COUDEVILLE-SUR-MER
  CC 06.02 GRANVILLE TERRE ET MLER
   
  CAHIERS DE DOLEANCES
     
 

Domaine de La Chesnaye Coudeville, CPA collecton LPM 1900

 

 
 

Coudeville-sur-Mer

Cahiers de doléances du bailliage du Cotentin,

les Etats généraux de 1789.

 

Les cahiers de doléances

 

Dans une fidèle soumission de contribuer aux payements des impôts à proportion des biens que chacun peut posséder, parce que Sa Majesté sera respectueusement suppliée qu'il en sera fait une juste répartition sur les trois ordres composant la nation, sans aucu-ne distinction quelconque, consistant seulement à rendre aux deux premiers états les hon-neurs et "séance" qui leurs sont dus. Qu'il sera pris les moyens pour la juste répartition des impôts et ôter l'arbitraire, toujours nuisible à la classe la plus indigente.

 

Demande aussi, la dite communauté, que tous les impôts soient réduits à un seul et même rôle, et qu'il ne soit nommé qu'un seul collecteur, qui tiendra bureau dans une maison proche de l'église, où les redevables seront tenus de payer tous les mois leur dû, ce qui évitera beaucoup de frais de façon de rôle.

 

Remontre, la dite communauté, que les seigneurs religieux du Mont Saint Michel possè-dent des biens considérables en cette paroisse, en terres, moulins et rentes, tant en argent qu'en blés de toutes espèces et autres prestations, de même que la majeure partie des grosses dîmes, sans contribuer à aucune charge et sans faire déduction des deniers royaux sur les rentes qu'ils perçoivent sur leurs vassaux, ce qui les réduit dans l'impuissance de faire face aux charges de l'Etat.

 

Qu'il y a dans la dite paroisse des terrains vagues, tant en landes qu'en marais, ce qui en diminue le produit ; et que pour le bien de la communauté, et pour se procurer des en-grais de la mer, les chemins qui y conduisent, tant sur cette paroisse que passant par Saint-Martin-le-Vieux, doivent être libres et réparés, et que les habitants de Saint-Martin ne peuvent s'opposer à l'enlèvement des engrais et à l'exploitation du marais commun, et relativement aux titres d'inféodation de l'Abbaye du Mont Saint Michel et à raison de quoi les habitants de Coudeville sont grevés de rentes seigneuriales.

 

Demande, la dite communauté, qu'il soit discuté à l'Assemblée sur le droit des colom-biers ; et ceux où il sera établi, il soit ordonné qu'ils soient bouchés ou grillés pendant la semence et la récolte, afin que les terres ne soient pas "désemencées" et les récoltes bat-tues comme il arrive souvent. Que les dits habitants de cette communauté, ayant été grevés pour la reconstruction d'un presbytère et de la nef de leur église en neuf, presque successivement, supplient respectueusement Sa Majesté de les décharger pour l'avenir de l'entretien du dit presbytère et d'en charger les possesseurs du bénéfice, et qu'ils soient tenus d'administrer les sacrements et la sépulture des fidèles sans aucune rétribution, si mieux, ils n'aiment abandonner les dîmes qu'ils perçoivent, et s'en tenir à la portion congrue.

 

Que sa Majesté sera aussi suppliée de simplifier la procédure et de rapprocher les justi-ciables de leurs juges. L'éloignement des juridictions étant à charge à la communauté située à la porte de Granville et éloignée de Coutances de près de cinq lieues, car il serait bien gracieux dans chaque arrondissement d'avoir un juge qui connaîtrait de toutes affaires.

 

Demande, la dite communauté, la suppression des gabelles, aides, élections, grenier à sel, traites foraines, quart-bouillon, bureau des finances et autres charges onéreuses à l'Etat.

 

En supposant que Sa Majesté retire une livre dix sols par demeau de sel blanc, il est aisé de prouver qu'il ne lui en revient pas dix sols par l'administration qu'il lui en coûte ; si au contraire toutes les personnes portées sur les rôles depuis l'âge de huit ans payaient au Roi vingt sols par an pour avoir le sel libre, il lui en reviendrait beaucoup plus davantage qu'il ne lui en revient, et ses sujets en profiteraient aussi de beaucoup, en établissant à ce sujet un bureau dans chaque communauté, entretenu par icelle, tenu d'en porter le produit chez le receveur qu'il plairait à Sa Majesté d'établir pour ce sujet dans chaque arrondissement.

 

Demandent également mes dits habitants, obligés de fournir la garde-côte la permission d'être armés pour la défense de la patrie et la conservation de leur campagne, que les chasses, pendant que les blés sont industriez, soient défendus à toutes personnes quelcon-ques, que Sa Majesté accorde aux députés de la municipalité de chaque communauté d'arranger bien des contestations qui s'élèvent entre les habitants, comme usurpation de rayes de terre, engrossissement de fossés, abatis d'arbres, dommages faits par les bestiaux et autres minutie dont il survient des procès qui causent la ruine de bien des familles, puisque ces sortes de procès, après de longues chicanes, viennent toujours à une arbitra-tion de deux experts, qui se trouvent souvent corrompus par l'intrigue des plaideurs.

 

Toutes lesquelles doléances, plaintes et remontrances respectueuses ont été faites par le Tiers-état de la paroisse de Coudeville, arrêtées et signées relativement à l'ordonnance de Sa Majesté pour en être ainsi qu'il est prescrit. Le tout, après lecture faite au dit Coude-ville le vingt cinquième jour de février 1789.

 

Note : extrait de Emile LERENDU, « Coudeville en Normandie »