HISTOIRES INSOLITES EN MANCHE

 

 LES MAGICIENS

 

In Pierre Le Fillastre, de Bricquebec,

Superstitions populaires du canton de Bricquebec

et des communes voisines, Annuaire de la Manche 1832

Par Les Goubelins vendredi 31 juillet 2009

     

Toujours tiré de l’article de Pierre Le Fillastre sur les superstitions autour de Bricquebec au milieu du XIXème siècle, voici ce qu’on disait des Magiciens. Les Magiciens se distinguent difficilement des Sorciers. Les premiers utilisent la Magie, donc les forces inconnues mais naturelles de ce monde, et plutôt bénéfiques alors que les Sorciers utilisent une Magie Noire plus en rapport avec le diable et les démons.

 

Ces confrères des sorciers sont devenus rares de nos jours. La race n’en est pourtant pas éteinte. Le peuple croit généralement que les Italiens excellent dans la magie, ainsi que les Juifs et les mauvais prêtres. Les magiciens ont beaucoup de pouvoir sur les hommes et sur les animaux. Ils peuvent ensorceler, ou jeter un sort sur les personnes qu’ils n’aiment pas ou qui leur ont refusé quelque chose. Ils font tarir les mamelles des vaches, quand on leur a refusé du lait, et, ce qui est pis encore, ils les ensorcèlent et elles meurent de maladies étranges. Telle est la force de leurs enchantements sur les hommes, qu’ils causent la folie ou font périr misérablement, si le magicien, cédant aux prières ou aux menaces, ne tire le sort qu’il avait jeté sur eux.

 

Les magiciens et les sorciers peuvent faire une foule d’opérations miraculeuses, dont le détail excéderait les bornes de cet article. On pense communément que le Grimoire et quelques antres livres remplis d’écritures bizarres et énigmatiques, sont indispensables à un vrai magicien pour ses opérations. Ces livres, qui ne sont point dans !e commerce, mais qui se transmettent entre les magiciens, ont une telle vertu , que si une personne ignorante et entièrement étrangère à la magie, lit certains passages de ces livres, surtout du Grimoire, le diable lui apparaît aussitôt, et il est alors mal aisé de le renvoyer , parce que la personne ne connaît pas la formule qui le chasse. On cite, dans les villages, beaucoup d’histoires très authentiques de semblables apparitions. Il n’est pas sans exemple que le démon ainsi appelé par une personne ignorante et étrangère à l’art, se soit emparé d’elle pendant plusieurs jours, et l’ait transportée en des lieux inconnus ; je pourrais citer à l’appui des faits récents.

 

Les écoliers qui ont étudié la philosophie, comme disent nos villageois, sont suspectés d’avoir des connaissances magiques. On croit que, grâces à ces connaissances, ils peuvent se rendre invisibles, se changer en plusieurs espèces de bêtes pour visionner, de nuit, les passants, etc.

 

Les enfants, et même des personnes âgées, croient que leur curé a un Grimoire, et que, s’il voulait s’en servir, il pourrait faire beaucoup de choses prodigieuses.

 

Avant la 1ère révolution, les magiciens par des poudres qu’ils envoyaient en l’air au milieu des foires, produisaient cette confusion, épouvantable qu’on nomme ici des émotions. Il est certain que ces désordres, qui peuvent s’expliquer très bien sans magie, étaient incomparablement plus communs autrefois qu’aujourd’hui.

 

Les magiciens peuvent arrêter une voiture sur un chemin très-uni ; ils peuvent aussi faire prendre le mors aux dents aux chevaux, qu’aucun pouvoir ne peut plus retenir. Personne ne doute que, par paroles, amulettes, etc, on ne puisse couper la fièvre ou le feu d’un incendie. Enfin, par certaines autres pratiques, ou par des philtres, ou même pour avoir touché de la main une fille quelconque, on peut s’en faire suivre et s’en faire aimer.