizonde au nord et la Cilicie au Sud. Le sultanat de Roum a subi un premier revers, qui ne met pas en cause son existence, mais son importance. Il survit pendant plus de trois siècles, mais d’autres États alors vassaux gagnent en prestige et en puissance lors des combats contre les croisés, tels les émirats d’Alep, de Mossoul et de Damas. |
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La bataille de Dorylee
La bataille de Dorylee est une bataille livrée le 1er juillet 1097 qui oppose les combattants de la première croisade aux forces du sultanat de Roum. Elle s’achève par la victoire des croisés et la déroute des seldjoukides.
Contexte
Le 29 novembre 1095, le pape profite du concile de Clermont pour lancer un appel à la chrétienté afin de l’enjoindre à délivrer les Lieux Saints. Les barons se lancent dans l’expédition au cours de la seconde moitié de l’année 1096, arrivent séparément à Constantinople au printemps 1097[2], s’y regroupent et assiègent Nicée du 6 mai au 26 juin 1097.
Après la reddition de Nicée, cédée aux Byzantins, les croisés quittent la ville entre le 26 et le 29 juin et poursuivirent leur chemin vers la Palestine en traversant en diagonale le plateau anatolien.
Pour des questions d'approvisionnement les croisés se répartissent en deux armées. La première armée se composait de deux corps, le premier corps, commandé par le duc de Normandie Robert Courtheuse, se composait d'une majorité de Normands mais aussi de Bretons et d'Angevins et le second corps, commandé par Bohémond de Tarente et Tancrède de Hauteville, se composait des Normands d'Italie et d'Italiens. La seconde armée se composait également de deux corps, le premier, mené par Godefroy de Bouillon, est constitué de Wallons, de Rhénans et de Français du nord et le second, commandé par Raymond de Saint-Gilles, comte de Rouergue et de Toulouse, est composé d’une majorité de Provençaux, mais aussi de guerriers originaires d'Auvergne, du Limousin, du Languedoc et de Gascogne
Le sultan du Roum, Kilidj Arslan, avait sous estimé la nouvelle croisade après sa victoire sur la croisade populaire à Civitot et était parti combattre son voisin Danichmend à l’est, lui disputant la suprématie dans la région de Malatya, alors possédée par un prince arménien, Gavril. N’ayant pas réagit suffisamment tôt à la nouvelle menace, il avait perdu sa capitale, Nicée, décide de faire la paix avec Danichmend, son adversaire de la veille, pour avoir les mains libres contre les croisés et bat le rappel des Turcs seldjoukides. Une alliance est même conclue avec Danichmend, qui lui apporte le concours de ses armées
La bataille
Le 1er juillet 1097, l'avant-garde des croisés, les Normands d'Italie de Bohémond arrive à la hauteur de la ville de Dorylée, dans une zone montagneuse propice aux embuscades, et est assailli par les forces de Kiliç Arslan. « Les nôtres se demandaient d’où avait pu sortir une telle multitude de Turcs, d’Arabes et de Sarrasins », nous dit l’auteur anonyme de la Geste des Francs. René Grousset estime que les Turcs épiaient les croisés depuis Nicée et avaient choisi un moment où Bohémond et ses soldats s’étaient écartés du reste de la troupe. Bohémond fait aussitôt mettre sa troupe dans une position défensive en cercle. Dès l'aube, les archers montés turcs commencent à harceler les croisés. Face à la tactique turque de harcèlement et de replis, les puissantes charges de la cavalerie franque se révèlent vaine, Bohémond opte pour la défensive, comptant sur la qualité des armures franques pour tenir jusqu'à l'arrivée des renforts vers lequel des messagers furent envoyés dès le début de la bataille. Durant cette phase défensive, les « femmes furent d’un grand secours (aux croisés) en apportant de l’eau à boire aux combattants et en ne cessant de les encourager au combat et à la défense »
En effet, dès l'annonce de la bataille, laissant en arrière l'infanterie, la chevalerie des autres corps se précipite en plusieurs escadrons vers le champ de bataille. Godefroy de Bouillon arrive le premier avec une cinquantaine d'hommes, puis Hugues de Vermandois, enfin Adhémar de Monteil et Raymond de Saint-Gilles. Ces deux derniers, à l’initiative d’Adhémar, effectuent un mouvement tournant pour prendre les Turcs à revers, qui commencent à se retrouver eux-mêmes encerclés par les croisés. Kilidj Arslan prend peur et fait replier son armée sur des collines, pensant que les croisés n'oseront pas venir l'attaquer sur des positions aussi fortes
S'étant aperçu que les Turcs et leurs alliés Arabes se sont bien retranchés, les chefs croisés se réunissent et montent un plan d'attaque qui va leur donner la victoire. Deux corps de croisés devront attaquer les Turco-Arabes par les deux flancs, un autre de front et, enfin, un dernier devra surgir sur les arrières. L'offensive connaît un succès retentissant. Toutes les attaques auront lieu dans le même temps. Au centre des croisés, les Provençaux de Raymond de St-Gilles attaquèrent de front et enfoncèrent les Turco-Arabes. Aux deux ailes des croisés, les Normands de Normandie et d'Italie, emmenés par Bohémond, Tancrède et Robert Courtheuse, les Flamands de Robert de Flandre, les Français de Hugues de Vermandois et les Bas-Lorrains de Godefroy de Bouillon obtinrent le même succès. Enfin, surgissant sur les arrières de l'ennemi, les Provençaux d'Adhémar écrasèrent la réserve des Turco-Arabe. Non seulement enfoncés sur tous les fronts et commençant à être encerclés de toute parts, les Turco-Arabes paniquèrent et se mirent à fuir dans toutes les directions. L'armée de Kilidj Arslan n'existait plus. Poursuivant les bandes de fuyards à travers les roches, les croisés en firent un grand massacre |
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La bataille de Dorylee |
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Conséquences
Dans la poursuite, les croisés s'emparèrent de l'ancien camp des Turco-Arabes et, du coup, purent se rendre maîtres d'une grande quantité de vivres, de tentes magnifiquement ornées, d'immenses trésors, toutes sortes de bêtes de somme et, surtout, d'un grand nombre de chameaux.
Après cette défaite, Kılıç Arslan n’a plus les moyens de s’opposer militairement à la progression des croisés et va faire le vide devant eux, leurs coupant toute possibilité de ravitaillement en route, mais ne réussit pas à les empêcher d’atteindre la Cilicie, où les arméniens chrétiens accueilleront les croisés, puis Antioche. Profitant de la débâcle seldjoukide, l’empereur byzantin Alexis Comnène envoie son beau-frère Jean Doukas faire la conquête de l’Ionie, la Lydie et la Phrygie, permettent à Byzance de reprendre une partie des territoires perdus à la suite de la bataille de Manzikert.
Enfin cette bataille, premier engagement réel entre les Francs et les Turcs, annonce les prémices d’un changement des rapports de force au Proche-Orient. La tactique des Turcs consiste à utiliser des archers à cheval pour harceler de loin une armée et se retirer dès que les assaillis se mettent à charger. Cette tactique, qui avait fait le succès des Seldjoukides faces aux armées syriennes, byzantines et arméniennes durant le siècle précédent, est totalement inefficace contre les Francs, et les flèches turques sont sans effets sur les lourdes armures des Croisés |
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