|
||||||||
Par Daniel Bourdelès www@magene CPA collection LPM 1900
On dit que les Inuits peuvent exprimer la neige avec plus de 20 mots différents, tout comme ils désignent la glace d'un nom différent selon son degré de résistance. C'est sans doute la même chose chez les Touaregs quand ils évoquent le désert. A chacun son environnement : en Normandie, convenons que la pluie fait référence ! Chaque mot qualifie un type de pluie bien défini, même s'il semble y avoir ressemblance entre certains termes
Pluie pluie pluie et parapluie
Pluie pluie pluie et parapluie Tombe tombe sur ma tête Pluie pluie et parapluie Tombe tombe jusqu’à la nuit.
|
||||||||
Les petites pluies
"Eune pissie de cat", "eune pissie de ranne" (rainette) ou encore "eune petite iâo", c'est une petite averse sans conséquence.Il peut "pleuvinaer", "plouvinaer", "plouvotaer"."Eune rapillie"est une petite ondée. Il peut aussi "plleuvachi" ou "boucailli" quand la pluie, bien que faible, est plutôt gênante. La "riplleure" est particulière : il pleut et il fait soleil en même temps. Les "breumâs" sont des petites brumes s'élevant du sol quand il pleut. |
||||||||
Les fortes pluies
Si votre "parapie" a résisté jusqu'ici ! Gare à la "vouéchie", mélange agressif d'eau et de vent...
A la "dépêlaée" (de pêle : bassine), ou à "l'ernâpée", quand il pleut à seaux. A la "décllavée", à la "rabannaée d'iâo" (Hte Norm), à "l'abât d'iâo", pluie très lourde qui saura vous tremper jusqu'à l'os. Alors, vous direz : "I tumbe dé l'iâo à béda !", c'est-à-dire en quantité, ou encore "I tumbe à pelaées" ou à "fllés" (à fléaux), "à siâotaées" (à seaux), "à câodrounaées" (à pleins chaudrons) ...
Les brouillards
C'est le "broussin", la "brousse", la "bllâse", le "buhan" (cf l'Abbé Toussaint). La "breune purante" est un brouillard qui se condense en eau. Avant le crachin, il se peut que le temps soit "mucre", imprégnant tout d'une désagréable humidité Il peut aussi "avriller", c'est-à-dire faire un temps doux et humide. Dictons "Breune dauns la vallée, fais ta jouornée, breune sus les mounts, reste à la maisoun." "Broussins dauns les avents, byin des poumes ès Normaunds Les crachins
Quand il crachine faiblement, on dit qu'il "brouollache", ou encore qu'il "broussène". "Y'a de la brousse, mille brins à la pousse !" (dicton de Guernesey)
Il peut simplement "brouolli", c'est-à-dire crachiner en brouillard. Dans ce cas, on dit aussi qu'il "pllouène".
Enfin, si le crachin s'accentue, on dit qu'il "brouasse".
"Mucre" vient du scandinave "mygla" (moisissure) et "mykr" (fumier). "Ramucri" est un verbe toujours usité chez nous qui signifie mouiller le linge pour le repasser.
A la fin du 12e siècle, on note l'existence du mot "broeine" (bruine)
Au 14e siècle, on trouve les traces des mots "broe" et "broue" Les averses
"Eune puchie" se situe entre la simple pluie et l'averse.
"Eune ondaée", de même qu' "eune tapaée", c'est une averse passagère. Elle devient "eune harée" si elle se fait plus dense, ou "eune pichée", ou "eune dégelée".
"Eune grêlaée", c'est une averse de grêle. La pluie peut être la bienvenue quand elle survient après une période de sécheresse : "I tumbe des pyiches dé chent sous" (il tombe des pièces de cent sous).
"Eune chilaée", c'est une sacrée averse ! Mais il y a plus fort : la "lâchie", quand le vent s'en mêle, et surtout "l'afllas d'iâo" ou "l'achanaée", le summum !
S'il pleut abondamment, on dit qu'il "verse" ou que "cha tumbe à crase", ou encore que "cha décllaque" (Denys Corbet, Guernesey).
"Acrasaer de plleure", c'est pleuvoir à verse (Maurice Fichet).
"Versaer coume la mé", quand il pleut à verse.
"Puchie" vient du normano-picard "puch", issu du latin "puteum" (puits).
"Achanée" vient de "chaable" (situé en 1080), issu du latin populaire "catabela" qui signifie "bois abattu par la force du vent".
"Chaable" a donné "chaant", lequel a donné "cheoir" (choir, tomber) Après la pluie
Après la pluie, "cha dépure" (dégouline).
Il peut y avoir des "revelins" (restes de pluies.)
"I s'ar'sitch" (patois de Blainville/mer) signifie qu'il cesse de pleuvoir et que le temps devient progressivement plus sec.
Dans son "Folklore de Guernesey", Marie de Garis énumère un grand nombre de dictons relatifs au temps qu'il fait.
Choisissons cette série sur la prophétie de l'arc-en-ciel
"L'ardalliance du matin fait la mare au ch'min" (the morning rainbow makes puddles on the highway)
"L'ardalliance du mejeu ouvre lé parapie du moussieu" (the midday rainbow opens the gentleman's umbrella) "L'ardalliance du saër est belle à vei" (the evening rainbow is beautiful to behold - a sign of fine weather to come)
Deux autres dictons entendu à Carteret :
"Bllaunche mé et neir Jérri, y a d’ l’iâo à pllens pannyis"
"Quaund il plleut, ch'est sène de mâovais temps" |
||||||||