CES VELOS DISPARUS
   
 

Emile FRIOL 1/2

         
 

Emile FRIOL
Né le 6 mars 1881 à Tain-l'Hermitage
Décédé le 6 novembre 1916 à Dury

Sprinteur français

 

Texte d'apres un article paru dans

http://www.lepetitbraquet.fr

 

Emile Friol fut le premier grand sprinteur français. Aujourd’hui presque totalement oublié en dehors de Tain l’Hermitage, sa ville de résidence où un club cycliste possède son nom, Emile Friol a marqué son époque par son style et son talent, permettant au sprint français d’être reconnu au plus haut niveau international.

 

Emile Louis Friol  né au domicile de ses parents, rue Montesquieu, dans le troisième arrondissement de Lyon, le 9 mars 1881

 

Très jeune Emile éprouve une véritable passion la bicyclette dans laquelle il entrainera son frère cadet. Ainsi en 1900 et en 1901, nous découvrons parmi les candidatures à l’UVF (Union Vélocipédique de France. Bulletin officiel) un certain E Friol, marchand de cycle, place de l’Eglise à Tain l’Hermitage.

 

CPA collection LPM 1900

 
         
 

Lorsqu’en 1904, Emile Friol remporta pour la première fois le championnat de France de vitesse, il était encore un parfait inconnu pour le grand public. Tristan Bernard publia dans la revue « le Vélo » , un article très élogieux pour le Drômois.

 

« Le cas de Friol est très curieux et très rare. Ce jeune coureur a vraiment brûlé les étapes. Il a été si vite champion qu’il n’a pas eu le temps d’être coming man… C’est un homme qui est venu et qu’on n’avait pas vu venir… Il est venu sans qu’on l’attende. Mais on attendait quelqu’un et on lui fait fête… Il faut toujours quand on salue un nouveau champion, prononcer à part soi, pour conjurer le sort, quelques paroles cabalistiques que les bons sportsmen superstitieux ont toujours à l’usage. Ah, c’est que dans notre histoire les déceptions sont fréquentes… »

 

 
 

Ayant débuté la compétition en 1900, Emile Friol n’a quasiment pas fait parler de lui au niveau national avant ce championnat où son talent éclata aux yeux de tous. Il avait pourtant déjà fait preuve de qualités certaines dans les épreuves régionales, à tel point que, dès l’automne 1902, il est à Paris pour tenter sa chance face aux cadors de l’époque. Vainqueur d’une course de vitesse réservée aux coureurs de troisième catégorie, il gravit un à un les échelons et s’aguerrit doucement.

 

Après dix mois de service national à Besançon, il reprend la compétition et son retour est concluant.

 

Emile Friol manque encore d’audace et de sens tactique. Souvent la victoire lui échappe car il se laisse enfermer par des coursiers plus aguerris et surtout plus roublards que lui mais les qualités intrinsèques du Drômois sont là.

 

Sa victoire au championnat de France semble avoir marqué un véritable tournant dans sa carrière mais aussi dans l’histoire du sprint français.

 
 
         
 

Devant le talent démontré à cette occasion par Emile Friol, la presse spécialisée qui, pour une fois ne se trompa pas, fut dithyrambique. En cinquième et dernière position à l’entrée du dernier virage, il était à une place qui habituellement, de l’avis de tous, ne permet pas de remporter la victoire et pourtant dans un de ces rushs dont il se fera une spécialité, Emile Friol remonta tous ses adversaires dans la dernière ligne droite pour s’imposer assez nettement.

 

Dans le journal « l’Auto » Géo Lefebvre écrit ces quelques lignes : « le meilleur sprinteur allemand, danois ou américain n’aurait pas mieux gagné, avec une plus grande souplesse et une plus remarquable vitesse de jambes ».

 

Dans l’autre journal spécialisé « le Vélo » Ch. Renaud renchérit en déclarant : « Friol est certainement à l’heure actuelle un des coureurs les plus vîtes qui soient au monde. »

 

Tristan Bernard termina son article consacré à Friol parut lui aussi dans le Vélo, par ces quelques mots : « Est-ce le sprinter exceptionnel ? Est-ce simplement un bon coureur ? -  En tout cas, c’est quelqu’un semble-t-il, et il ne faut plus parler désormais de supprimer – faute d’un champion digne de ce titre – notre vieux Championnat de France. »

 

Martin Gale dans le quotidien « La Presse » datée du 20 septembre 1904 ajoute aux commentaires de ses confrères, l’espoir d’une nouvelle ère pour le sprint tricolore : « Hier, la facilité de sa victoire dans sa série et dans la finale du championnat, bien mieux que sa victoire elle-même, font espérer que nous tenons enfin le champion national, susceptible d’être opposé aux cracks étrangers. Nous ne jouerions donc plus un rôle aussi effacé dans les grandes épreuves internationales. »

 

Emile Friol a souvent perdu des courses car il n’avait la force de caractère de certains de ses adversaires et il doutait parfois de lui et de ses formidables qualités. Il n’est pas, selon les canons du début du XXème siècle, un athlète et l’on peut même lire dans la presse qu’il doit ses victoires davantage à ses nerfs qu’à ses muscles. D’une taille moyenne pour l’époque, 1 mètre 68, doté d’une musculature plutôt fine, il est de fait réputé pour ses démarrages foudroyants et sa grande vitesse de jambes. Pierre Chany en fit, en quelques lignes, le plus beau portrait : « Le Rhodanien semblait dépourvu de musculature, il était efflanqué, sec comme un sarment des coteaux de Cornas, mais son influx nerveux le rendait spectaculaire et toujours dangereux pour les meilleurs. »

 
     
 

CPA collection LPM 1900

 
     
 

Jacques Mortane, journaliste à « la vie au grand air » pouvait à l’issue du championnat du monde 1907 déclaré « il est de fait que lorsqu’on voit courir Friol, on a une impression de vitesse angoissante. Cet homme file, file, on se demande s’il n’a pas un moteur de 80 HP dans les jambes. »

 

On sait peu de choses de ses méthodes d’entrainement si ce n’est qu’il avait coutume « de courir quelques tours de piste à la course à pied pour se dérouiller les muscles et se donner du souffle. »

 

Selon René Bierre dans un article de Paris Match, en date du 20 février 1934, Emile Friol s’entrainait d’abord sur la route avec un braquet de 23 x 8, ce qui correspond à un braquet de 46 x 16. Pendant huit jours, il parcourait 20 à 30 kilomètres à l’heure avec trois maillots (probablement pour augmenter la sudation). Pendant les huits jours suivants, il faisait le même travail avec un braquet de 24 x 8 et il effectuait quelques sprints. Durant un troisième cycle de huit jours, il augmentait encore le braquet et utilisait un 23 x 7, avant de passer pour la dernière semaine de travail sur route à un 24 x 7 soit 48 x 14 pour des exercices destinés très probablement à développer la puissance.

 
         
   
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Emile FRIOL 2/2

         
 
 
 

Championnats du monde au Parc des Princes. Le 7 juillet 1907 CPA collection LPM 1900

 
         
 

1907, restera comme la saison de la confirmation pour Emile Friol qui, après avoir conquit le Grand Prix de Paris et un troisième titre de champion de France, s’imposa pour la première fois, lors des championnats du monde qui se déroulèrent au Parc des Princes. Le 7 juillet, opposé en finale à Walter Rutt et Henri Mayer, deux coureurs allemands de talent dont on pouvait légitimement redouter une alliance de circonstance, il se joua littéralement de ses adversaires en démarrant aux 300 mètres pour l’emporter avec plus de deux longueurs d’avance sur Mayer, alors que Rutt complètement dépité s’est relevé bien avant la ligne d’arrivée.

 

Après deux saisons un peu moins brillantes, Emile Friol réalisa en 1910 une année frisant la perfection en s’imposant aux mondiaux, au championnat de France, au championnat d’Europe ainsi qu’au Grand Prix de Paris et au Grand Prix de l’UVF, les deux épreuves françaises les plus réputées au niveau international. Avec deux titres mondiaux et quatre titres nationaux en poche, Emile Friol aurait pu songer à une retraite bien méritée mais il a encore l’envie de courir et de gagner. Certes il est un peu moins présent au très haut niveau mais il demeure un adversaire redoutable et redoutée comme en témoigne ses victoires au grand prix de France 1911 et 1912 et son cinquième titre de champion de France de vitesse en 1913 devant Léon Hourlier et Gabriel Poulain.

 

L’année suivante alors que les bruits des bottes commencent à résonner un peu partout en Europe il est encore là, ne s’inclinant en finale du championnat de France que face à Léon Hourlier, son plus redoutable adversaire au niveau national. Depuis 1906, ils ont à eux deux, remporté sept des neuf championnats de France : 4 pour Friol, 3 pour Hourlier. Ajoutons à cela pour bien mesurer la valeur et la régularité du Drômois qu’entre 1906 et 1914 outre ses 4 victoires, il a également terminé second à quatre reprises, le podium ne lui échappant qu’une seule fois en 1909. Hélas pour Friol, pour Hourlier et pour beaucoup d’autres coursiers fauchés en pleine force de l’âge, il n’y aurait plus jamais de podium, de bras levés en signe de victoire et de charmantes jeunes femmes pour faire la bise au vainqueur. (Voir coup de chapeau consacré aux cyclistes disparus durant la 1ère guerre mondiale). Selon la formule consacrée, Emile Friol est décédé sous l’uniforme le 11 novembre 1916 à Amiens, des suites d’un accident de moto.

 
         
 

Le Docteur Henry Aurenche ami d’enfance d’Emile Friol, écrivain connu du milieu du XXème siècle consacra, en 1923, un livre « Mémoires d'une bicyclette » à son ami trop tôt disparu. Laissons-lui la parole pour nous raconter les circonstances de sa disparition et conclure cet hommage à un immense champion.

 

«En face venant de Bernécourt, arrivait un gros camion américain. Il devait avoir une charge urgente, car il allait vite et, malgré le danger de la route, il poursuivait sa mission. Il était à notre hauteur. Tout à coup, il fait une embardée formidable; le conducteur tué par une balle perdue. L’énorme machine se rabat sur nous. Friol, lancé sur sa moto, ne peut freiner. A toute vitesse, il se brise sur le camion. Ainsi mourut pour son pays, Emile Friol.»

 

« Dans le grand bouleversement qui avait suivi le choc meurtrier, dans le chaos de tout son être, une seule idée demeurait dans l’esprit du champion : l’adieu qu’il avait reçu de Friol : « Pour toi. Travaille. Pense aux miens. »

 

« Quel est cet étroit cimetière, entouré d’arbres verts que le vent balance, tout près d’un coteau creusé d’un trou d’ombre ?

 

 CPA collection LPM 1900

 
         
 

 C’est celui de la carrière de Flirey. C’est là que repose Emile Friol. L’aviette s’approche, rase la crête et passe devant le monument américain. Voilà tout près le petit enclos, trop grand hélas, peuplé de croix blanches. André se penche hors du fuselage, sa main tient une gerbe de fleurs. Il passe. Les fleurs viennent atteindre la tombe de son ami. »

 
     
 

 PALMARES

 
     
 

1904

Champion de France de vitesse 

1905

2ème du G.P de Buffalo

3ème du Championnat de France de vitesse

3ème du G.P de Genève

1906

Champion de France de vitesse 

1er du G.P de France

2ème du G.P de Pâques à Paris

3ème du Championnat du Monde de vitesse

3ème du G.P de Paris

1907

Champion du Monde de vitesse 

Champion d'Europe de vitesse 

Champion de France de vitesse 

1er du G.P de Paris

1er du G.P de France

1er du G.P de Bruxelles

1er du G.P de l'UVF

1er du G.P de Reims

2ème du G.P de Copenhague

1908

1er du G.P de la République

1er du Prix du Conseil municipal de Paris

1er du G.P de l'UVF

2ème du Championnat de France de vitesse

 

1909

Champion d'hiver de vitesse

1er du G.P de Paris

3ème du Prix d'Australie de vitesse à Paris

1910

Champion du Monde de vitesse 

Champion d'Europe de vitesse 

Champion de France de vitesse 

1er du G.P de Paris

1er du G.P de France

1er du G.P de l'UVF

1er du G.P de Pâques

1er du Prix du Conseil municipal de Tours

1er du G.P d'Arras

1er du G.P de Roubaix

1er du G.P de Reims

1er du G.P de Buffalo

3ème du G.P de Rennes

1911

1er du G.P de l'UVF

1er du G.P de France

1er du G.P de Tours

1er du Prix du Conseil municipal de Paris

1er du Prix du Conseil municipal de Nantes

1er du Prix du Conseil municipal d'Angers

2ème du G.P de Pau

2ème du Championnat de France de vitesse

 
         
 

1912

1er du Prix du Conseil municipal de Paris

1er du G.P de France

1er du G.P de Marseille

2ème du Championnat de France de vitesse

2ème du G.P de Pâques de vitesse à Paris

2ème du G.P de Gosselies

3ème du G.P de Paris

3ème du G.P de Bordeaux

3ème du G.P d'Angers

1913

Champion de France de vitesse 

1er du Critérium national de vitesse

1er du G.P de Neuilly

1er du G.P d'Angoulême

2ème du G.P de l'UVF

2ème du G.P de Buffalo

2ème du G.P de Tours

3ème du G.P de France

1914

1er du G.P de France

2ème du Championnat de France de vitesse

3ème du G.P de Pâques de vitesse à Paris

4ème du G.P de Paris

 

CPA collection LPM 1900